Quand des blogueurs dénoncent les conditions de travail en SSII

Précarisation des prestataires en régie, menaces de l'offshore? Des blogueurs stigmatisent les dérives en société de services. Effet de la crise ? Leurs billets trouvent une caisse de résonance sur le Web.
Imaginons un secteur d'activité qui regroupe les principaux maux ou peurs du monde socio-économique français actuel : des conditions de travail difficiles, des contraintes fortes sur les horaires, la mobilité, un faible taux de formation continue, des salaires stagnants, une pression liée à la mondialisation et à la peur de la délocalisation, les inconvénients liés à la sous-traitance, une précarité latente, un turn-over pouvant atteindre de 15 à 20 % par an. Ce secteur, on l'imagine aisément être dans l'industrie, de préférence à faible valeur ajoutée et "vieillissante" et se faisant avaler par la Chine. Et pourtant, c'est du secteur des SSII qu'il s'agit. »
En trois longs billets, Nicolas Quint dresse un tableau implacable des conditions de travail en société de services. A l'approche de la quarantaine, cet ingénieur informatique de formation a décidé de faire un break professionnel pour cause de surmenage. Une prise de recul qui lui permet, sur son blog hébergé par Libération, de remonter à l'origine des maux.
« Il y a un gouffre entre le discours marketing sur le forfait affiché par les SSII et le pain qui les fait vivre : la régie. » C'est cette régie, encore largement dominante, qui est à l'origine des mauvaises conditions de travail en société de services. Prêté, le prestataire est un collaborateur de seconde zone qui n'est pas un vrai « collègue » des salariés avec qui il travaille. Isolé, il ne bénéficie pas plus de l'appui, notamment moral, de sa SSII. Ce qui favorise les risques de dépression.
Le donneur d'ordre contribue au système en dépit du risque de participer au délit de prêt de main d'œuvre. « Sous prétexte du sacro-saint principe de se recentrer sur son cœur de métier, les entreprises externalisent à tout va. Mais l'IT, ce n'est pas du consommable, ce n'est pas une fonction support banalisée comme la paie. » Certains informaticiens sont en régie depuis trois, cinq voire dix ans. Ils ont coûté plus cher à l'entreprise qu'un salarié qui aurait été licencié avec de lourdes indemnités de départ. Et que le secteur public s'y mette aussi, avec la création récente d'une coentreprise entre la SNCF et IBM, le surprend.
Et si l’Etat faisait respecter le délit de prêt de main-d’œuvre ?
Nicolas Quint déplore d'ailleurs l'inaction de l'Etat. « Il ne perçoit pas l'informatique – avec son image d'éternel secteur porteur – comme une profession menacée. A tort. Au lieu de tenir à bout de bras des industries sinistrées, il devrait se focaliser sur la bataille suivante : les services. » Les pouvoirs publics pourraient commencer par faire respecter le prêt de main-d'œuvre et forcer les DSI à recourir aux SSII au forfait. Les DSI ne conserveraient en interne des prestataires que le temps d'un projet.
Côté salariés, la création de centres de services régions a apporté un réel plus social en proposant un travail d'équipe, une expertise technique, un début de gestion de carrière. Seul hic, une fois l'informatique hors des murs des entreprises clientes, rien n'empêche qu'elle ne parte ensuite au Maroc, en Roumanie ou en Inde.
Comment briser ce cercle vicieux ? Passer en free lance ? « Un employé de SSII sait calculer ce qu'il est facturé et ce qu'il est payé. En retranchant les coûts de structure, la prime du commercial, et le financement d'intercontrat, il lui est facile d'estimer la marge prise par la SSII. »
Seulement, les indépendants servent de variable d'ajustement avec le phénomène de sous-traitance en cascade. En cas de retournement de conjoncture, les SSII privilégieront leurs ingénieurs en intercontrat. C'est tout le paradoxe. En se mettant à son compte, l'informaticien quitte le monde des SSII tout en restant sous les fourches caudines de son ex-employeur.
« Dégage, sale programmeur ! »
Autre blog, autre ton. Avec son billet intitulé « Dégage, sale programmeur ! », Romain Verdier, « développeur architecte désabusé » a suscité plus de 150 commentaires. « Etre développeur lorsqu'on a plus de 30 ans en France, c'est pire que d'être caissier à 40 ans » débute-t-il. Son postulat de départ : les évolutions de carrière préprogrammées obligent les ingénieurs à rapidement évoluer du statut de développeur à chef de projet reléguant la programmation « au rang de tâche honteuse ».
Une spécificité bien française qui consiste à valoriser le management plutôt que la filière de l'expertise. Les programmeurs s'arrangeront donc pour être perçus comme des ingénieurs d'études, des experts techniques, des chefs de projets, des architectes solution, des consultants, etc. « Le top, quand on est un pauvre prestataire d'une SSII en mission pour une banque, et que l'on passe ses journées à coder, c'est de raconter à tout le monde qu'on est “ingénieur dans la finance”. »
Enfin, on relira avec curiosité les « Chroniques d'un ingénieur en société de conseil et prestation en ingénierie » dans le blog « Ma vie de presta ». L'auteur qui dénonçait les travers en SSII a mis fin, en mai dernier, à son journal de bord « après avoir quitté le système ». Faut-il l'en féliciter ?
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Le_Ploc
Il est surprenant de voir le nombre de consultants qui se mettent à raconter, via des blogs, Twitter ou Facebook leurs conditions de travail.
