Usine IO : Paris a son grand fab lab

Officiellement inauguré ce 1er octobre, ce nouvel espace parisien propose des machines mais aussi du conseil pour passer de l'idée au prototype puis à l'industrialisation du produit.
Les locaux sont ceux d’une ancienne galerie d’art et cela se ressent encore avec leur hauteur sous plafond capable d’accueillir des œuvres monumentales et leur immense porte noire et carrée. Aujourd’hui, il n’est plus question d’œuvres d’art, mais la créativité y est toujours à l’honneur. Les 1500 m2 de ce lieu, rue du Chevaleret dans le XIIIème arrondissement parisien - à quelques encablures de la Halle Freysinet de Xavier Niel - ont été récupérés par Usine IO pour en faire une espèce d’immense fab lab professionnel.
« Notre mission est d’accompagner les porteurs de projet depuis l’idée jusqu’à l’industrialisation de leur produit », autrement dit du prototypage jusqu’au produit conceptualisé prêt à être envoyé à un sous-traitant pour fabrication. « Nous voulons faire monter le niveau technique des porteurs de projets pour qu’ils puissent discuter avec les sous-traitants. Les porteurs de projets viennent souvent du web, et ils ne comprennent pas toujours ce que signifie concevoir un produit » ajoute Benjamin Carlu, à l’origine du concept. Usine IO devrait accueillir à la fois des startups, des entrepreneurs individuels, mais aussi des équipes de grandes entreprises.
1000 m2 dédiés à la conception et la fabrication des produits

On entre dans Usine IO par la salle de conception. 500 m2 avec des postes de CAO, une bibliothèque de ressources techniques, et trois salles de formation. « Trois experts en industrialisation seront là en permanence » ajoute Benjamin Carlu. Un expert en CAO (conception assistée par ordinateur), un autre en industrialisation et le troisième en électronique. « Nous avons recruté des personnes qui ont déjà suivi des développements de produits, du prototypage à la mise en production » précise Benjamin Carlu qui ajoute « c’est ce qui nous distingue de la plupart des FabLab qui font de la transmission de pair à pair, entre membres ». Enfin, les projets commerciaux fermés pourront aussi rester dans la confidentialité s’ils le désirent.

À côté de la salle de conception, les 500 m2 restants du plateau sont dédiés aux ateliers de fabrication. Les lieux ont été aménagés pour suivre la chronologie de la fabrication d’un produit. « On distingue cinq phases majeures, au début, l’impression 3D aide à vérifier que l’objet tient dans la main, puis, à la fin, on réalise les plans pour les envoyer à un sous-traitant », résume Benjamin Carlu.
Ouverts sur la salle de conception, se trouvent la zone de prototypage rapide avec des imprimantes 3D, et un instrument de découpe laser pour le bois, le plastique, le tissu. Juste à côté, l’atelier d’électronique permet de fabriquer ses circuits, de les tester et de les mesurer. Enfin, l’atelier plastique et matière souple permet de faire des lettrages, des découpes et autres. « Les personnes ne seront pas lâchées seules sur les machines, il y a un chef d’atelier et encore d’autres experts en fabrication », rassure Benjamin Carlu. En tout, la structure compte déjà une dizaine de personnes, dont les trois cofondateurs.

Dans une zone séparée, se trouve l’atelier assemblage pour finir le produit, encadré par l’atelier bois et l’atelier usinage. Les équipements vont de machines utilisables à la main à d’autres plus évoluées à commande numérique. « Nous irons jusqu’à de l’usinage quatre axes ce qui permet d’avoir le moins de reprises possible » explique Benjamin Carlu. Tout au fond, l’atelier chaudronnerie pour travailler les métaux, réaliser des soudures et faire de la découpe.
Les plus petits objets fabriqués tiendront dans la main, les plus gros feront 1 m3. Pour l’instant, trois catégories dominent : la robotique, les objets connectés et les mobiliers. L’ensemble du plateau donne l’impression d’être un labyrinthe ouvert avec des fenêtres intérieures et beaucoup d’ouvertures.

500 m2 d’espace de co-working
À l’écart, 500 m2 sur deux niveaux sont dédiés aux bureaux avec un espace de coworking d’une cinquantaine de places et quelques bureaux privatifs. « Ces derniers serviront aux grandes entreprises qui veulent envoyer des équipes à distances pour développer des produits ». Objectif : créer des produits innovants en dehors des outils de prototypage classiques de l’entreprise. « Nous sommes en discussion avec de nombreuses entreprises du CAC 40. Nous nous attendions à ce que les industriels soient les premiers intéressés, mais ce sont plutôt les entreprises de services qui le sont », ajoute Benjamin Carlu.

Le projet a déjà levé quasiment un million d’euros auprès de fonds d’investissement et d’investisseurs privés comme Xavier Niel de Free, Henri Seydoux de Parrot, Jacques-Antoine Granjon de Vente Privée et Hugues Souparis d’Hologram Industries. « Nous avons aussi remporté l’appel à projet fab lab et reçu 200 000 euros de subventions », complète Benjamin Carlu.
Niveau business model, Usine IO fonctionne par abonnement sans sélection des dossiers. « Pour intégrer la structure, le seul prérequis est de travailler sur un objet » assure Benjamin Carlu. L’équipe espère accueillir à terme 500 membres (contre une trentaine actuellement). L’accès à la zone de conception et aux ateliers coûte 150 euros par mois et par personne avec un engagement minimum de trois mois.
L’espace de coworking coûte, quant à lui, 400 euros par mois et par personnes avec un engagement minimum de six mois. Des prestations de conseil payantes de un à trois jours seront aussi proposées pour compléter les compétences des équipes existantes. Enfin, un magasin de matériaux sera disponible pour acheter les matières premières à la taille des machines. Mais les membres pourront aussi venir avec leurs propres matériaux.
La zone de conception sera ouverte en continu pendant la semaine de 9h à 20h30, et la zone de bureau devrait être accessible en permanence via une entrée séparée. L’inauguration est prévue pour le 1er octobre… Ce jour-là, les locaux devraient encore sentir la peinture.