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Pétrole bon marché: S&P dégrade l’Arabie Saoudite

Après la dégradation du Royaume, le Roi Salman (Ici avec l'Emir Sabah du Koweït, à gauche) ne va avoir comme autre choix que de reformer économiquement et fiscalement l'Arabie Saoudite. Un défi commun à tous les pays de la région.

Après la dégradation du Royaume, le Roi Salman (Ici avec l'Emir Sabah du Koweït, à gauche) ne va avoir comme autre choix que de reformer économiquement et fiscalement l'Arabie Saoudite. Un défi commun à tous les pays de la région. - Fayez Nureldine - AFP

Illustration des problèmes budgétaires des pays du Golfe, aux prises avec des prix du pétrole en baisse: l’Arabie Saoudite voit sa note de crédit abaissée par l’agence Standard and Poor’s. Une épée de Damoclès sur l’ensemble des économies de la région.

La décision était attendue, mais elle matérialise bien un problème qui est devenu structurel et macro-économique pour une région du monde où le pétrole régit tout. La note de crédit long terme de l’Arabie Saoudite est abaissée d’un cran chez Standard and Poor’s. Et placée sous surveillance négative, un nouvel abaissement n’étant donc pas exclu.

Sans surprise, et on le redoutait, la forte baisse des cours du pétrole, passés de 100 à 40 ou 50 dollars, et leur maintien sur ces niveaux depuis quelques mois, ont désormais des effets spectaculaires sur les budgets des pays dépendants de la rente pétrolière. D'autant que la restructuration de l'appareil de production pétrolière est loin d'être achevée.

Nécessaire réduction du train de vie

Pour l’Arabie Saoudite, note Standard & Poor’s, ça passe par un accroissement du déficit budgétaire de 1% seulement en 2014 à 16% cette année! Une hausse considérable, mais tout à fait logique au regard de ce qu’a perdu mathématiquement le pétrole.

Facteur aggravant, S&P note que la structure des dépenses courantes saoudiennes n’est pas de nature flexible. Hormis des coupes claires et drastiques, pas d’autre levier économique pour agir. L’Arabie Saoudite, pour améliorer son profil de crédit, ne va avoir comme autre solution que de poursuivre la réduction de son train de vie…

Une révolution économique en marche ?

Une nouvelle réalité pour un pays qui a peu l’habitude de ce genre de mesures, mais qui va sans doute devoir s’y mettre, tant la perspective d’un pétrole bon marché sur le moyen terme est désormais dans toutes les têtes et intègre tous les modèles de prévisions économiques.

Un constat partagé et étayé par le FMI qui estime que même si la plupart des pays gardent la main en matière d'ajustement de l'offre pétrolière via les prix, c’est toute une région qui va devoir opter pour une vraie révolution économique.

Plus de 1000 milliards de dollars de déficit cumulé

Dans sa dernière note de prévisions pour les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG : Arabie Saoudite, Qatar, Koweït, Emirats Arabes Unis et Bahreïn), le Fonds Monétaire International estime que ces pays ont l’obligation de diversifier leurs sources de revenus et réduire le poids de leur secteur public, s’ils veulent s’adapter à la phase actuelle des prix de l’énergie.

Selon les estimations du FMI, le déficit de l’ensemble des pays du CCG va atteindre 13% de leurs PIB en moyenne, et franchir au total la barre des 1000 milliards de dollars! Le tout sur fond de croissance qui ralentit, logiquement, passant de 3,5% l’année dernière à 3,25% cette année, et à priori 2,75% l’année prochaine.

En finir avec le pétrole subventionné

Une réduction générale des dépenses et une réforme de la fiscalité sera sans doute nécessaire pour assainir structurellement l’économie des pays du Golfe. Le FMI estime en premier lieu qu’une baisse massive des subventions au pétrole sera un premier pas important.

Le Koweït par exemple a été l'un des premiers pays à réagir en réduisant drastiquement ses aides d’état au carburant d’aviation et au diesel cette année. Les Emirats Arabes Unis, eux, ont même récemment décidé de supprimer la majorité de leurs subventions sur l’ensemble des carburants dans le pays.

Réforme fiscale et TVA ?

Mais si les pays du Golfe veulent éviter la panne de croissance et une possible récession, il leur faudra pour cela aller beaucoup plus loin.

Le FMI parle en particulier de la nécessité d’une réduction massive des dépenses d’état, de la structure de la fonction publique, et d’une réforme fiscale d’ampleur, avec pourquoi pas l’instauration d’une TVA, ce qui constituerait effectivement une révolution pour ces pays.

Antoine Larigaudrie