L'adaptation au changement a toujours été un moteur du marché informatique, qui est loin de s'essouffler ! A des éléments classiques générant de nouveaux développements (fusions-acquisitions, réglementations, évolutions des
normes fiscales, etc.) s'ajoutent des impératifs qui nécessitent un fort contenu d'investissements IT : développement durable (systèmes d'observation des ressources naturelles, des phénomènes climatiques, etc.) ; nouvelles vagues de
dérégulation (transport ferroviaire, énergie, etc.) ; principes de précaution (contraintes sanitaires, traçabilité, etc.) ; ou encore lutte contre le terrorisme (surveillance, biométrie, etc.). L'exemple de la période 2001-2005 aux
Etats-Unis, qui a vu les investissements en
' homeland security ' passer de quelques dizaines de millions à plus de 10 milliards de dollars (dont entre 15 et 20 % en IT) est, à cet égard,
intéressant.Deux autres phénomènes majeurs vont aussi marquer les cinq à dix prochaines années. Ils concernent, entre autres, les évolutions de l'offre de communication avec la troisième génération mobile et la convergence
(
' triple play ' , voix sur IP, internet rapide). A cela s'ajoute la croissance quasi exponentielle des volumes d'intelligence logicielle intégrée dans les produits et services. Celle-ci explose depuis
quelques années dans l'automobile, les biens de consommation, le textile... L'économie nord-américaine bénéficie de cette dynamique économique incomparablement plus importante que celle de l'Europe. Mais son industrie IT est dans une situation
paradoxale. Ses géants du logiciel sont plus forts que jamais, mais de nouveaux défis se dressent face à eux. La boulimie d'Oracle n'a pas déstabilisé SAP. Quant à Microsoft, il doit affronter des offensives tous azimuts : légales (Union
européenne), technologiques (open source), business models (Google, etc.). Par ailleurs, les mastodontes des
' services ' (IBM, EDS, CSC, etc.) semblent faire du
' surplace '. Ils doivent résoudre des problématiques stratégiques complexes face à l'offensive de l'Inde et, bientôt, de la Chine. Last but not least, l'extraordinaire dynamique de la génération
' e-biz ' (Google, e-Bay, Yahoo, etc.) déferlera sans doute progressivement sur le monde de l'entreprise après avoir gagné la bataille du grand public.
Canada : Toile du nord : L'État réussit sa réforme par les TIC
' Mission accomplie ! L'initiative dite du " Gouvernement en direct " a atteint ses objectifs. (...) Elle a donc pris fin. ' Le message affiché
depuis le début de ce printemps sur
www.ged-gol.gc.ca , le site internet de l'Administration fédérale canadienne, en charge de l'introduction des nouvelles technologies dans l'action étatique, a de quoi surprendre un Français. Peu
habitué à ce qu'un service administratif se saborde lorsque ses objectifs ont été remplis.
C'est pourtant le cas de cette mission initiée par le gouvernement canadien en 1999 et conduite par Christine Desloges. ' Notre rôle était de déterminer des actions réalistes adaptées aux attentes de nos
concitoyens en matière de service public et d'optimisation des dépenses de l'Etat ' , explique-t-elle. Dotée d'un budget de 880 millions de dollars canadiens sur la période 1999-2006, son agence devait identifier la manière
dont son pays, avec une population bilingue de 32 millions d'habitants, répartie sur un territoire grand comme dix-neuf fois la France, pouvait tirer parti des technologies de l'information. ' Après avoir identifié une série
d'objectifs concrets, nous nous étions fixé un calendrier strict, avec une information régulière du Parlement ', confie Christine Desloges.
Aujourd'hui, 84 % de la population a accès au haut débit, et les principaux services administratifs ?" environ 130 ?" sont disponibles en ligne : prestations sociales, assistance chômage, impôts... Les
économies générées sont impressionnantes. Lorsqu'un fonctionnaire répond directement à une question, cela coûte 30 dollars canadiens, 20 dollars quand l'échange se fait par courrier, 10 dollars par téléphone, et 1 dollar par internet !
