BFM Patrimoine
Placements

L’Arabie Saoudite lance sa première émission obligataire internationale

L'Arabie Saoudite va, pour la première fois, s'endetter en dollars sur les marchés internationaux. Un point crucial du plan de diversification économique lancé par le Royaume.

L'Arabie Saoudite va, pour la première fois, s'endetter en dollars sur les marchés internationaux. Un point crucial du plan de diversification économique lancé par le Royaume. - AFP

"Première historique pour le royaume, qui va désormais se refinancer en dollars sur les marchés mondiaux. Une opération symbolique forte, dans le cadre de la stratégie de diversification économique du pays, et la préparation de l’ère de "l’après-pétrole"."

Qui aurait pensé que le royaume doté des plus grandes réserves pétrolières du monde, ait un jour besoin de se refinancer sur les marchés internationaux, qui plus est par de la dette?

C’est pourtant le processus que vient de lancer l’Arabie Saoudite, qui va vendre des obligations libellées en dollars sur le marché dès le mois prochain. Des obligations de long terme, en plusieurs tranches et échéances, dont une de 30 ans, avec un prix d’émission et un rendement donnés, qui évolueront suivant les conditions de marché, comme l’obligation de n’importe quel état souverain.

Les grandes banques aux avant-postes

Un procédé fort inhabituel en plus pour le royaume, également gardien des Lieux Saints de l’Islam. En effet, la plupart des pays de tradition musulmane se servent, pour se refinancer, de produits de finance islamique, et notamment les Sukuks. Ce sont des produits conformes à la Charî’a, sans intérêts, puisque la Loi Islamique l’assimile à de l’usure, ce qui est formellement proscrit.

Mais le royaume a mandaté un grand pool bancaire qui va se charger de l’opération et s’occuper de sa conformité: JPMorgan, HSBC et Bank of Tokyo Mitsubishi en seront les chefs de file, et plusieurs autres banques seront désignées par la suite. BNPParibas et Goldman Sachs sont pressentis également pour les épauler.

Crise budgétaire… et bancaire

L’Arabie Saoudite a tiré les enseignements de l’importante crise qu’elle a dû affronter notamment à la fin de l’année dernière, avec l’effondrement des cours du pétrole, et par là-même de ses revenus énergétiques.

S’en est suivie une crise budgétaire qui a eu un impact lourd sur la croissance, réduite à 1%. Mais plus grave, le système bancaire du pays a dû affronter une crise éclair, avec un assèchement rapide de ses liquidités, face à des investisseurs méfiants et prompts à retirer leurs capitaux.

Mieux faire circuler l’argent

Le royaume a donc mis en place une grande réforme économique de long terme, de nature à diversifier le plus possible son économie, et pour devenir moins dépendant du pétrole, même s’il est appelé à rester malgré tout un point central sur le long terme. Et parmi les mesures décidées, protéger le système bancaire contre une éventuelle panne générale.

C’est là que cette émission obligataire classique prend tout son sens. Elle va lier le système financier du pays au reste du monde, via des obligations classiques, et l’argent pourra ainsi mieux circuler, même en cas de coup dur.

Test important

Le montant de 15 milliards de dollars peut paraître symbolique à l’échelle d’un état souverain aussi puissant que l’Arabie Saoudite. Le géant américain de l’informatique, Dell, a levé 16 milliards de dollars il y a quelques mois, et Apple 12 milliards lors de sa dernière opération du genre.

Mais précisément, cette opération va avoir valeur de test pour évaluer l’appétit des investisseurs. Si les résultats sont concluants, l’Arabie Saoudite prévoit déjà de lancer une deuxième opération du même genre avant la fin de l’année, et une autre l’année prochaine.

Le précédent Qatari

L’Arabie Saoudite n’est d’ailleurs pas la seule à vouloir être présente sur ce marché de la dette, puisque le Qatar a annoncé la semaine dernière une opération du même genre pour lever 9 milliards de dollars.

La demande avait été particulièrement forte, à 20 milliards de dollars, laissant les analystes penser que l’opération saoudienne devrait recevoir également un accueil très positif.

Antoine Larigaudrie