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Face aux contrats de licences inextricables, aux logiciels peu ou pas utilisés, l'optimisation des budgets devient indispensable. Les remèdes vont de l'open source à l'adaptation des stratégies d'achat, en passant par la gestion de parc. Par Alain Clapaud
Les temps changent en matière de coûts logiciels. Si les éditeurs traditionnels ont pu imposer leurs modèles de facturation, à l'image de Microsoft instaurant la Software Assurance en 2001, la montée en puissance des modèles alternatifs, tels l'open source ou la location d'applications (ASP) les contraint à innover. Côté progiciels métiers, ils ont longtemps privilégié une facturation à l'utilisateur nommé, critiquée pour ses lourdeurs, même lorsque le tarif distingue utilisateurs réguliers et occasionnels.Une tendance émerge : la facturation à l'unité d'?"uvre métier. SAP facture ainsi ses modules métiers à la commande, à la feuille de paie ou au nombre d'expéditions. Patrick Lemartret, responsable marketing Business intelligence d'Oracle, confirme : ' On facture un constructeur à la voiture produite, un hôtelier à la chambre louée. Une demi-douzaine d'entreprises du CAC40 nous ont demandé ce mode de facturation. ' Mais une telle approche doit encore démontrer sa pertinence. L'éditeur ASG, lui, a choisi de facturer ses clients selon leur chiffre d'affaires ou, plus généralement, leur niveau d'activité, et non plus sur la puissance machine, pour concurrencer IBM en matière d'outils pour grands systèmes. ' Or, sur nos huit mille clients, seule une dizaine a basculé sur ce mode ', constate Gilbert Amar, directeur d'ASG. Au final, le manque de lisibilité reproché à certaines grilles tarifaires ne devra pas se reproduire, pour éviter d'aboutir à une facturation au gré de l'éditeur.
Des contrats de licences très changeants
Les fournisseurs de logiciels d'infrastructure, pour leur part, modulent généralement leurs tarifs par des indicateurs techniques. BEA Systems facture ainsi ses plates-formes J2EE selon le nombre de processeurs, x86 ou Risc. L'apparition des processeurs multic?"urs et la généralisation de la virtualisation des serveurs ont permis, selon les cas, de bénéficier d'un surcroît de puissance à moindre coût. En effet, Microsoft, confronté à la concurrence de Linux, a compris la menace et continue de facturer son système d'exploitation Windows Server au processeur, multic?"ur ou pas. VMware a réagi de même. IBM, quant à lui, a dû cesser de surfacturer les c?"urs sur plate-forme Intel. Oracle, qui voulait facturer le c?"ur au prix du processeur, a fait machine arrière et proposé un facteur multiplicateur de 0,75 par c?"ur, pour finalement descendre à 0,5 pour les multic?"urs x86 et à 0,25 pour l'UltraSPARC T1 de Sun. Mais si Oracle sait facturer sa base de données et son middleware sur des architectures partitionnées de façon matérielle, il ne reconnaît pas encore la virtualisation logicielle et ses dixièmes de processeur. Par ailleurs, comprendre les contrats de licences est devenu une véritable science, soumise à de fréquents changements. Microsoft a récemment basculé la facturation de ses logiciels Dynamics du mode utilisateur nommé et serveur vers un mode utilisateur concurrent annualisé. Sun a instauré une facturation annuelle par employé de ses logiciels. Laetitia Elie, responsable du pôle licences chez le distributeur Inmac WStore, souligne le besoin d'anticiper ces changements afin d'en tirer parti : ' Fin 2005, lorsque la dernière version de SQL Server a été annoncée, nous avons incité nos clients intéressés à acheter la version précédente avec la maintenance. Il y avait là un réel intérêt financier. ' La maintenance est aussi devenue un champ de bataille, alors qu'elle a longtemps été considérée par les éditeurs comme leur étant due. SAP a chargé sa filiale TomorrowNow de proposer des contrats de maintenance à prix cassé aux utilisateurs de Siebel, PeopleSoft ou JD Edwards. Oracle a répliqué avec son partenaire Systime par une maintenance SAP à moitié prix. Le français Oratech, lui, propose aux clients d'Oracle une maintenance à des prix bien inférieurs à ceux de l'éditeur. Le modèle basé sur la maintenance est aussi celui des éditeurs de solutions open source. Tandis que le débat sur le coût de possession de Linux contre Windows Server continue, le modèle open source progresse dans les couches logicielles.