Cette réaffectation des dépenses n'a pas suscité des suppressions de postes, mais a conduit à une profonde transformation de l'Administration. Qui a concentré ses effectifs sur les questions et dossiers à forte valeur ajoutée, les
demandes basiques étant traitées par le biais de la Toile. Estimant à ce jour ne pas pouvoir aller plus loin, l'agence ' Gouvernement en direct ' a été dissoute. Et Christine Desloges va retrouver son
administration d'origine, le ministère des Affaires étrangères.
Toile du nord : États-Unis : l'Arizona, nouveau champion du réseau Wi-Fi maillé
Les internautes considèrent désormais comme normal de pouvoir se connecter facilement à un réseau Wi-Fi lorsqu'ils se déplacent, et les hots-pots se sont multipliés partout dans le monde. Pourtant, la couverture en extérieur reste
souvent limitée à des parcs urbains ou à des campus universitaires. C'est la raison pour laquelle, aux Etats-Unis, de plus en plus de mairies prennent l'initiative de projets de déploiements Wi-Fi à l'échelle d'une ville entière. Une perspective
rendue possible par la mise en ?"uvre de réseaux maillés : les matériels déployés servent à la fois de points d'accès pour desservir les utilisateurs et de relais pour transmettre les données entre eux, éliminant ainsi le besoin de relier
chaque matériel à une infrastructure filaire.
Il y a peu, San Francisco a retenu la candidature de Google pour la mise en place d'un tel réseau. Sacramento, la capitale de la Californie, a démarré la phase de test du sien en fin d'année dernière. Et, jusqu'à récemment,
Philadelphie ?" l'une des premières municipalités à se lancer dans un projet de ce type ?" était, après New York City, la plus grosse ville de la côte Est équipée. Avec un réseau, une fois totalement déployé, couvrant 350 kilomètres
carrés. Un record ! Or Philadelphie vient de se faire voler la vedette par une agglomération de l'Arizona : Tempe, Gilbert et Chandler, trois villes de la banlieue de Phoenix, comptent relier leurs réseaux Wi-Fi respectifs, pour constituer
la plus grande infrastructure sans fil ininterrompue des Etats-Unis, avec une couverture de 484 kilomètres carrés. Celui de Tempe, déjà opérationnel, compte plus de 600 points d'accès. A Chandler, les différentes phases de déploiement sont
planifiées, et Gilbert commence tout juste à plancher sur le sien, qui doit être terminé fin 2006. La ville ne paiera que l'électricité consommée par les points d'accès Wi-Fi. MobilePro, qui réalise ces déploiements, facturera les utilisateurs entre
4 dollars de l'heure et environ 30 dollars par mois. Mais l'opérateur spécialisé dans le sans-fil ne desservira directement que les utilisateurs de courte durée, par exemple dans les hôtels, les cafés, etc., et la souscription des services passera
essentiellement par des fournisseurs d'accès internet partenaires.
A San Francisco, le réseau Wi-Fi fourni par Google, en partenariat avec le fournisseur d'accès EarthLink (qui équipe aussi Philadelphie), sera gratuit : la société compte sur les publicités en ligne pour générer des revenus,
d'autant qu'elle pourra les cibler en fonction de la localisation précise de l'utilisateur. Le déploiement devrait fournir une couverture de 95 % en extérieur (et 90 % en intérieur). Comme en Arizona, où MobilePro ne s'est aussi engagé sur
une couverture extérieure de 95 %. Les utilisateurs qui souhaiteront utiliser le service à l'intérieur devront, pour la plupart, se munir d'un matériel relais.
