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Plusieurs actionnaires de Safran veulent bloquer le rachat de Zodiac

De gauche à droite: Philippe Petitcolin et Ross McInnes, directeur général et président de Safran aux côtés de Didier Domange, président du conseil de surveillance de Zodiac et Olivier Zarrouati, le président du directoire, le 19 janvier lors de l'annonce du rapprochement des deux groupes.

De gauche à droite: Philippe Petitcolin et Ross McInnes, directeur général et président de Safran aux côtés de Didier Domange, président du conseil de surveillance de Zodiac et Olivier Zarrouati, le président du directoire, le 19 janvier lors de l'annonce du rapprochement des deux groupes. - ERIC PIERMONT / AFP

Le fonds d’investissement TCI s’oppose à l’opération. Il a déjà derrière lui au moins 10% du capital de l’équipementier aéronautique.

Le mariage entre Safran et Zodiac connaît déjà des remous. Annoncée en grande pompe il y a trois semaines, l’opération rencontre l’opposition farouche de plusieurs actionnaires. En première ligne, le fonds d’investissement TCI (The Children’s investment) qui détient 4,1% du capital de Safran, vient de lancer une missive contre l’OPA de 10 milliards d’euros sur Zodiac. Mardi, il a envoyé deux lettres au président de Safran, Ross McInnes, et au président de l’Autorité des marchés financiers (AMF), Gérard Rameix.

TCI affirme qu’il "ne soutient pas cette opération" et accuse la direction de Safran de "rançonner la société et ses actionnaires". Pour le fonds, l'opération coûte trop cher. L’offre valorise Zodiac à 29,5 euros par action quand celle-ci était à 20 euros avant son annonce. Une prime généreuse de 50% pour une entreprise qui a procédé à neuf avertissements sur ses résultats en deux ans. Lors de l’annonce du rachat, Safran rappelait que l’action Zodiac valait encore 35 euros il y a deux ans, justifiant la cohérence de son offre.

Le fonds activiste souhaite avant tout que l’assemblée générale de juin prochain statue sur l’OPA et la fusion qui s’en suivra. Pour le moment, Safran ne soumettra à ses actionnaires que la fusion avec Zodiac après la prise de contrôle de la société. TCI votera contre la fusion, sachant qu’elle est indispensable à Safran pour tirer toutes les synergies du rachat de Zodiac. Et menace même de la bloquer. Pour cela, le fonds doit obtenir des soutiens et peser un tiers des droits de vote lors de l’assemblée générale de juin. Un pari pas impossible lorsque l’on voit ses soutiens qui s’accumulent en quelques jours.

Bientôt 15% des actionnaires avec eux

"Nous recevons beaucoup d’appels d’autres grands fonds actionnaires qui nous soutiennent, explique Jonathan Amouyal, associé de TCI. En deux jours, nous avons déjà environ 10% du capital avec nous". Plusieurs fonds spéculatifs comme Egerton Capital, qui détient 1,2%, State Point, Lone Pine, Masson Capital. Mais surtout, deux grands actionnaires prennent part à la fronde. The Capital Group, qui détient 4,89% de Safran, soutient l’initiative de TCI. Et le géant américain BlackRock, actionnaire à 4,85%, est "très intéressé par notre démarche" explique-t-on chez TCI. Les frondeurs représenteraient alors 15% du capital, un poids important qui peut prendre encore plus d’ampleur d’ici l’assemblée générale.

Mais il y a peu de chances que la guerre aille jusque-là. Car évidemment, le fonds activiste réclame de l’argent en échange de l’abandon du rachat de Zodiac. Un rachat d’actions de 3 milliards d’euros qui ferait progresser l’action Safran de 66 euros à 100 euros, selon TCI. Il veut surtout récupérer les 2 milliards de cash de la vente de la filiale de sécurité biométrique Morpho à Oberthur en septembre dernier. Une cession qu’ils avaient d’ailleurs déjà réclamée à Safran en… 2012. Contacté, le groupe n’a pas souhaité commenter. "Mais on se doutait bien qu’ils réclameraient de l’argent, soupire une source proche de Safran. Ils n’ont jamais voulu du rachat de Zodiac". Safran a déjà promis de verser 2,3 milliards d’euros de dividendes après l’approbation de la fusion. Pour se laisser convaincre de voter pour, nul doute que TCI réclamera davantage.

Matthieu Pechberty