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L’administration Obama aura bloqué pour 370 milliards de fusions

Outre Pfizer-Allergan, le durcissement des règles durant ces 7 dernières années aura été à l'origine de très nombreux abandons de projets de fusion aux Etats-Unis, dans plusieurs secteurs-clé.

Outre Pfizer-Allergan, le durcissement des règles durant ces 7 dernières années aura été à l'origine de très nombreux abandons de projets de fusion aux Etats-Unis, dans plusieurs secteurs-clé. - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

"Les spécialistes des fusions-acquisitions ne remercieront pas l’administration Obama. Depuis 2009, le durcissement des règles financières a provoqué l’annulation de 370 milliards de dollars d’opérations de rachat."

Deux mandats de président… Et des centaines de deals bloqués! Barack Obama aura singulièrement marqué l’histoire financière américaine, selon les statistiques compilées par le Financial Times.

Lors de ses deux mandats, l’administration américaine aura annulé ou provoqué l’annulation de l’équivalent de 390 milliards de dollars d’opération, soit plus que les mandats Clinton et Bush junior réunis.

Haro sur la "Tax Inversion" 

Le cas le plus emblématique aura sans doute été l’opération Pfizer-Allergan, abandonnée cette semaine. Elle devait être l’une des 5 plus grosses fusions-acquisitions de tous les temps, au vu de son montant astronomique, 160 milliards de dollars.

Mais la perspective d’un durcissement des règles en matière de "Tax Inversion", les fusions à visée d’optimisation fiscale, a découragé deux acteurs majeurs qui avaient pourtant une solide stratégie industrielle.

Précédent britannique

Pfizer n’en était pas à son premier échec, puisqu’il y a 2 ans, le groupe avait planifié le rachat du britannique AstraZeneca. Opération qui a échoué, cette fois parce que la classe politique britannique s’était mobilisée.

Elle refusait qu’un groupe du pays serve de niche fiscale à un géant américain, puisque le taux d’imposition en Grande-Bretagne était à l’époque de 20% contre 33 aux États-Unis. Depuis il a encore été abaissé à 16%.

Règles antitrust plus sévères

C'est d'ailleurs la même année que le projet de fusion AbbVie – Shire Pharma s'était soldé par un échec. Ce dernier étant domicilié en Irlande, les autorités américaines ont tout de suite soupçonné Abbvie de poursuivre le même objectif: faire passer d’un coup sa fiscalité de 33 à 13%.

L’opération à 55 milliards de dollars a été stoppée. Mais la lutte contre la "Tax Inversion" n’aura pas été le seul sujet des interventions hostiles des autorités américaines. Ces 7 dernières années auront aussi été le théâtre d’un durcissement des règles de concurrence.

Crainte d’un cartel des télécoms

Et cette fois, on ne parle pas d’entreprises découragées par d’éventuels changements réglementaires, mais bien de décisions de justice ou des autorités compétentes. En 2011, l’antitrust américain retoque le projet de fusion à 39 milliards de dollars entre AT&T et T-Mobile, ex-filiale de Deutsche Telekom.

Les responsables américains s’inquiètent à l’époque d’une situation de cartel de fait sur le marché des opérateurs, au vu des parts de marché considérables des deux acteurs.

Câble et Internet

Pareil pour Comcast-Time Warner, opération de fusion à 71 milliards de dollars, dans le domaine du câble, mais aussi avec un aspect particulier: la protection de la "Neutralité du Net".

Opération avortée qui a eu le mérite de laisser le champ libre à Numericable, qui par le biais de deux acquisitions ciblées en quelques mois, est devenu le principal challenger de Comcast sur le marché américain.

Enjeu électoral

Enfin, même dans le monde de la Bourse, l’antitrust américain s’est opposé à un projet de fusion Nasdaq-NYSE en 2011, qui aurait créé un monstre new-yorkais de la Bourse! En revanche la même autorité n’a rien eu à redire à la reprise du NYSE par Intercontinental Exchange deux ans plus tard.

Autant en matière de fiscalité que de concurrence, les années Obama auront donc été des années de plus grande fermeté à l’égard des méga-opérations financières.

Une fermeté que Barack Obama aimerait mettre au crédit du camp Clinton, de manière à ce que ce point de son bilan pèse positivement sur l’issue des primaires démocrates, et du scrutin présidentiel de novembre.

Antoine Larigaudrie