Tête chercheuse : États-Unis : un thésard à Stanford
Dans son parcours le menant de sa Transylvanie natale aux Etats-Unis, Zoltán Gyöngyi a laissé peu de place au hasard. Citoyen roumain de descendance hongroise, il décide de rester en Roumanie pour faire ses études, quand nombre de
ses amis rejoignent la Hongrie. Lui, a été séduit par l'université technique de Cluj-Napoca, la seule des deux pays à proposer le cursus pour un diplôme d'ingénieur en informatique, avec des cours dispensés en anglais. Lorsqu'en 2002, il recherche
un établissement pour accomplir sa thèse, il regarde directement outre-Atlantique, malgré la renommée de plusieurs centres de recherche européens. ' Dans ce domaine, rien n'égale les Etats-Unis ' ,
souligne-t-il. Il est conquis par l'université californienne de Stanford, de réputation indiscutable. Sa rencontre avec Hector Garcia-Molina, qui deviendra son directeur de thèse, a fini de le convaincre. Aujourd'hui, son premier souhait, une fois
sa thèse terminée, serait de rester dans le milieu de la recherche académique, dans la Silicon Valley. ' Les places sont rares et les candidats, nombreux. Il n'est pas évident de se présenter au bon moment avec les bonnes
qualifications ' , note-t-il.
Pour le moment, il continue à plancher sur le ' spam web ' , et notamment sur les faux mots clés choisis pour attirer des internautes vers des sites ne faisant pas partie de leur
périmètre de recherche. Zoltán Gyöngyi a ainsi conçu un algorithme baptisé TrustRank (sans rapport officiellement avec le même nom déposé un an plus tard par Google). Il vise à séparer le spam des pages de bonne réputation, sans tenir compte du
contenu : il ne se base que sur la notion de confiance, en partant du principe que les sites réputés ne comportent pas de liens vers les sites de spam, un concept utilisé par les principaux moteurs de recherche. L'étudiant chercheur a également
développé un autre algorithme, alors qu'il travaillait pendant l'été 2004 chez Yahoo ! ' La frontière entre ce qui est du spam et ce qui n'en est pas s'avère de plus en plus subtile, et les critères deviennent subjectifs.
Cela commence à relever davantage de la sociologie que de l'informatique ' , note Zoltán Gyöngyi. Ses travaux actuels restent centrés autour des moteurs de recherche : il travaille à la catégorisation de pages web, ce qui
pourrait aider à affiner les résultats.
Start up : États-Unis : la publicité ' pay-per-click ' va au-delà des moteurs de recherche
Toute entreprise ayant une activité de vente en ligne cherche à acheminer les acheteurs potentiels vers son site électronique. D'où un marché de la publicité en ligne en plein boom : en 2005, il atteignait 12,5 milliards de
dollars, soit une progression de 30 % par rapport à l'année précédente, selon une étude récemment publiée par l'Interactive Advertising Bureau et PricewaterhouseCoopers. En première position, les publicités liées à des mots clés saisis dans les
moteurs de recherche, principe qui vise une clientèle très ciblée. Dans ce cas de figure, la facturation s'effectue au nombre de clics des internautes. On parle alors de pay-per-click (PPC), d'achat de mots clés, ou encore de liens sponsorisés. La
somme déboursée par l'annonceur pour chaque clic est déterminée par un système d'enchères. En effet, il paraît peu probable qu'un mot clé donné n'intéresse qu'une société, surtout s'il fait partie d'une terminologie présentant un fort potentiel,
comme celle liée aux prêts immobiliers.
La start up américaine Kanoodle affirme avoir rénové le concept de liens sponsorisés en l'appliquant aux sites de contenu. Aujourd'hui, d'autres acteurs l'ont rejointe dans cette voie. ' Nous fournissons des
services publicitaires sur les meilleurs sites du web, auxquels Google et Yahoo ! n'ont pas accès. Notre réseau compte plusieurs milliers de partenaires, par exemple les sites du Wall Street Journal ou les chaînes télévisées Fox et
MSNB , indique Doug Perlson, COO de la société. Ainsi, nous n'entrons pas en concurrence directe avec les ténors du PPC que sont les grands moteurs de recherche. De plus, les annonceurs ont tout intérêt à souscrire des services
publicitaires diversifiés. ' Focalisé sur ces sites de contenu, Kanoodle utilise des sujets thématiques, par opposition aux mots clés exploités par les moteurs de recherche. La société propose à ses clients une taxonomie
comportant plus de 14 000 thèmes. ' Ils n'ont ainsi pas besoin de chercher 3 000 variations de mot clé, avec les erreurs d'orthographe, les pluriels, etc. En manipulant un nombre fini de sujets, tout devient beaucoup
plus facile et efficace ' , affirme Doug Perlson. Kanoodle projette désormais d'étendre ses activités à l'international.
