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L'incertain avenir de Deutsche Bank

La Deutsche Bank commence à concentrer des inquiétudes fortes de la part des marchés, qui la voient contrainte à l'augmentation de capital, où... à un plan de sauvetage d'Etat.

La Deutsche Bank commence à concentrer des inquiétudes fortes de la part des marchés, qui la voient contrainte à l'augmentation de capital, où... à un plan de sauvetage d'Etat. - Daniel Roland - AFP

Les inquiétudes redoublent autour du géant allemand de la banque, alors que les investisseurs doutent de sa capacité à pouvoir continuer ses opérations sans faire appel aux marchés ou à l’Etat allemand.

Les chiffres commencent à sérieusement inquiéter les marchés. Ce mardi 27 septembre, l'action de la première banque allemande a atteint son plus bas niveau historique. Deutsche Bank a perdu plus de la moitié de la capitalisation boursière envolée depuis le début de l’année. Une érosion boursière deux fois supérieure à celle de la moyenne du secteur bancaire européen. Le taux du CDS, du contrat de protection contre un éventuel défaut de paiement de la banque, est 100% au-dessus de sa moyenne à 10 ans, illustration d’un niveau de défiance inquiétant.

Les raisons de cette descente aux enfers sont connues: santé dégradée, environnement de taux bas ou négatifs, qui rend l’ensemble de l’activité bancaire très compliquée et peu rentable ces derniers mois, mauvaises performances en banque de marché… et surtout une énorme amende de plusieurs milliards de dollars en perspective dans le dossier des sub-primes américains.

La moitié du PIB allemand

Le tout est en train de fragiliser de manière inquiétante ce qui est sans doute un des maillons majeurs de la finance européenne et internationale. Deutsche Bank gère 1.800 milliards d’euros d’actifs, soit la moitié du PIB allemand. D’éventuels dégâts financiers et une persistance de cette crise de confiance pourraient toucher au cœur un des poumons financiers de la Zone Euro.

Ce qui inquiète la communauté financière en ce moment est en plus l’impasse dans laquelle semble s’isoler la banque. Face à une activité qui va devenir de plus en plus tendue, une liquidité menacée et une solidité financière qui pose question, l’hypothèse d’une augmentation de capital ou d’un appel de fonds est clairement posée.

Aide publique "inimaginable"

Deutsche Bank écarte complètement l’hypothèse pour le moment. Il est vrai qu’une opération de ce genre, massive au vu des besoins, provoquerait une chute supplémentaire de l’action et aggraverait la crise de confiance. Autre hypothèse clairement posée: que le gouvernement allemand intervienne directement pour venir en aide à la plus grosse banque du pays. Mais là encore, l’hypothèse est pour le coup totalement exclue. Un proche conseiller d’Angela Merkel estime même qu’une telle solution serait "inimaginable", compte tenu de l’indignation que cela susciterait dans l’opinion publique.

Deutsche Bank n’est pas Lehman Brothers

Le député CDU Hans Michelbach, proche d’Angela Merkel, estime lui "qu’il ne s’agit pas d’un cas de figure à la Lehman Brothers. Deutsche Bank a largement les moyens de s’en sortir toute seule". Mais l’idée de revoir une banque abandonnée à son sort, par une sphère politique qui aurait sous-estimé le problème, est un spectre que les marchés veulent éviter de revoir.

Pourtant la situation l’exige, selon beaucoup d’observateurs du secteur. Andreas Utermann, directeur de l’investissement chez Allianz Global Investors, estime que le gouvernement allemand devra tout de même venir en aide à sa banque, si sa santé financière continue de s’aggraver. "Deutsche Bank est bien trop importante pour l’économie allemande, et le cas échéant, Berlin devra la sauver quoi qu’il en coûte" estime-t-il.

Pression forte et durable

En l’absence de signaux clairs en faveur d’une recapitalisation et/ou une aide d’état, Deutsche Bank ne devra donc compter que sur elle-même, et tenter d’accélérer son plan de restructuration et de cessions d’activités. Et malgré la confiance affichée de la banque, on sent que la tache sera rude, complexe, et qu’elle se fera sous pression maximale des marchés pendant encore une longue période.

Antoine Larigaudrie