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Les entreprises américaines souffrent du dollar fort

Oracle, cas d'école du phénomène : chiffre d'affaires et bénéfices stagnent sur le trimestre écoulé pour cause de dollar trop fort.

Oracle, cas d'école du phénomène : chiffre d'affaires et bénéfices stagnent sur le trimestre écoulé pour cause de dollar trop fort. - Justin Sullivan - Getty Images North America - AFP

C’est la principale raison pour laquelle Wall Street patine depuis des semaines : l’Amérique craint de voir les bénéfices de ses entreprises attaqués par une devise trop forte. Voilà qui va singulièrement compliquer la tâche de la réserve fédérale américaine.

"Corporate America" est-elle en train de commencer à plier sous le poids d’une devise trop forte ? La question se pose et va même dominer les débats ces prochains mois, tant la force du dollar commence à poser problème aux entreprises du pays.

Le phénomène a commencé à se faire sentir dès la fin de l’année dernière, et la publication des résultats 2014 et des perspectives 2015 des entreprises américaines a été l’occasion d’un premier bilan. Selon les statistiques du cabinet FireApp, l’ensemble des entreprises nord-américaines ont subi au 4e trimestre 2014 un impact négatif global de 19 milliards de dollars sur leurs comptes.

Oracle : un cas d’école

Phénomène qui s’amplifie, qui prend de la vigueur notamment pour les entreprises qui publient leurs résultats en exercice décalé. C’est notamment le cas d’Oracle, à la fois baromètre des high-tech américaines, du monde du logiciel, et aussi très dépendant des perspectives d’investissements d’entreprises en matière de technologie.

Et le bilan n’est pas rose, le chiffre d’affaires est tout juste stable sur le trimestre écoulé à 9,3 milliards de dollars. Mais si on exclue les effets de change, on se retrouve avec une croissance de 9% ! Voilà traduits en chiffres l’impact du dollar fort sur les ventes du groupe.

Pression sur la FED

Du coup les bénéfices stagnent eux aussi autour des 2,5 milliards de dollars. Ce qui n’empêchera pas le groupe de verser un dividende plutôt généreux, en hausse de 25% à 15 cents, mais on sent bien que l’enjeu devient important, notamment pour Wall Street.

Ce qui va singulièrement compliquer la tâche de la FED dans les mois à venir. Désormais tout le monde parie sur un relèvement des taux directeurs pour cet été juin ou septembre. La Réserve Fédérale est contrainte de le faire au vu de l’amélioration spectaculaire de l’économie américaine, autant du point de vue des indicateurs d’activité que de ceux du marché de l’emploi.

Quand la puissance de l’Amérique devient source de vulnérabilité

Mais pour autant, elle sait que cette décision va avoir comme conséquence de faire monter les taux longs et d’accroître encore la force du dollar. Les grandes multinationales américaines, que ce soit dans le secteur des produits de grande consommation, la pharmacie, la high-tech… vont devoir amortir l’impact de leur propre devise.

Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, c’est un phénomène qui touche l’ensemble des monnaies mondiales, pas que l’Euro-Dollar, qui reste sous fort pression, et en route vers la parité voire plus : Goldman Sachs prévoit désormais 0,95% à horizon 12 mois, 0,85 fin 2016 et 0,80 fin 2017 !

Comme quoi une Amérique qui redevient forte économiquement, dont la monnaie s’apprécie, peut devenir le talon d’Achille des entreprises qui la font vivre. Le dilemme de la FED reste donc entier.

Antoine Larigaudrie