Stress chez Orange : « Nous voulons du concret »

Les organisations syndicales d'Orange doivent rencontrer prochainement la direction pour discuter de l'amélioration des conditions de travail. Interview de Jean-Luc Abijou (CFDT France Télécom-Orange).
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01netPro. : Le 11 août dernier, un technicien de France Télécom-Orange s'est suicidé. Depuis, les syndicats réclament des mesures pour combattre le stress au travail. Quelles sont les avancées aujourd'hui ?
Jean-Luc Abijou* : Vendredi, les organisations syndicales dans leur ensemble – qui avaient écrit le 4 août dernier au PDG, Didier Lombard, pour lui demander de prendre des mesures face aux risques psycho-sociaux dans l'entreprise – ont réécrit au PDG. En début d'après-midi, la direction leur a répondu qu'Olivier Barberot, le DRH du groupe, allait revenir de congé plus tôt que prévu pour nous recevoir à partir du vendredi 21 août. Dans la foulée, Didier Lombard leur a confirmé par e-mail qu'Olivier Barberot allait rencontrer les syndicats. Nous essayons actuellement de convenir d'une date, à priori le 25 août dans l'après-midi.
Quelles sont vos revendications ?
La direction de France Télécom a accepté de prendre contact avec nous. C'est un premier pas. Aujourd'hui, nous voulons du concret et souhaitons ouvrir un débat sur l'organisation et les conditions de travail. Nous attendons aussi la déclinaison dans l'entreprise de l'accord interprofessionnel sur le stress. Par ailleurs, nous pensons que le comité national de sécurité, d'hygiène et des conditions de travail (CNSHCT) doit être davantage écouté par la direction. Enfin, le management RH ne doit pas se contenter d'accompagner les salariés. Il doit agir en amont et réfléchir aux évolutions des technologies et des métiers au sein du groupe.
Existe-t-il une problématique particulière au sein du groupe ?
France Télécom-Orange est une jeune entreprise privée, issue d'une vieille administration. Plus des trois quarts des collaborateurs du groupe sont des fonctionnaires. Nous sommes passés d'une entreprise essentiellement technique à une entreprise commerciale, de services. Un grand nombre de salariés ont dû changer de métier, certains contre leur gré. Nous venons aussi de subir le plan Next (2006-2008), qui a abouti à la suppression de 22 000 emplois ; 6 000 emplois ont été créés, mais peu d'entre eux ont été ouverts au personnel « historique ». La pyramide des âges est aussi très déséquilibrée, avec une moyenne d'âge autour de 47 ans.
Quel est donc l'impact en matière de stress ?
Nous préférons ne pas nous exprimer sur les suicides – même si nous partageons la peine des familles – mais revenir plutôt sur l'organisation du travail qui engendre la souffrance psychologique. Par exemple, il arrive fréquemment que des cadres soient placés « en mission » sur un dossier et que, en réalité, ils soient mis au placard. D'autres se retrouvent à faire de nombreux kilomètres le matin et le soir pour rejoindre leur nouveau bureau, à la suite de la fermeture de leur service. Sur ce point, toutefois, France Télécom a signé un accord pour favoriser le télétravail. Il prévoit notamment de l'expérimenter sur des métiers à priori peu compatibles au premier abord avec cette forme d'organisation du travail.
La direction a déjà pris des mesures contre la souffrance au travail. Sont-elles suffisantes ?
Des cellules d'écoute ont été créées. Il est difficile, en tant qu'organisation syndicale, de se prononcer sur leur efficacité. On aimerait qu'elles soient un peu plus indépendantes de la hiérarchie par le biais de partenariats avec des organismes extérieurs, par exemple, mais c'est bien qu'elles existent.
* Jean-Luc Abijou est délégué syndical central adjoint de l'union économique et sociale (UES) de France Télécom-Orange.