Humanitaire : Pérou : une année solidaire en Amérique latine
A 21 ans, Geoffrey Lambert a la bougeotte. Pour rien au monde, cet élève de l'Institut supérieur de l'électronique et du numérique (Isen) n'aurait suivi la parcours type d'un ingénieur. ' J'avais envie
d'aider les gens, d'être dépaysé et de m'imprégner d'une autre culture avant de trouver ma voie ' , insiste-t-il. Aussi, lorsque s'est présentée l'opportunité d'intégrer une association humanitaire au Pérou, il n'a pas hésité
à rendre visite tous les jours à Evelyne Littom, la responsable des relations internationales de l'Isen, pour la convaincre de le laisser partir un an entre la deuxième et la troisième années du cycle d'ingénieur. Une première, à l'Isen.
' Geoffrey est un battant, il n'aurait jamais lâché l'affaire ' , reconnaît-t-elle.
En septembre dernier, il débarque à Jauja, à 250 kilomètres de Lima. Là, il donne des cours d'anglais dans des écoles primaires et des collèges, crée un site internet pour mettre en place un système de parrainage entre les jeunes
Péruviens et des associations européennes, et apprend l'espagnol sur le tas. Cinq mois plus tard, il se lance dans un projet encore plus ambitieux : créer un orphelinat à Potosi, en Bolivie. Cette ville qui a subi de plein fouet dans les années
1980 la privatisation de ses mines d'argent se trouve plongée aujourd'hui dans une situation économique et sociale désastreuse. Pour aider quelques familles, Geoffrey fait feu de tout bois. Il multiplie les contacts avec la municipalité, la
Croix-Rouge, les associations et les autres orphelinats. A son retour en France, vers septembre 2006, il entend bien créer une association avec des élèves de l'Isen afin de donner un second souffle au projet. Pour l'heure, il ignore de quelle façon
il pourra valoriser professionnellement son expérience, mais qu'importe : il a eu carte blanche pour prendre des initiatives, mené de front plusieurs projets, goûté au travail en équipe et appris une autre langue. ' Cela
donne vraiment confiance en soi ' , se réjouit l'intéressé, qui achèvera l'année prochaine son cursus d'ingénieur dans une université allemande.
Jungle : Brésil : l'espoir est pour plus tard
Parmi les nouveaux pays émergents, seul le Brésil n'a pas pris le train de la mondialisation en marche. Si l'Inde puis la Chine ont développé une offre offshore séduisante, le géant sud-américain est resté dans les
starting-blocks. Le pays ne manque pourtant pas d'atouts. Les universités de São Paulo, de Rio ou du Minas Gerais forment des bataillons d'ingénieurs reconnus dans le monde entier. Les Brésiliens représentent ainsi 5 % des étudiants étrangers
reçus dans les écoles de ParisTech. Et les nouvelles technologies sont rentrées dans les usages. Dès 2000, les Cariocas et les Paulistes surfaient en haut débit.
Pourquoi ce savoir-faire ne s'exporte-t-il pas ? Tout d'abord, du fait du risque lié au pays. L'actualité récente dans la capitale économique a montré combien les violences urbaines restent omniprésentes. A quoi s'ajoutent la
corruption et le piratage. Le Brésil représente l'eldorado des cybercriminels, des hackers et autres ' script kids ' . Enfin, la difficulté à nouer des relations commerciales constitue également un
frein. Par exemple, à l'occasion de l'année du Brésil en France, lInria avait invité des prestataires brésiliens. Ils se sont décommandés au dernier moment.
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