Sur internet, le personal branding (faire de sa personne une marque) aide à valoriser son image, celle de son entreprise ou de ses collaborateurs. Pour un patron, le personal branding représente une belle opportunité pour s'immerger dans les réseaux sociaux, encourager l'humanisation de son entreprise, ou profiter simplement de la puissance du web pour y développer son ego.Ce phénomène ne date pas d'hier. Avant même la naissance d'internet, Steve Jobs, le cofondateur d'Apple, a développé ce personal branding et su cultiver les bruits, les rumeurs et le buzz qui ont contribué au succès de son entreprise. Mais en construisant volontairement le mythe du génie de Steve Jobs, Apple a sans doute pris le risque d'un succès communicationnel capable de se transformer en danger industriel. Confronté à son départ, Apple ne doit-il pas démythifier sa communication, humaniser plus largement sa société en autorisant ses employés à s'approprier l'ère du buzz et de la conversation ?
Un encadrement pérenne pour les jeunes générations
Car cette situation illustre le problème de la pérennité de l'entreprise, les mythes étant, par essence, fragiles. L'autre difficulté touche à la création d'une aberration financière amenée par l'image du patron ? les succès d'Apple sont indéniablement liés à la présence de Steve Jobs ; son statut de mythe vivant semble exercer un pouvoir irrationnel sur le marché. Il faut pourtant relativiser le risque que représente cette “ iconisation ”. Apple s'est ainsi diversifié dans sa gamme de produits et s'est structuré autour de collaborateurs compétents avec, au premier chef, son nouveau PDG, Tim Cook. Dirigé avec un véritable talent industriel, Apple conserve une capacité à encadrer, pendant longtemps encore, ses jeunes experts du marketing, de la communication, du design et de l'engineering. Une iconisation trop importante du PDG risque donc de minimiser le rôle des collaborateurs, pourtant omniprésents quand la création de valeur s'appuie sur l'intelligence collective : on casse ainsi le “ moteur californien ”, qui a besoin d'un fonctionnement collaboratif. A la base, Apple repose sur deux piliers : d'un côté l'ergonomie, le design et la simplicité ; de l'autre, la contribution de ruptures technologiques qui amènent à de nouveaux usages et obligent la concurrence à se mettre au niveau. Le succès est le fruit de ce que ce patron visionnaire a apporté, de son exigence de la simplicité, de sa capacité à disséquer les usages et à positionner l'utilisateur au centre de l'écosystème technique.Humaniser sans “ stariser ”
Mais il faut associer à ce succès la masse de travail et de compétences qui relaie ces géniales intuitions, toute cette intelligence collective qui participe à la réussite finale, le rôle des canaux marketing et commerciaux disponibles ? sans sous-estimer la sous-traitance de la fabrication aux usines chinoises. Le personal branding peut aujourd'hui iconiser d'autres stars, y compris chez Apple, pour prendre la relève de Steve Jobs. Mais quel investissement en temps et en moyens, et quelle prise de risque ! Apple pourrait simplement se mettre à l'école de ses élèves, ces entreprises qui, sur la Toile et les réseaux, ont mis leurs collaborateurs aux commandes du développement et de la communication, au contact des utilisateurs. Humaniser l'entreprise, ce n'est pas nécessairement stariser tout le monde, mais plutôt entrer dans l'ère de la conversation… qui n'est pas celle du buzz.
Votre opinion