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Si les opérateurs sont si discrets sur le nombre de clients abonnés au haut débit mobile, c'est que leurs offres ne rencontrent pas le succès voulu. En cause, le peu d'intérêt pour ces débits, la tarification floue et abusive, et la
faible couverture.
Selon nos informations, indépendantes des discours marketing des opérateurs, Orange et SFR compteraient, tout au plus, 400 000 clients cumulés en entreprise, trois ans après l'ouverture de leur service de télécommunications
mobile 3G. Pas étonnant, donc, qu'ils restent discrets sur le sujet, se bornant à affirmer que ' tout va bien, les entreprises sont au rendez-vous '.La 3G, ce devait être le rêve des télécoms mobiles. Ce haut débit mobile devait faire chavirer le c?"ur des technophile, convaincre les entreprises de porter leurs applications métier sur le terrain et d'en inventer de nouvelles,
jusqu'alors impossibles. Que nenni. Trois freins principaux peuvent expliquer leur frilosité à sauter le pas.
Les besoins
La majorité des applications d'entreprise nécessaires sur le terrain est dédiée aux forces de vente et aux équipes techniques et de maintenance. Souvent légères, ces applications ne requièrent pas de débits aussi élevés que ceux de la
3G. D'ailleurs, lorsque l'on demande aux utilisateurs si la 3G est plus un confort ou une utilité, ils ne cachent pas leur scepticisme. DSI du spécialiste des infrastructures de transport Eurovia, Stéphane Rousseau vient d'entamer le déploiement de
quelques centaines d'accès 3G pour ses cadres : ' Aujourd'hui, la proposition de la 3G est clairement du confort. Certes, dans le cas d'envoi par messagerie de fichiers de type Powerpoint de plus en plus lourds, elle
améliore la productivité des cadres. Mais, pour les processus métier que nous avons portés en mobilité pour plus d'un millier d'utilisateurs, la technologie Edge, voire le GPRS, suffisent. ' Le constat est similaire pour Eric
Payan, DSI d'ELM Leblanc : ' Nos applications sont taillées pour n'échanger que le strict nécessaire d'informations. On ne saurait que faire du surplus de bande passante procuré par la 3G. ' De
plus, les besoins d'ELM Leblanc exigeraient des terminaux de type PDA durci, embarquant un dispositif de communication 3G, ce ' qu'aucun constructeur n'était encore en mesure de nous proposer en fin
2006 '. Pour Stéphane Rousseau, seule l'invention de nouveaux services et applications pourra le décider à s'intéresser véritablement à la 3G. ' Nous avons réinventé certains processus métier grâce à
l'apport du GPRS. Là, nous réfléchissons aux applications que pourrait nous autoriser la 3G, note-t-il. Nous sommes en mesure d'imaginer que cette technologie nous aide à améliorer le partage des connaissances en temps réel, en
situation, à l'aide d'outils de visioconférence, voire de vidéos de chantier. ' Reste qu'il ne faut pas, non plus, développer des applications utilisables uniquement sur un réseau UMTS alors qu'il ne couvre pas forcément
toutes les zones où l'entreprise est amenée à intervenir...
La tarification
Pour que la 3G cesse d'être un luxe, les opérateurs ont commencé à faire des efforts sur les tarifs. D'aucuns les estiment encore inabordables, ou du moins trop éloignés de ce que peuvent autoriser des budgets raisonnables.
' L'entreprise n'est certainement pas prête à payer le même prix pour équiper les populations opérationnelles et les cols blancs. Les tarifs, encore très compliqués et peu lisibles, constituent un réel frein. C'est pourquoi
nous n'envisageons pas, prochainement, de déploiements massifs ', précise Stéphane Rousseau. Eric Payan, lui, estime que ces tarifs deviennent plus raisonnables. Cependant, les déploiements en entreprise ne concerneront que
quelques privilégiés, tandis que les déploiements de masse ne sauront voir le jour sans une grille tarifaire plus simple, et des moyens de comparaison aisée entre les différents fournisseurs. Pour l'instant, le principal effort des opérateurs a
consisté à lancer des forfaits illimités... assortis de limitations. Tant Orange que SFR introduisent, en effet, des notions de ' comportement raisonnable ' dans les contrats qu'ils proposent. En
clair, ne pas dépasser certains seuils de consommation sur leurs réseaux ! Mais cela ne concerne, évidemment, que les tarifs nationaux. Lorsqu'on évoque l'itinérance (roaming) avec les utilisateurs, le discours se fait plus radical, voire
violent. ' C'est tout simplement du viol ', s'indigne l'un d'entre eux. Exemple. Pour un cadre partant en ' balade ' en Europe ou en Amérique du Nord, le
tarif du mégaoctet atteint 7,5 euros. Et grimpe à 9 euros dans le reste du monde ! C'est ce que révèle le catalogue des tarifs mobilité d'Orange Business Services. Un document qui compte tout de même 60 pages. Alors, même si cette technologie
est disponible dans des dizaines de pays, il n'est pas certain que les entreprises fassent de la transmission de données à tout-va avec ces prix !
La couverture
Lorsque le prix n'est pas un frein, c'est la couverture géographique qui pose problème. Surtout en métropole ?" les Dom-Tom devant, quant à eux, bientôt connaître les opérateurs autorisés à leur proposer des services 3G. Les
opérateurs ont une logique d'équipement traditionnelle, ciblant le grand public et les grandes agglomérations : là où se trouvent les entreprises, mais pas forcément où elles vont. Ainsi, les commerciaux ou techniciens se rendant dans des zones
rurales ne bénéficient pas du service et doivent se contenter d'une couverture Edge ou GSM. En fin d'année, SFR et Orange affirment qu'ils couvriront 70 % de la population. Bouygues Telecom, le petit dernier, ne proposera au mieux qu'un taux de
couverture de 20 % à la même date.Et après ces 70 % ? ' Nous ne sommes pas des philanthropes ', déclare sans détour un opérateur. Le message est clair : pour aller au-delà, il faudra trouver autre chose.
Soit des financements publics, comme pour la couverture des zones blanches du GSM. Soit attendre les autorisations nécessaires pour utiliser les bandes de fréquences du GSM (900 MHz) pour proposer les services 3G. ' Nous
ne disposons pas de la couverture dont on pourrait rêver, mais elle peut tout de même convenir aux nombreux chantiers urbains ', reconnaît Stéphane Rousseau. Puis se pose le problème de la couverture dans les bâtiments, dite
indoor, sur lequel la 3G bute. ' L'inaccessibilité des réseaux mobiles à l'intérieur de certains bâtiments, ainsi que le manque de régularité du débit imposent, la plupart du temps, de concevoir des applications en mode
déconnecté, peu sensibles au débit et qui, au final, s'accommodent très bien du GPRS... ', témoigne Fabrice Maussion, PDG de Tech4Field, intégrateur de solutions métier en mobilité.
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