BFM Patrimoine
Placements

Ces actionnaires de JP Morgan qui trouvent le boss trop gourmand 

Moins de soutien de la part des actionnaires, emergence d'une volonté de changement chez JP Morgan... Le PDG Jamie Dimon connaît une fin de mandat plus difficile que prévue.

Moins de soutien de la part des actionnaires, emergence d'une volonté de changement chez JP Morgan... Le PDG Jamie Dimon connaît une fin de mandat plus difficile que prévue. - Nicholas Kamm - AFP

A l'occasion de la dernière AG de la plus grande banque d’affaires américaine, les actionnaires ont infligé un camouflet à Jamie Dimon. Seuls 61% d'entre eux ont jugé légitime la rémunération de 20 millions d'euros qu'il s'est octroyé.

C’était la dernière, mais pas la meilleure pour Jamie Dimon. L’emblématique patron de JP Morgan, qui part dans quelques mois à la retraite, a du se faire à l’idée que les actionnaires ne soutenaient plus avec autant de conviction ses exigences en matière de rémunération, ni le système de direction d’une banque qui continue à faire la pluie et le beau temps sur les marchés.

Ils n’auront été "que" 61% à approuver l’ensemble des rémunérations des managers de la banque, dont la sienne (un package de 20 millions de dollars cette année), en réaction notamment aux mauvaises performances enregistrées par la banque sur les marchés.

Changement d’ère en vue

Mais plus encore, ils sont désormais quasiment 40% à demander un changement de type de gouvernance, et abandonner ce qui a pourtant constitué la marque de fabrique de l’ère Dimon, à savoir une concentration des pouvoir sur une seule et même personne: la sienne ! Désormais, ces 40% demandent qu’un président non-exécutif soit nommé pour mieux équilibrer les pouvoirs.

Le pouvoir absolu de Jamie Dimon a beaucoup été jalousé depuis qu’il a pris la tête de la banque en 2004, après sa fusion avec Bank One dont il était le PDG. Banquier moderne et pragmatique, parfois vu comme très arrogant, il a beaucoup été critiqué dans un premier temps car il sortait du cadre des patrons historiques de JPMorgan, aux codes et aux manières toute protestantes et traditionnelles.

Un architecte admiré et jalousé

Son agressivité et sa combativité a contribué au succès de la banque malgré les énormes crises qu’elle a dû traverser, et notamment la faillite de Lehman Brothers, ainsi que les différentes ondes de choc successives.

Et depuis son entrée en fonction, le tout Wall Street s’est étonné de ses traitements et salaires, extrêmement élevés quelles que soient les performances de la banque, puisque Jamie Dimon a toujours été le patron de banque le mieux payé du secteur.

Actionnaires en soutien… jusque là

Mais malgré les critiques ou la jalousie de ses concurrents, les mauvaises pratiques de la banque sur les marchés qui lui ont coûté des dizaines de milliards de dollars d’amendes, et plusieurs fois l’hostilité de la classe politique américaine, Jamie Dimon a toujours justifié son salaire par la transformation réussie de JPMorgan, et surtout le rôle central qu’a joué la banque au sein de tous les plans des autorités américaines pour résister aux crises financières.

Et jusque-là les actionnaires de la banque le soutenaient très largement. Malgré des tentatives toujours très insistantes des associations d’actionnaires américaines soucieuses d’éthique, qui font un lobbying intense depuis des années pour obtenir une réduction du salaire du patron, et surtout la dissociation des rôles de président et de directeur exécutif.

Le camp du changement gagne du terrain

En 2013, Jamie Dimon avait même enfoncé le clou, sous la forme d’une bravade. Il avait accepté en assemble générale, comme un défi, de statuer sur la séparation des pouvoirs. Requête qu’il aurait eu tout le loisir de rejeter. Mais près de 70% des actionnaires avaient voté en sa faveur, contre la séparation des pouvoirs.

Depuis, le vent a tourné, et Jamie Dimon, sur le départ, doit constater que le camp du changement est en train de gagner la partie. La future direction de la banque sera sans doute bien plus collégiale, avec un président non-exécutif et un directeur général.

L’emblématique partira donc avec le sentiment du devoir accompli, même si elle est faible, c’est tout de même une majorité d’actionnaires qui aura approuvé son salaire annuel, mais ces mêmes actionnaires expriment par leur vote que l’ére Dimon est désormais terminée, rendant indirectement un hommage singulier à un patron autant admiré, que craint ou détesté.

Antoine Larigaudrie