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Les marchés sont-ils en train de s'habituer à la faiblesse du dollar?

Après des semaines de perplexité, les investisseurs semblent finalement intégrer les nouveaux équilibres autour du dollar. Les déclarations de Janet Yellen hier à New York en sont le catalyseur.

Après des semaines de perplexité, les investisseurs semblent finalement intégrer les nouveaux équilibres autour du dollar. Les déclarations de Janet Yellen hier à New York en sont le catalyseur. - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

"Les scénarios de parité euro-dollar sont oubliés. Le dollar ne veut plus monter, et Janet Yellen a confirmé la tendance mardi soir avec un discours très accommodant. Et les marchés en ont pris leur partie."

Finie la longue attente de ces dernières semaines… Les marchés européens, limités dans leur progression par un dollar qui refusait obstinément de baisser, semblent avoir intégré le changement de scénario. Et pourtant. Avec la perspective d’un relèvement des taux de la FED, tout le monde avait tablé sur un renforcement du dollar.

Goldman Sachs et Deutsche Bank par exemple avaient même parié sur un retour à la parité dans les premiers mois de cette année. Et tout le monde jouait ce scénario. Le fait que le dollar baisse depuis la fin de l’année dernière a pris tous les investisseurs à contre-pied. Occasionnant quelques déséquilibres, et notamment l’impossibilité pour les actions européennes de progresser plus avant.

Le meilleur des deux mondes?

Mais la séance du jour marque sans doute un changement de paradigme. Finalement les investisseurs semblent faire contre mauvaise fortune bon cœur. Avec l’idée, qu'au final, c'est le meilleur des deux mondes qui se profile.

Le rythme volontairement lent et progressif choisi par Janet Yellen pour la remontée des taux américains, confirmé mardi soir par son discours devant l’Economic Club de New York, apparaît comme un moindre mal face aux déséquilibres mondiaux. 

"Les développements à l’étranger signifient qu'il nous faudra, très certainement suivre une trajectoire un peu plus basse pour nos taux, que ce que nous avions anticipé en décembre" a-t-elle déclaré. Avant d’ajouter: "Etant donné les risques pesant sur les perspectives, je considère qu'il est approprié pour le comité de politique monétaire d'agir prudemment."

La mécanique s’inverse

Evidemment le dollar a commencé à baisser sur ces déclarations, et l’euro est rapidement remonté à 1,13, plus très loin du sommet annuel à 1,1377. Mais au lieu de brider une fois de plus les indices, ce discours les a soutenus d’un coup, au contraire.

Les investisseurs semblent d’une part digérer la tendance actuelle du dollar, confortée par les perspectives de la FED. Jusque-là l’institution prévoyait deux hausses de taux, la première en juin et la seconde pour la fin de l’année.

Mais si on regarde les dernières projections de marché, les probabilités de relèvement en juin sont passées en quelques jours de 50% à 37%! Preuve que l’ensemble de la planète financière semble tenir compte d’un processus qui s’annonce plus lent et plus prudent que prévu.

Une majorité ne prévoit plus qu’une hausse intervenant fin 2016. De plus, en attendant que les taux de changes se rééquilibrent durablement, le maintien du dollar sur ces niveaux, a le mérite de mettre un terme à deux grosses sources d’instabilité.

Les matières premières se reprennent

Ce dollar plus faible que prévu provoque des arbitrages positifs pour les matières premières. Les acheteurs de minerais ou de pétrole peuvent plus facilement stocker sur des cours plus avantageux du fait de la relative faiblesse de la monnaie de référence.

Ainsi, que ce soit les minerais ou le pétrole, on assiste à un rebond impressionnant depuis le début de l’année, qui devrait continuer à bénéficier de cet effet dollar.

De plus, le réajustement du dollar permet aussi aux monnaies des pays émergents de rebondir. Ces derniers bénéficient ainsi d’entrées de capitaux massives. Sur le mois de mars, ils ont engrangé 36,8 milliards de dollars. Du jamais vu depuis pas loin de deux ans.

Alors que les marchés s’inquiétaient de la faiblesse du dollar, voilà que Janet Yellen les a peut-être convaincus, sur le long terme, que la doctrine de FED est la bonne. Des équilibres subtils à trouver, mais qui occasionnent, encore ce mercredi 30 mars, des arbitrages finalement très positifs pour l’ensemble du monde financier.

Antoine Larigaudrie