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Comment certains fonds ne perdent (presque) jamais grâce aux algorithmes

Malgré l'omniprésence des ordinateurs et du trading automatisé sur les marchés, l'humain reste indispensable et garde encore une longueur d'avance. Mais jusqu'à quand ?

Malgré l'omniprésence des ordinateurs et du trading automatisé sur les marchés, l'humain reste indispensable et garde encore une longueur d'avance. Mais jusqu'à quand ? - Jonathan Naxtrand - AFP

Jouer en bourse sans jamais perdre. Le rêve absolu pour beaucoup de petits porteurs, mais une réalité au quotidien pour certains grands intervenants. Leur secret et leur technique, le trading à base d’algorithmes, totalement automatisé.

1 seul jour de pertes en 6 années d’existence !! Le bilan de la firme de trading Virtu est même devenu sa marque de fabrique: "Le fond qui ne perd jamais". Et c’est pour le coup entièrement exact, puisqu'il s'agit aujourd'hui du fonds le plus performant du genre, dans ce secteur où l’on juge le résultat entre autres par rapport au nombre de jours de gains par rapport au nombre de jours d’opérations sur le marché.

Car sur le papier, difficile de faire mieux qu’un fond animé uniquement par des ordinateurs, qui lancent leurs ordres en haute fréquence, donc avec une rapidité imbattable, et en achetant et vendant des actifs sur le marché, uniquement avec comme considération des théories mathématiques, de la géométrie, des compilations de différents modèles et des calculs d’analyse technique.

Arme absolue ?

Aucun intervenant "humain", hormis ceux qui vérifie le bon fonctionnement de la machine, les ingénieurs qui conçoivent les formules et les administrateurs. Le reste, c’est la machine qui joue sa partition à partir des données qu’elle reçoit et de l’environnement de marché à un instant T.

Donc a priori, quand on peut faire plus vite et en plus grande quantité qu’un humain, on peut en déduire que les fonds qui n’opèrent qu’en mode automatique sont forcément les meilleurs. Les formules mathématiques et le trading algorithmique constituent-ils une martingale, une arme absolue? En réalité c’est loin d’être le cas.

L’humain a encore une (petite) longueur d’avance !

Déjà il faut décortiquer la nature de ces performances. Car 1 seul jour de pertes en 6 ans est une belle formule marketing, certes, mais il faut voir ce que le fonds a réussi à gagner chaque jour sur la période en question. Certains sont arrivés à une moyenne supérieure en signant de meilleures performances sur une période donnée.

Et si on regarde les encours globaux, les fonds les plus performants du monde ne sont pas forcément des fonds 100% informatisés. Sur 2014, le haut de tableau des performances est occupé par des fonds bien plus traditionnels et animés par des "humains" comme Vanguard, Goldman Sachs, Invesco ou JPMorgan.

Faire "comme le Marché" ?

Pourquoi les machines ne font pas toujours mieux que l'homme? D'abord parce que, dans des configurations de marché volatils comme cela a été le cas ces dernières année, du fait de retournements de tendance imprévisibles (dégringolade du pétrole, baisse brutale des taux de dette souveraine), les "robots" ont un peu tendance à se replier sur un des fondements de base des marchés financiers : pour ne pas perdre d’argent, il faut faire exactement ce que fait le marché.

C’est pourquoi peu ou prou le fonds Virtu sur certaines séances, fait comme le marché, il en épouse la tendance. Hors le but d’une de ces institutions et non seulement de "surperformer", de faire mieux que l’ensemble du marché, mais le plus possible. La prime revenant à celui qui aura réussi l’écart de performance le plus élevé.

La machine qui ne savait pas (encore) mentir !

Et à ce petit jeu, l’humain est pour l’instant toujours vainqueur. Plus subtil, plus expérimenté, doté d’un "flair", de la capacité de concevoir des stratégies complexes, d’improviser et de créer. A la grande différence du robot de trading qui ne fera qu’appliquer des théories et des stratégies en fonctions de modèles et de probabilités.

Par exemple, beaucoup de traders "humains" savent contrer les manœuvres du trading automatisé, assez visibles, en tendant des pièges, et en se livrant à un certain nombre d’opérations de bourse sensées attirer les ordres de bourse des fonds algorithmiques, pour ensuite les contrer !! Les ordinateurs de trading ne savent pas encore bluffer ni mentir. Et du coup l’humain va régner encore en maître pendant un petit moment sur les marchés financiers.

Avance de courte durée

Cet avantage semble néanmoins provisoire. Déjà ces salles de marché sont désormais désertes et davantage remplie de serveurs électroniques que d’humains qui crient en faisant de grands signes. Des grandes places boursières, comme la Bourse de Chicago, la bourse américaine des options, est désormais quasi-vide, alors que ces produits financiers sont à l’avant-garde de la tendance boursière. Point de vue volume le trading par ordinateur constitue les deux tiers voir les trois quart d’une séance de bourse ordinaire aux Etats Unis.

L’ordinateur a chassé des salles de marché les petites mains de l’industrie financière, mais pas encore ses cerveaux. Mais cela n’aura qu’un temps, les premières "machines à penser le marché" sont déjà en place. Et ce seront de leur performances que dépendra l’avenir de l’humain en général sur les marchés financiers!

Antoine Larigaudrie