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Quand le fret maritime subit sa plus forte baisse depuis… 1986!

Activité faible dans les grands ports de commerce mondiaux, frilosité des acteurs économiques... la déprime du fret maritime illustre le climat de prudence actuel sur la conjoncture mondiale.

Activité faible dans les grands ports de commerce mondiaux, frilosité des acteurs économiques... la déprime du fret maritime illustre le climat de prudence actuel sur la conjoncture mondiale. - Christian Charisius - DPA - AFP

Chiffre spectaculaire et source d’inquiétude pour les investisseurs mondiaux, l’indice Baltic Dry, qui mesure les capacités de fret dans la marine marchande, retombe lourdement depuis début octobre. Un mouvement jamais observé depuis une trentaine d’années.

A 509 points, on est encore loin du plus bas historique du Baltic Dry Index. Mais pas tant que cela, vu que ce dernier a été signé en février de cette année! Mais la conjoncture reste problématique pour le fret maritime, témoin de la santé et du climat de confiance des entreprises au niveau mondial.

A -15% depuis 3 semaines, l'indice démontre que l’incertitude reste totale en matière de perspectives d’entreprises, de prise de risques et de confiance dans l’avenir. Et cela, les banques centrales n’y peuvent rien, aussi décidées qu’elles soient en matière de soutien à l’économie. 

La Chine en première ligne, encore une fois

Les raisons de cette forte dégradation du Baltic Dry sont multiples. Mais la première reste le ralentissement chinois, incarné par la forte dépression boursière de cet été, la Chine étant le principal usager, et de loin, de ces routes maritimes.

Les derniers chiffres du commerce extérieur chinois sur le seul mois de septembre en témoignent: avec une baisse d’1.1% des exportations, mais de 17.7% des importations, chiffre spectaculaire, on prend conscience concrètement de l’impact que cela peut avoir sur la demande mondiale en transport de containers de marchandises. D’autant que sur les 10 plus grands ports de commerce du monde, 8 sont chinois.

Chute des cours des matières premières

Une conséquence de tout cela, mais qui coïncide aussi avec un facteur aggravant pour le trafic maritime, c’est la forte baisse des cours des matières premières. Et principalement de celles les plus transportées par les navires : minerais divers, mais fer en particulier, métaux, et évidemment pétrole. De plus en plus, la baisse des cours joue sur les prix finaux des capacités des bateaux de transport.

A noter aussi une recrudescence des tensions géopolitiques au Proche-Moyen-Orient et en Asie, qui inquiètent les observateurs sur le trafic des grandes routes maritimes. On assiste là à une vraie hausse de la prime de risques, que beaucoup de donneurs d’ordres hésitent à prendre en compte, quitte à payer plus cher des solutions de transport alternatives.

Activité en berne dans les grands ports du monde

Enfin, certains facteurs particuliers pèsent, avec notamment la récession technique que va connaître Singapour. Facteur très ponctuel, mais très handicapant pour la Cité-Etat. Puisqu’en dehors d’être l'une des places financières et industrielles dominantes du continent asiatique, c’est aussi le 2ème port de commerce du monde.

Phénomène qui touche aussi les ports des grandes économies émergentes et dépendantes des matières premières, que ce soit l’Australie, l’Afrique du Sud ou le Brésil, pris dans l’engrenage de la baisse des matières premières, de la panne de croissance et de la crise de confiance.

Impact des accords Trans-Pacifique

Et l’ensemble des économies du sud est touché, avec en toile de fond également les accords américano-asiatiques Trans-Pacifique, qui vont chambouler totalement l’ensemble des échanges commerciaux sur la zone, et dont les conséquences à long terme sur les équilibres de marché sont incalculables pour le moment.

Cette chute du Baltic Dry Index est peut-être l’illustration la plus parfaite de la conjoncture économique et géopolitique actuelle : malgré tous les efforts et les capitaux mobilisés à travers le monde pour soutenir l’économie, on est face à une conjoncture dominée par l’incertitude et la frilosité la plus vive de la part des acteurs de l’économie réelle.

Et ce n’est hélas pas l’action concertée des banques centrales pour faire revenir la croissance qui risque de remplir à elle seule les carnets de commandes. Et sans ces vrais signes tangibles de reprise, les échanges commerciaux, le trafic maritime et donc le Baltic Dry Index ont toutes les chances de revoir prochainement leurs plus bas historiques.

Antoine Larigaudrie