RIM et Nokia, une sortie de crise est-elle encore possible ?

Les deux ténors de la téléphonie souffrent : résultats financiers en berne, baisse des ventes de smartphones, restructuration et réorganisation interne? Ils ont raté le marché des smartphones et luttent pour leur survie.
Panique dans la téléphonie. Alors que Samsung et Apple volent de records en records, RIM et Nokia sombrent. Leurs résultats financiers sont en berne avec une forte baisse des ventes, entraînant des mesures draconiennes de restructuration et de réorganisation interne. Les deux géants souffrent du même mal : des erreurs stratégiques concernant l’émergence du marché des smartphones tactiles.

RIM, le créateur des téléphones BlackBerry, a fait le ménage dans son équipe dirigeante fin mars. Son nouveau PDG, Thorsten Heins, annonçait alors une « révision globale » de la stratégie de la marque canadienne en « recentrant notre activité sur le monde de l’entreprise. (…) Nous ne pourrons pas y arriver si nous essayons de faire comme nos concurrents et tentons d'être efficaces sur tous les marchés. » Une manière de reconnaître un échec sur le marché grand public face à iOS et Android.
Dans une interview accordée à ZDNet, le directeur général de RIM France affirme pourtant qu’« il n’y a aucune remise en question de notre stratégie grand public. » Près de la moitié des 77 millions d’utilisateurs de BlackBerry dans le monde sont justement le grand public, et particulièrement les jeunes, séduits par BBM, la messagerie instantanée et gratuite de BlackBerry.
Un nouveau système pour les BlackBerry

En dévoilant la mise à jour 7.1 de BlackBerry OS, le fabricant remet son système au goût du jour : partage de connexion 3G, intégration d’un module de radio FM, serveur UPNP pour partager ses médias sur un téléviseur. Seuls six terminaux pourront être mis à jour : Blackberry Torch 9810 et 9860, Bold 9790 et 9900, Curve 9360 et 9380. L’application BlackBerry Tag apporte le support du NFC pour les BlackBerry compatibles.
La vraie rupture interviendra, selon RIM, avec BlackBerry OS 10 qui devrait sortir à la fin de l’année. Dès lors, est-ce que cela permettra au fabricant de revenir sur le marché du smartphone ou les jeux sont-ils faits ?
Nokia, une erreur stratégique qui coûte cher

Nokia, numéro 1 des téléphones dans le monde, a fait une erreur stratégique majeure en ne voyant pas venir l’arrivée des smartphones, laissant le champ libre à deux acteurs, Apple avec iOS, et Google avec Android. Pour tenter de rattraper son retard, le géant finlandais s’est allié à Microsoft et à son Windows Phone depuis un peu plus d'un an. Malheureusement, le couperet des ventes vient de tomber : Microsoft n’aurait vendu que 3,5 millions de Windows Phone, toutes marques confondues, depuis le lancement du système en octobre 2010. Ce chiffre révélé par la journaliste américaine Mary-Jo Foley, spécialisée dans les informations sur Microsoft, est contesté par le site WMPoweruser qui parle, lui, de 11 millions d’unités vendues en un an et demi.
Quoi qu’il en soit, on est très loin des chiffres espérés par Microsoft et Nokia. Pour mémoire, Apple a vendu 37 millions d’iPhone au cours du 1er trimestre fiscal 2012. Samsung a atteint les 44 millions de smartphones sur la même période. Selon Andy Rubin, vice-président de Google, 850 000 smartphones et tablettes Android sont activés chaque jour !
Trop peu d’applications Windows Phone et BlackBerry

Nokia s’est donc lancé dans les smartphones Windows Phone avec ses Lumia. Or, que ce soit avec iOS ou Android, les utilisateurs de smartphones se sont habitués à leur mobile et à un système d’exploitation donné. Difficile pour eux de passer sur Windows Phone, d’autant que le système de Microsoft est nettement moins riche en applications (80 000 sur Windows Phone contre environ 750 000 sur iOS et plus de 500 000 sur Android). RIM a le même souci que Nokia avec seulement 60 000 applications dans son App World. Cela va être dur pour Nokia et RIM de rattraper leur retard.
A eux deux, Android (Google) et iOS (Apple) représentent 83 % du marché des téléchargements d’applications mobiles, selon une étude d’ABI Research publiée en avril. Cela donne une idée de la montagne à gravir. Du coup, pour vaincre les réticences, Nokia vend ses smartphones moins cher, rognant ainsi sur ses marges et mettant en péril son modèle économique.
Sur le bas de gamme, Nokia est aussi en mauvaise position. Jadis roi des smartphones bon marché avec son système Symbian, laissé maintenant quasiment à l’abandon (en assurant un support technique jusqu’en 2016), Nokia voit débarquer des smartphones Android à bas prix imposés par les fabricants chinois Huawei et ZTE, mais aussi par Samsung avec ses mobiles sous Bada OS de la gamme Wave.
Des rumeurs de rachat
Avec ces mauvaises nouvelles, les rumeurs de rachat vont bon train. Tout comme celles de revente par Google de Motorola Mobility au chinois Huawei, le canadien RIM fait l’objet de constantes rumeurs de rachat. Surtout, depuis que le gouvernement canadien, par l’intermédiaire de son ministre des Finances, Jim Flaherty, a indiqué que les instances ne s’opposeraient pas à un rachat de RIM, si une proposition sérieuse était faite. Les rumeurs ont prêté des intentions de rachat à Dell, HP, Samsung, mais aussi Microsoft et Nokia. Même si la société finlandaise a perdu 53 % de sa valeur en Bourse depuis un an, sa capitalisation reste encore conséquente, 15,2 milliards de dollars, ce qui la met à l’abri de bon nombre de prédateurs. Un rapprochement avec Microsoft est toujours possible. Malgré ses déboires, Nokia reste numéro 1 mondial des téléphones en 2011. Au vu des derniers chiffres IDC, il devrait pourtant céder son trône à Samsung cette année.