Open data : un modèle économique encore incertain

L’open data Garage a permis de vérifier que les gains économique liés à la libération des données publiques, bien que réels, étaient difficilement mesurables. Tant pour les administrations que pour les développeurs.
Au-delà du soucis de transparence et de démocratie, le mouvement de libération des données publiques promet le développement d’un tissu économique, souvent local. Les retombées de cette croissance doivent concerner à la fois les développeurs d’applications et les entreprises qui exploitent ces données, mais également les administrations qui les libèrent. Seulement voilà, faute de recul, il est pour l’heure difficile d’établir un retour sur investissement. C’est ce qu’il ressort des rencontres de l’Open Data Garage, organisées par la Fing la semaine dernière, à Marseille.
Le calcul contestable de la ville de Washington

Pour mesurer les bénéfices de la collectivité, Simon Chignard, de la Cantine numérique Rennaise,cite l’exemple de ville de Washington, l’une des premières à s’être lancée dans le mouvement open data en 2008. « Elle affirme avoir réalisé un retour sur investissement incroyable de 4 000 %. Ce chiffre, elle l'obtient en mesurant la valeur des 47 applications conçues lors du concours qu’elle a organisé, en retranchant le coût de ce dernier. » Seulement ce calcul pose des questions et mérite d’être relativisé. En effet, il ne prend pas en compte la redondance des applications développées dans le cadre de l'événement. Ensuite, à la différence d’une application qui aurait fait l’objet d’un cahier des charges, celles-ci ne concernent pas un besoin particulier.
Des effets non quantifiables, mais bien réels

Se détachant de cette seule logique chiffrée, Simon Chignard préfère insister sur les gains générés par les effets secondaires des applications, même s’ils restent difficiles à mesurer : « Les informations sur les horaires des transports publics ou la disponibilité des vélos sont, par exemple, une incitation à utiliser les transports collectifs. Au final, tout la ville en bénéficie. » Plus généralement, l’open data peut devenir un élément d’attractivité du territoire.
A Nantes, les bénéfices de l’open data se traduisent par une amélioration des liens entre municipalité et développeurs : « Les acteurs du web n’étaient pas en relation avec la métropole. A l’issu des réunions menées dans le cadre de l’open data, non seulement les projets sont remontés plus facilement, mais ces acteurs ont également pris confiance en une administration qu’ils jugeaient trop lourde, trop lente », explique Claire Galon de l’association nantaise Libertic, qui fait justement le pont entre les porteurs de projets et l’administration.
Dépasser le cadre du territoire

Qu’en est-il maintenant des concepteurs d’applications ? Une certitude : à ce jour, ils ne vivent pas de la publicité. « Les applications les plus populaires ont été téléchargées un maximum de 5 000 fois. Leurs auteurs peuvent tout juste espérer 200 euros de revenus publicitaires par semaine », projette Simon Chignard. Trop court donc pour bâtir un modèle économique.
A moins que ces applications, créées dans un contexte souvent local, deviennent réutilisables à plus grande échelle. C’est le souhait de Jean-Marie Bourgogne, directeur du programme Montpellier Territoire Numérique : « Pour que les applications deviennent réellement pérennes, il faut qu’elles bénéficient d’un parc de clients plus large. D’où l’intérêt d’envisager l’open data, jusque-là cantonné à une approche territoriale, à un niveau interterritorial ou régional. » Il ne s’interdit d’ailleurs pas de récupérer certaines applications open data de Rennes.
Stratégie identique à Brest, où Arnaud Willaime, correspondant Informatique et Libertés de Brest Métropole, entend capitaliser « sur l'ensemble des travaux menés sur Rennes : son portail open data, les formats de données… Nous voulons faire du buzz sur le sujet. Je dois pour cela bâtir un écosystème d'applications riches et le présenter aux élus ».
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