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Apple: vers une première grosse panne pour l'iPhone

Les alertes se multiplient du côté de l'ecosystème Apple: la production d'iPhone pourrait être réduite de 30% au premier trimestre de cette année, un premier vrai faux-pas commercial pour le groupe.

Les alertes se multiplient du côté de l'ecosystème Apple: la production d'iPhone pourrait être réduite de 30% au premier trimestre de cette année, un premier vrai faux-pas commercial pour le groupe. - Philippe Lopez - AFP

Après plusieurs signaux alarmants du côté de Taïwan et des États-Unis, c’est du côté du Japon qu’on a désormais des indices clairs: Apple va être obligé de réduire sa production d’iPhone. Un défi de plus pour la Bourse, déjà bien mal à l’aise avec les valorisations actuelles de la high-tech en général.

Déjà 25% de perdus depuis le dernier pic historique de mai dernier, et une défiance toujours entière autour d'Apple. Le titre est toujours en configuration de "Bear Market", tendance baissière de long terme, et a signé un repli de 2,5% hier à Wall Street.

En cause, de nouveaux signaux clairs qui tendent à démontrer que les perspectives de la nouvelle génération d’iPhone sont moins brillantes que prévu. Il y a quelques semaines, il y avait eu un premier signal d’alerte en provenance des sous-traitants taïwanais du groupe.

L’écosystème Apple inquiète

Tout ceci avait été confirmé par les fournisseurs américains Jabil Circuit et Dialog Semiconductor, qui conçoivent boîtiers et composants électroniques. Ces derniers, par l’état de leurs prévisions, prouvaient dans les faits qu’Apple réduisait la voilure en termes de commandes de composants.

Ce matin, c’est le journal Nikkei qui accrédite la thèse, après avoir examiné les données fournies par les fournisseurs japonais d’Apple. En effet, l’iPhone fonctionne aussi avec des écrans Sharp et Japan Display, des composants TDK ou encore des capteurs photo Sony.

Production réduite de 30%?

Au vu de leurs derniers chiffres, Nikkei estime qu’Apple va réduire sa production de 30% pour l’iPhone6 et l’iPhone 6s au 1er trimestre de cette année, face à une forte accumulation de stocks, que les distributeurs vont devoir écouler rapidement. Un retour à la normale est prévu pour le 2ème trimestre si tout va bien.

Une mauvaise évaluation de la demande qui a inquiété Wall Street hier: les analystes s’attendaient à ce que la nouvelle génération d’iPhone se vende moins bien que prévu, mais considère les projections du Nikkei comme sources d’inquiétudes plus profondes désormais.

La Chine: priorité stratégique… et défi majeur

Apple n’a-t il pas eu les yeux plus gros que le ventre? Il faut dire que le choix délibéré du groupe de miser sur les fondamentaux du succès de l’iPhone, sans trop d’innovations, et avec une politique de prix élevés inchangée, constituait un vrai défi, alors que la Chine est toujours l’objectif numéro un.

Et pour l’iPhone comme pour n’importe quel actif de valeur, que ce soit le pétrole, l’acier, les capitaux ou autre, le marché chinois est toujours extrêmement compliqué à évaluer en matières de volumes, de stocks et de demande de manière générale.

Le premier vrai faux pas d’Apple?

Malgré tout, en ce qui concerne la génération iPhone6, on peut sans doute parler d’accident de parcours, surtout si la situation redevient normale point de vue production en quelques mois. Mais… il s’agirait sans doute d’un premier faux pas commercial d’Apple, sur ce qui constitue son fer de lance industriel.

Au-delà de ça, le cas Apple est peut-être symptomatique d’une problématique plus large qui concerne l’ensemble de la high-tech mondiale: la difficulté de valoriser aux mieux les entreprises.

Une valorisation trompeuse?

En effet, les différents modèles d’analyse donnent des résultats vraiment divergents. Même si le cours d’Apple est source d’inquiétude à court ou moyen terme, il reste sur une progression fulgurante sur 5 ans, avec une valeur plus que doublée, et 950% de gains sur 10 ans! Sans compter des résultats toujours spectaculaires.

Mais la simple valorisation boursière n’est pas la seule méthode, ni la plus complète, pour analyser les performances et les perspectives pures. Car elle prend en compte le rendement de l’investissement, les dividendes… et aussi la richesse fondamentale du groupe : son trésor de cash.

Des performances réelles plus contrastées

Certes, Apple est assis sur une cagnotte de trésorerie de plus de 200 milliards de dollars. C’est en grande partie la raison pour laquelle le groupe est la plus grosse société cotée au monde. Cela lui donne une marge de manœuvre inégalable, avec 85 milliards de dollars de trésorerie immédiatement disponible, le "Free Cash Flow", par an.

Mais si on se fonde sur la mesure la plus basique des performances boursières, le rapport cours/bénéfices, qui exclut de fait le cash de l’équation, on se retrouve avec des performances bien moins reluisantes, à 11,43 en 2014, contre un peu plus de 15 pour la moyenne des entreprises cotées au S&P500. 

Apple largement détrôné selon les méthodes

Pire: si on se fonde sur cette méthode d’analyse, Apple est très loin de signer la meilleure performance des technos américaines. Google et Microsoft sont au-delà des 30, Facebook propose un rapport cours/bénéfice d’un peu plus de 100… Et pour Amazon, on est même à 912 ! Un record, d’autant plus pour une entreprise qui n’a jamais fait de bénéfice que par accident, à de rares occasions trimestrielles.

Valoriser au mieux Apple: un nouveau challenge?

Le fait qu’Apple soit loin derrière, et que les autres proposent des rapports aussi prodigieux, prouve bien qu’on a le plus grand mal désormais à trouver des méthodes d’évaluations fiables. Mais encore une fois, Apple inquiète plus, de par son caractère et son poids macro-économique, son écosystème.

Car avec sa baisse de 2,5% hier à Wall Street, après parution des chiffres du journal Nikkei, le titre à lui tout seul a très nettement limité un rebond des indices dont ils auraient eu bien besoin. L’histoire d’amour/désamour entre Apple et la Bourse se poursuit…

Antoine Larigaudrie