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Un rapport sévère de la Cour des comptes conforte les détracteurs du DMP
Les sages de la rue Cambon viennent de publier un rapport au goût plutôt corsé sur le dossier médical personnel (DMP). En substance, la Cour des comptes reproche au DMP son manque de gouvernance par l'Etat, l'absence d'une “ évaluation rigoureuse de son utilité ” et la dérive de ses coûts : plus de 210 millions d'euros depuis 2004. Il n'en fallait pas plus aux détracteurs du DMP, au premier rang desquels le député de Haute-Garonne Gérard Bapt (PS), pour relancer une charge contre un système qui, selon eux, ne répond pas aux besoins des professionnels de santé.Premier grief, le manque d'adhésion. “ Alors que l'Asip (Agence des systèmes d'information partagés de santé, en charge du DMP ? NDLR) espérait 500 000 dossiers créés fin 2011, moins de 200 000 ont été ouverts. Et ils sont quasiment vides. Plus de 30 000 médecins libéraux ont d'ailleurs déjà commencé à s'organiser eux-mêmes pour échanger de l'information, en adoptant Apicrypt, un système de messagerie sécurisé. ”
Les services métier attendus sur la coordination des soins
Certes, le succès espéré n'est pas encore au rendez-vous : l'Asip le reconnaît, le DMP ne se fera adopter par les professionnels de santé que s'il leur offre une véritable plus-value dans la coordination des soins. Or, les services métier, censés précisément faciliter cette coordination, manquent encore à l'appel, même s'ils commencent à poindre. La région Centre est, par exemple, en train de marier DMP et volet de synthèse, un document qui rassemble en un coup d'œil les antécédents et les traitements en cours des patients.En cherchant à condamner le DMP en raison de sa trop faible adhésion, les pourfendeurs du dossier personnel sont quelque peu expéditifs. Le DMP d'aujourd'hui, rendu public en janvier 2011, est le fruit d'un nouveau chantier entamé en 2009 sur les ruines des expérimentations régionales conduites entre 2007 et 2008. Qui pouvait croire qu'en seulement trois ans, en plus de l'infrastructure technique qu'elle a déployée (plate-forme d'hébergement, référentiel d'interopérabilité, identifiant national de santé, etc.) et des éditeurs avec lesquels elle a collaboré (une centaine de logiciels sont compatibles DMP), l'Asip serait à elle seule capable de briser la forte résistance au changement des médecins, particulièrement pugnaces dans le numérique ?Mais plus que tout, c'est l'architecture centralisée du DMP qui semble déplaire. Pour Gérard Bapt, elle amplifie les risques de fuite et de piratage des données. La solution selon lui ? Un DMP portatif sur clé USB : en matière de sécurité, on a vu mieux… Un autre opposant au DMP, le docteur Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF), explique dans Le Quotidien du Médecin que “ la généralisation d'une messagerie sécurisée coûterait infiniment moins cher et serait infiniment plus sûre que ce bouzin ”. Seulement, là encore, cette vision, que d'aucuns qualifieraient d'archaïque, fait fi de toute traçabilité, pourtant au cœur du DMP.
Un manque de gouvernance de l'État
Promoteurs et détracteurs du DMP se retrouvent au moins sur un point, soulevé d'ailleurs par la Cour : l'absence de gouvernance globale de la France dans l'e-santé. En février dernier dans nos colonnes, Jean-Yves Robin, président de l'Asip, expliquait que “ nous manquions d'un pilotage central pour assurer la cohérence des politiques e-santé des industriels, de l'Assurance-maladie et de l'Etat lui-même ”. Si les récentes polémiques pouvaient susciter cette impulsion, elles n'auront pas été vaines.
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