Le mode ASP ne fait pas l'unanimité
Ainsi, le secteur des bases de données vit l'onde de choc des succès de Postgre-SQL et de MySQL. MySQL a annoncé que le moteur de recherche Lycos Europe avait réalisé 85 % d'économie en migrant depuis Oracle vers le SGBD libre. Le serveur d'applications libre JBoss marque des points. Le ministère français des Finances a basculé de BEA Systems vers JBoss. L'australien Queensland Transport annonce 100 000 $ d'économie grâce à la migration de ses quarante postes de développeurs Borland AppServer vers JBoss. Des économies sont également possibles pour la bureautique client grâce à OpenOffice.org. Mais une stratégie tout open source sur le poste client peine encore, comme en témoigne l'échec de la ville de Bergen en Norvège, qui a mis en lumière le besoin en formation des utilisateurs. Autre voie, le mode ASP représente le stade ultime de la transformation du logiciel en service à la demande. Il dispose lui aussi d'atouts en termes de réduction des coûts : tarification au plus près du nombre réel d'utilisateurs, des coûts de mise en place très faibles, et une formation utilisateur réduite. Mais tous les cas de figure ne sont pas concluants. Le responsable d'une PME française qui a confié son PGI à un service ASP s'insurge : ' Pour le tarif d'une année de location, j'ai de quoi tout réinternaliser. Le service est facturé trois fois trop cher. Quant aux outils bureautiques en ASP que nous souhaitions mettre en place, ça n'a jamais marché. ' Autre point, en matière de licences logicielles, il est indispensable de mener une politique d'achats cohérente. Sophie Faye, directrice marketing de PS'Soft, éditeur d'un outil de gestion de parc, suggère la mise en place d'un portail de demandes d'achats des utilisateurs. ' On respecte ainsi les processus de validation, détaille la directrice. Et on peut instaurer un accès à jeton pour l'utilisation d'un logiciel, les utilisateurs se partageant une même licence. 'Ces gains sont-ils réservés aux parcs de PC importants ? Laetitia Elie, d'Inmac WStore, pense le contraire : ' Nous nous adressons au marché des grandes entreprises comme à celui des PME. Nos partenariats avec les éditeurs nous donnent accès à toutes les informations (contrats existants, échéances, etc.) afin de négocier les conditions tarifaires en amont '. Philippe Latour, directeur marketing du distributeur Software Spectrum, ajoute : ' À partir de cinq cents à huit cents PC, des achats de licences en volumes sont possibles. C'est le cas avec Microsoft ou Adobe. Les remises peuvent atteindre de 15 à 20 %, et on peut encore gagner en cas de contrats pluriannuels. '
30 % d'économies sur les licences
Les éditeurs de solutions de gestion de parcs avancent des économies pouvant atteindre 30 % sur les licences, beaucoup d'entreprises n'utilisant pas toutes celles qu'elles ont acquises. Peu d'entre elles ont instauré un suivi de l'usage réel des logiciels, mais même un audit limité dégagera des profils métiers afin de réduire le nombre de licences. Philippe Latour note : ' Souvent, le nombre de PC n'est connu qu'à 10 ou 15 % près. Connaître son parc à 95 % c'est déjà très bon ! Le plus important, c'est la démarche. Cela demande un sponsor de haut niveau dans l'entreprise. ' Sophie Faye approuve : ' La mise en place de bonnes pratiques, la mise en conformité des systèmes d'information et la réduction des coûts sont les moteurs du marché des outils de gestion de parc et de services. La chasse aux coûts, engagée depuis plus de dix ans, reste d'actualité. '
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