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Marché : Pourquoi le dérapage budgétaire ne fait pas flamber les taux français pour l'instant

jeudi 13 décembre 2018 à 12h04
Ministère des Finances à Bercy

(BFM Bourse) - Malgré l'alourdissement du déficit public attendu pour 2019, les taux des obligations françaises ont à peine bougé. Décryptage.

Hausse de la prime d'activité, heures supplémentaires défiscalisées, fin de l'augmentation de la CSG pour certains retraités… Afin d'apaiser les tensions en plein mouvement des gilets jaunes, l'exécutif a annoncé lundi pour près de 10 milliards d'euros de dépenses supplémentaires. Montant auquel il faut ajouter les quelque 4 milliards d'euros liés à la suppression des taxes sur les carburants déjà consentie.

De quoi rendre largement caduc l'objectif de déficit public de la France pour 2019, qui en l'état passerait à 3,4% selon les dernières estimations de Bercy. Le dérapage est important par rapport aux 2,8% prévus initialement. Pourtant, cette nouvelle donne n'a que peu perturbé les marchés obligataires, avec des taux d'intérêt pour le pays qui ont à peine bougé.

De fait, le rendement de l'OAT française à dix ans revient à 0,71% vers 12h00 ce jeudi (après un pic à 0,75% mardi). Malgré un léger renchérissement, comparé au niveau de 0,704% qui prévalait juste avant les annonces d'Emmanuel Macron, le coût de la dette française est encore très loin du seuil de 1% atteint en février dernier, lorsque les craintes liées à l'inflation et à un durcissement de la politique des banques centrales avaient refait surface. En outre, l'écart de taux avec l'Allemagne reste assez faible, alors que le Bund se négocie actuellement à 0,278%. Soit un "spread" de 0,432 point (43,2 points de base).

Moscovici rassurant

Comment expliquer ce paradoxe ? S'il pouvait y avoir initialement des craintes sur l'ouverture d'une nouvelle procédure de déficit excessif à l'encontre de la France en cas de dépassent du seuil de 3%, la tension est vite retombée. Les propos du commissaire européen aux Affaires économiques et financières Pierre Moscovici ont été rassurants. "Si on se réfère aux règles: dépasser cette limite peut être envisageable de manière limitée, temporaire, exceptionnelle. Mais chaque mot compte : le dépassement éventuel des 3% ne doit pas se prolonger sur deux années consécutives, ni excéder 3,5% sur un an", précisait-il mardi dans Le Parisien. "Cette déclaration était attendue par les marchés", explique Christophe Barraud, chef économiste et stratégiste chez Market Securities.

Ce jeudi matin, Pierre Moscovici a toutefois invité le gouvernement français à ne pas trop laisser filer le déficit. "Je pense que ce qui est souhaitable, en vérité, est que ce dépassement soit le plus limité possible", a affirmé le commissaire européen à l'occasion d'une audition au Sénat. "Je crois savoir que le gouvernement français travaille sur un paquet d'atténuation (de l'impact financier de ces mesures), dont je ne connais pas le détail (...) à la fois avec de la maîtrise de la dépense qui doit être poursuivie et peut-être par des efforts de recettes", a-t-il souligné.

Des Bourses mondiales chahutées

Est-ce un traitement de faveur par rapport à l'Italie ? L'Europe avait rejeté fin octobre le budget italien prévoyant un déficit à 2,4%, une prévision ramenée depuis à près de 2%. "La différence entre la France et l'Italie, c'est que les fondamentaux (dont la croissance) y sont plus solides et la dette publique moins lourde", analyse Christophe Barraud. La dette publique italienne représentait 131,8% du PIB en 2017, contre 97% du PIB pour la France, selon Eurostat. Par ailleurs, la Commission européenne prévoit une croissance pour 2019 de 1,1% en Italie et de 1,6% en France. "Il n'y a pas de réel choc qui inquiète sur la dette de long terme pour l'instant", estime Christophe Barraud.

En parallèle, si les marchés actions ont rebondi fortement mercredi, les Bourses mondiales sont plutôt chahutées depuis début octobre. Le CAC 40 par exemple est toujours en repli de plus de 7% depuis janvier. Le regain d'aversion au risque a profité aux obligations, ce qui a eu tendance à faire baisser les taux ou tout du moins à contenir leur hausse jusqu'à présent. Une aubaine pour l'exécutif mais qui pourrait ne pas durer éternellement. En particulier si la croissance ralentissait davantage que prévu, alors que la Banque centrale européenne opère un virage en matière de politique monétaire. La BCE doit en effet mettre fin très progressivement à ses achats de dette publique et privée (quantitative easing) à partir de janvier.

Jean-Louis Dell'Oro - ©2024 BFM Bourse
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