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Quand les Chinois vendent leur or pour miser sur les actions

BIjoux, lingots, pièces... les Chinois liquident leurs bijoux de famille pour investir en masse à la bourse, phénomène d'ampleur qui pourrait peser lourd sur la tendance long terme de l'or.

BIjoux, lingots, pièces... les Chinois liquident leurs bijoux de famille pour investir en masse à la bourse, phénomène d'ampleur qui pourrait peser lourd sur la tendance long terme de l'or. - STR - AFP

Vendre les bijoux de famille pour aller jouer sur les marchés… C’est la lame de fond qui est en train de traverser la Chine où les épargnants sont pris d’une véritable frénésie pour les actions en ce moment, avec un impact sensible sur la demande mondiale d’or.

Le World Gold Council (WGC) le déplore… Mais il est clair que les derniers chiffres concernant la demande mondiale d’or est en train de s’éroder sensiblement. La dernière des valeurs refuge ne rapporte plus assez et devient un actif désormais bon pour la casse.

Selon les dernières statistiques du WGC, la demande mondiale d’or est en repli de 1% sur le 1er trimestre de cette année au niveau mondial, avec une baisse encore plus marquée sur les produits de bijouterie, -3%. Et c’est du côté de la Chine que la baisse est la plus spectaculaire, -10%.

L’appétit pour le risque reprend

Mais il faut dire que l’or ne rapporte plus rien. Depuis ses plus hauts de septembre 2011 du côté des 1.900 dollars/Once, l’or n’a fait que descendre, avec le redressement de l’économie mondiale, notamment américaine, et les politiques monétaires au niveau mondial qui ont provoqué une sorte de relativisme monétaire rendant le rôle de l’or un peu secondaire et plus très intéressant pour le grand public.

Du coup depuis l’été dernier, l’or végète du côté des 1.200 dollars. Et parallèlement les investisseurs, toujours plus gourmands de rendement, ont délaissé leurs placements monétaires et autres produits réputés sûrs pour prendre des risques. Et c’est vrai qu’au vu des chiffres spectaculaires en provenance de Chine, l’impact se ferait sentir un jour ou l’autre sur l’or, métal précieux pourtant très apprécié dans le pays.

Les Chinois se remettent à la bourse en masse

Pour preuve, 8 millions de comptes-titres ont été ouverts en Chine sur le seul 1er trimestre, une hausse de 433% sur une année. Et cela se comprend avec un marché boursier qui gagne déjà plus de 50% depuis le 1er janvier ! Alors que l’or est globalement stable.

Ce qui veut dire qu’énormément de particuliers chinois ont vendu leurs pièces, leurs lingots et même leurs bijoux (grande tradition de cadeaux de joaillerie au moment du nouvel an chinois) pour ouvrir des comptes-titres et jouer en bourse ! Et plus il y aura cette pression baissière autour de l’or, plus le phénomène prendra de l’ampleur.

Chine et Inde aux avant-postes du marché

Pour l’instant le marché de l’or se tient relativement bien et tourne toujours autour des 1.200 dollars/l’once. Pour deux raisons : déjà un autre marché physique majeur reste pour l’instant porteur, le marché indien. Stratégique pour le secteur de l’or, parce que la Chine et l’Inde constituent à elles deux la moitié de la demande d’or mondiale !

Et pas de phénomène comparable en Inde, où malgré de très bonnes perspectives le marché boursier et un peu moins porteur et un peu plus chaotique. L’indice boursier Sensex est stable depuis le 1er janvier, et ce qui semblait être le marché asiatique sur lequel jouer encore sur la fin de l’année dernière paraît désormais beaucoup plus indécis.

Europe et Russie en soutien

Autre moteur fiable la banque centrale russe, toujours prise en étau entre l’évolution du dollar et la volonté de sauvegarder sa monnaie, le rouble, durement attaquée en fin d’année dernière. La banque centrale a donc acheté sur le marché au 1er trimestre 30 tonnes d’or, après avoir représenté le 1/3 de la demande des banques centrales mondiales sur l’année dernière.

Enfin, la demande en Europe continue à être alimentée notamment par le secteur financier, face aux incertitudes lourdes qui pèsent encore sur le continent, notamment tant que la crise de la dette grecque n’est pas circonscrite une bonne fois pour toute.

En attendant, c’est clairement le consommateur chinois qui induit une pression à la baisse sur les cours, et le premier signe qu’il faudra guetter éventuellement pour se préparer à une phase baissière de longue durée sera un changement du côté de la demande indienne dans un premier temps. Ce sera donc les indices boursiers du pays qui embrayeront par la suite pour faire la tendance.

Antoine Larigaudrie