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Brexit: le vendredi le plus noir de l’histoire boursière mondiale

Les marchés financiers auront connu vendredi dernier la séance la plus catastrophique de leur histoire, du point de vue de la capitalisation perdue.

Les marchés financiers auront connu vendredi dernier la séance la plus catastrophique de leur histoire, du point de vue de la capitalisation perdue. - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

Ce vendredi 24 juin 2016 restera à tout jamais dans les annales boursières. Selon les données de Standard and Poor’s, 2.000 milliards de dollars de capitalisations boursières sont partis en fumée sur cette seule journée.

Un record absolu. L’annonce de la victoire du "Brexit" au référendum britannique de la fin de semaine dernière a provoqué un tel séisme sur les marchés que les chiffres enregistrés battent tous les records établis.

Avec 2.000 milliards de dollars de valorisation partis en fumée, la tempête a dépassé en ampleur le jour de l’annonce de la faillite de Lehman Brothers le 15 septembre 2008.

Pire que 2008 et 1987

Par la suite, même au pire de la crise bancaire qui s’en est suivi, jamais la destruction de valeur boursière n’est allée aussi loin. Deux semaines après la faillite de Lehman, le gouvernement américain retoque un plan de sauvetage de son secteur bancaire. Bilan: un krach violent qui raye de la carte 1,9 milliard de dollars.

La tornade de vendredi dernier va même encore plus loin que l’extraordinaire chute des marchés du lundi noir de 1987, où le Dow Jones a perdu 22,6% en une seule journée.

Pas de paralysie du système financier

On est donc face à un véritable krach boursier. Pour autant, le "Brexit" constitue-t-il une véritable menace d’une telle ampleur que l’ensemble du système financier est en jeu?

Sans doute pas, de prime abord. Contrairement aux autres krachs enregistrés tout au long de l’histoire, la plupart concernent des phases où c’est le fonctionnement même du monde financier qui se retrouve perturbé, voire paralysé, ou en proie à une crise de confiance généralisée.

L’automobile elle aussi dans le viseur

Là, ce n’est pas le cas. Si la sortie du Royaume-Uni est un événement extraordinaire d’importance mondiale, il ne menace pas de manière immédiate le fonctionnement du marché. En revanche, cela provoque une nette poussée de volatilité, et notamment une forte baisse de la livre sterling.

Cette instabilité chronique va toucher bien sûr en premier lieu les valeurs bancaires, mais également d’autres compartiments de la cote, plus cycliques, et directement identifiés comme victimes potentielles d’un Brexit. Ainsi, vendredi, le secteur automobile français a enregistré lui aussi des baisses à deux chiffres, entre 13 et 19%.

Danger structurel, pas systémique

Le secteur automobile est-il pourtant directement menacé, industriellement, par cette crise? Sans doute pas au point de faire plonger les capitalisations à ce niveau-là. Mais ces valeurs, devenues très volatiles et correlées à la tendance, souffrent particulièrement lors de ces brutaux changements de direction.

Les très fortes variations de cours sont avant tout liées à l’incertitude ambiante, qui pourrait ressembler sur certains points à la période de crainte de sortie de la Grèce de la zone euro. Les marchés n’affrontent pas un danger systémique mais plutôt structurel, aux conséquences imprévisibles.

Ajustements violents

Du coup c’est la technique qui explique pour beaucoup le phénomène. Encore une fois, les marchés avaient précédemment connu une hausse spectaculaire la semaine précédente. En 7 jours, le CAC40 avait gagné 7,5%, le tout sur de très faibles volumes.

Cela voulait dire que les très gros investisseurs restaient sur la touche. Mais alors qu’on pensait qu’ils s’étaient couverts en adoptant des positions vendeuses au cas où, la violence de la réaction prouve bien qu’au contraire, ils avaient eux aussi spéculé sur un "oui" britannique, espérant un prolongement et une accélération de la hausse.

Marchés toujours liquides

Le résultat est une inversion de balancier très violente, avec des boursiers obligés de se réaligner à la baisse en catastrophe. D’où une très forte hausse des volumes. À 11,5 milliards d’euros d’actions échangées, les volumes de vendredi étaient 4 ou 5 fois plus élevés que la semaine précédente.

D’où des marchés beaucoup plus volatils et avec des réactions imprévisibles. Mais, facteur encourageant, cette correction se fait pour le moment sans sentiment de panique, avec discernement, et avec suffisamment de liquidités pour faire fonctionner le marché normalement. En attendant que la tempête s’apaise.

Antoine Larigaudrie