Mais ils gagnent bien, ils sont mobiles, ils sont jeunes alors on ne les plaint pas, on les blâme presque.
Comme tant d'autre nous essayons de rire des travers des SSII et Cabinets de conseil et comme tant d'autres nous avons même commis un blog (http://ploooooc.wordpress.com/), pour raconter les expériences ahurissantes que nous croisons lors de nos missions. -
jram
J'ai 49 ans , ingénieur, Directeur de projet en ssii et en "fixe" licencié en 2003 en 7 ans j'ai travaillé 6 mois ...et pas dans l'informatique ...trop vieux semble t-il...alors la crise...
Il semble qu'un informaticien soit trop vieux à 35 ans et en France si on n'est pas dans les bonnes cases ben on peut même pas être secrétaire ou opérateur de saisie.... -
jpeg2
Statistiques sur les salaires qui sortent d'où?
j'ai rarement des prestas gagnés plus que des internes , surtout si on regarde l'ensemble des éléments de rémunération
- couverture des frais
- intéressement
- participation
- RTT
- Congés
- retraites complémentaires;
La convention SYNTEC est pire que celle de tous les métiers des clients concernés, difficile d'imaginer que ses ressortissants soient mieux traités !
A diplôme égal, le seul secteur qui paye moins que les SSII c'est l'agroalimentaire (source APEC, je crois). -
Huugy (les bons tuyaux)
Les SSII ont leurs atous et faiblesses.
Ses faiblesses sont variables, mais trop peu se rendent compte que seul le management évolu à "moindre effort".
Les employés experts (ou non!), chef ou directeur de projet s'investissent énormément. Ce sont ceux qui font vivre la structure ... et ne récupèrent au mieux qu'un variable ou augmentation symbolique (anuualisé pour faire croire du contraire).
Sinon, toute crise ou difficulté d'une entité aura bon dos pour éviter tout satisfaction salariale.
Dur vie en SSII (pire en conseil)
Ce n'est pas par hazard que la majorité des consultants s'en vont avant 5 ans d'ancienneté.
Huggy (les bons tuyaux) -
Alex_92
Je suis curieux de savoir quel type de congés tu prends dans une année, parce que dans mon cas, venir glander dans ma boîte sans avoir de boulot je n'appelle pas ça des congés, mais de la chienlit.
Quant aux bons côtés des SSII, rassure-toi, ce n'est pas le salaire et c'est économiquement logique, puisque c'est la personne qu'ils payent qu'ils vont vendre ailleurs, la marge est sur ton salaire, donc tu n'es pas mieux payé en SSII, ou alors elles risquent elles n'ont rien compris.
Sinon, les mercenaires dont tu parles sont justes des gens qui profitent du système comme le font les SSII. Ce qui te choque peut-être, c'est qu'il le fasse sur le dos de ces sociétés. Moi je dis juste BRAVO. -
dmike92
Sauf votre respect, votre constat est affligeant de stupidité.
Je suis prestataire depuis 15 ans et j'ai travaillé dans 4 SSII différentes.
Tout d'abord quand on compare le salaire sachez qu'il faut y intégrer aussi les avantages en "nature" style mutuelle, CE, intéressement, prix du restaurant d'entreprise, etc... que peu de SSII assurent ( moins de 10%) et qui eux ne sont pas imposables de surcroit ! NUANCE donc.
Secondo concernant les mercenaires, ayez le courage - personne ne vous en empêche - de changer vous aussi de boite pour être augmenté piètre individu frustré. Mais le risque avec l'âge de ne plus être employable pour un coût trop élevé, et un cv au parcours morcelé (je ne suis heureusement pas concerné) vous éjecte définitivement du système.
Tertio, allez donc voire dans quelles conditions les intercontrats sont suivis dans les SSII. Contraintes dans 90 % des cas d'être présent quotidiennement au siège de la boîte, sous peine d'être licencié pour abandon de poste.
Il me semble donc que soit vous êtes crétins, soit vous êtes patron d'une de ces entreprises d'exploitants. Dans ce cas, passez votre chemin, la propagande insidieuse, on connait. A bon entendeur salut. -
le_toine06
Qui veut faire de l'info, de nos jours.
Quand un jeune vient me trouver our me dire qu'il veut travailler comme développeur ou admin réseau ou système ou autre, je l'en décourage. Nous les infos, nous sommes très mal considérés par nos responsable, et très mal payé par rapport au heures passées sur le terrain et à assurer un fonctionnement 24H/24 7J/7. Qui veut travailler encore dans des conditions comme celle ci avec un Bac +5 ? PAs de vie de famille, du stress, ...Et par dessus tout les délocalisation. Maintenant on externalise tout, les services de DRH (en pologne), le developpement en Inde, bientôt la chine.............
Franchement, il vaut mieux être boulanger........ -
l'auteur
...il suscite encore des commentaires ! La preuve que ce billet est dans l'air du temps. D'où l'intérêt de l'évoquer pour le "buzz" qu'il a su créer.
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jojoinc
Il me semble assez difficile de tirer des conclusions sur l'état du marché aujourd'hui en citant des sources de plus de deux ans...
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FreeBzH
Bravo pour avoir poser des mots sur une réalité. Si encore la france était bonne en management... mais même pas. Elle excelle dans le micro-management, les .doc et les .xls, et l'amateurisme ambiant.
Raz le bol de la médiocratie !
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