Tariq Krim: "Les développeurs anonymes d'aujourd'hui peuvent créer les géants de demain"

L’entrepreneur Tariq Krim a remis à Fleur Pellerin, son rapport sur les talents français de la filière numérique. Six recommandations pour valoriser le métier de développeur et un classement de cent codeurs "exemplaires".
Invité du grand journal sur BFM Business, Tariq Krim, qui a remis à Fleur Pellerin un rapport sur les développeurs en France, estime qu'il n'y a pas de vision matérialisant les ambitions de notre pays dans le numérique. « Beaucoup de développeurs m'ont dit : il faut aller aux Etats-Unis pour se faire connaître et disposer des moyens de se développer » a t-il estimé sur la chaîne.
Selon lui, « Nous ne sommes plus confrontés à des pays. Nous faisons face à des géants du web, très mobiles, qui savent tirer parti de ces talents. Il faut se dire que des anonymes d'aujourd'hui peuvent créer les géants de demain. Il est possible de créer de petites entreprises qui ont un impact mondial ».
Le fondateur de Jolicloud reste, malgré tout, optimiste : « Nous avons les gens et les compétences en France et un système de formation qui ne marche pas mal. Il faut juste avoir envie de placer le numérique au coeur de la réinvention de ce pays ».
En finir avec les stéréotypes sur les développeurs
En France, la profession de développeur est sous-considérée réduite aux stéréotypes du geek à lunettes. Pour lui redonner ses lettres de noblesse, Tariq Krim, entrepreneur en série (Netvibes, Jolicloud) et vice-président du Conseil national numérique, émet six recommandations très concrètes.
Dans un rapport remis, ce mardi 25 mars 2014, à la ministre Fleur Pellerin, il propose ainsi de valoriser les success stories du web et du logiciel. A leur tête, on trouve « des ingénieurs formés dans nos meilleures écoles mais aussi autodidactes » comme Xavier Niel (Free) ou Octave Klaba (OVH), immigré polonais arrivé en France en 1990.
Tariq Krim estime, par ailleurs, que l’Etat, qui consacre 3 milliards d’euros au développement et à l’entretien de ses systèmes d’information – pas toujours à bon escient selon la Cour des Comptes - gagnerait « à promouvoir des développeurs aux postes de responsabilité pour la conduite des projets numériques. »
Il faudrait aussi adapter les conditions d’accès au financement à l’innovation en France. Les guichets de financement public ayant tendance à favoriser les acteurs établis que les startups. « Certains entrepreneurs m'ont avoué qu'ils veillaient à rendre leurs projets moins disruptifs pour avoir une chance d'obtenir des rendez-vous. »
Un visa de travail simplifié pour attirer les développeurs en France

Afin de remédier à la pénurie de talents, Tariq Krim propose à côté des formations d’ingénieurs bac + 5 de favoriser les cycles courts bac +2. Il faudrait aussi multiplier les écoles de codeur de type 42 ou Web@academie à l’intention des jeunes décrocheurs scolaires, notamment issus des quartiers dits sensibles.
Enfin, il propose de créer un visa de travail spécial développeurs pour attirer les talents étrangers en France. « Ce titre de séjour délivré sous condition d’investissement minimal et d’une expertise préalable, bénéficiera d’une procédure accélérée avec des justificatifs simplifiés en préfecture ou dans les consulats. »
Pour donner corps à ses recommandations, Tariq Krim a aussi cartographié les talents française de la filière numérique. Il a ainsi recensé une centaine de professionnels du développement de logiciels, ayant contribué à façonner le secteur. « Cette liste n’est évidemment ni un classement, ni une liste exhaustive, mais simplement une mise en avant de 100 talents du code ».
Parmi ces développeurs, on trouve des noms connus comme Pierre Omydiar qui a créé eBay en 1995, Olivier Poitrey, cofondateur de Dailymotion, Romain Niccoli de Criteo ou Jérôme Rota à l’origine du format de compression vidéo DivX. Il s'y trouve aussi des développeurs plus anonymes, qui sont exposés, pour une fois, à la lumière.
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