Yahoo! : une ballade irlandaise pour protéger ses données et son cash

Pour Yahoo, la délocalisation en Irlande offrira « un meilleur service à ses clients ». Elle sert surtout à bénéficier d'une fiscalité plus légère, à se mettre sous une juridiction plus compréhensible en matière de données personnelles.
Marissa Mayer, la pétillante dirigeante de Yahoo, a plus d’un tour dans son sac pour améliorer les affaires de son groupe. Après des résultats franchement décevants, sa mission reste de rassurer les marchés, mais surtout les annonceurs. C’est pour eux qu’elle a décidé de délocaliser en Irlande ses activités européennes, africaines et du Moyen-Orient. Ce déménagement sera effectif le 21 mars.
L’optimisation fiscale est l’une des raisons qui ont amené Yahoo prendre cette décision. Mais la mise des données personnelles sous la juridiction irlandaise n’y est pas pour rien. Bien au contraire… Son taux d’imposition de 12% a déjà séduit nombre de grandes entreprises américaines comme, entre autres, Google et Apple.
Les données personnelles sont aussi un enjeu important. En mettant ces informations sous des cieux plus cléments, le groupe américain veut surtout dépendre d’une autorité qui partage, comme elle, la culture anglo-saxonne.
« En effet, l’Irlande aborde la question des données personnelles d’une manière plus souple que dans les pays latins », nous a expliqué maitre Christiane Feral-Shuhl, ancien bâtonnier du barreau de Paris et avocate spécialisée dans les nouvelles technologies.
L’Irlande accepte des procédures que la France, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne ou la Belgique n’approuvent pas . C’est le cas des cases précochées (opt-Out) qui sont, elles, acceptées en Irlande. De ce côté de l’Europe, les autorités privilégient l’opt-In qui laisse à l’internaute la possibilité ou non d’accepter telle ou telle condition d'utilisation.
Toutefois, l’avocate rappelle que l’Irlande fait partie de l’Europe, donc soumise, comme les autres états membres, à la règlementation européenne. « En cas de litige, les autorités locales vont pouvoir faire valoir une interprétation des textes plutôt qu’une autre », précise Mme Feral-Shuhl.
Des sujets à aborder entre François Hollande et Barak Obama
Pour la Cnil aussi, le dossier risque d’être compliqué. Dans un entretien à ZDnet, Hervé Machi, son directeur juridique, estime qu’en cas de problème, « la réponse ne peut pas être binaire. Il faut regarder au cas par cas ». Mais, selon cet expert, la « Cnil resterait donc compétente en matière de contrôle et l’argument du regroupement en Irlande ne peut suffire pour lui permettre de revendiquer à être soumis de manière exclusive au droit irlandais. »
Le sujet risque d’être abordé en haut lieu la semaine prochaine. Lors de son voyage aux États-Unis, les enjeux numériques seront certainement l’un des sujets les plus sensibles qu’aborderont François Hollande et Barak Obama.
Hier, lors d’une visite chez Ventes-Privées, le Président français a indiqué que l’harmonisation fiscale serait discutée avec son homologue américain. Évoqueront-ils aussi le traitement des données ? Il y a de fortes chances, mais sur ce sujet, François Hollande n’a avancé aucune piste de négociation.
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