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Quand Wall Street n'arrive plus à avancer

L'indice large S&P500 aura triplé de valeur depuis ses plus bas d'il y a 6 ans, signé en mars 2009.

L'indice large S&P500 aura triplé de valeur depuis ses plus bas d'il y a 6 ans, signé en mars 2009. - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

Après 6 ans de rebond absolument continu, les marchés américains semblent vouloir renouer avec des résistances qui les empêchent de monter plus haut. Existe-t-il un gros risque de correction à Wall Street, face à des indices européens qui rattrapent tambour battant leur retard ?

9 mars 2009. L’indice large S&P500 de Wall Street touchait un plus bas à 683 points. 6 ans après quasiment jour pour jour, il a été multiplié par 3. 6 ans de reprise fulgurante, témoins de la mise en place de tout l’arsenal de soutien au marché disponible de la FED, et de l’extraordinaire reprise économique américaine, qui encore aujourd’hui constitue le coeur de la conjoncture mondiale.

Mais l’essentiel du chemin a été fait. Les heures fastes du marché ultra-haussier dopé aux mesures extraordinaires de la FED sont terminées, l’économie américaine est repartie sur un rythme soutenu, et impossible pour la Banque Centrale américaine de l’ignorer. Il lui faudra bientôt relever ses taux pour en tenir compte, sous peine de créer des déséquilibres tout à fait néfastes.

2 obstacles à la normalisation monétaire

Deux obstacles cependant. Le dollar, qui devient une devise forte. Très fort. Trop peut-être face à un euro appelé encore à se déprécier (les analystes de Goldman Sachs et de la Deutsche Bank prévoient déjà la parité et le passage du dollar au-dessus de l’euro à terme), et des devises émergentes qui peinent à trouver des niveaux d’équilibre. De quoi inquiéter pour l’ensemble des perspectives des entreprises américaines.

Autre raison que la FED évoque pour se montrer patiente, le fait que l’Europe particulièrement soit encore à la traine de la tendance économique. Alors qu’elle est à quelque mois, si tout va bien, d’un début de normalisation de sa politique monétaire, la BCE, elle, vient à peine de lancer son plan de rachats d’actifs. Problème de timing.

Le soutien des rachats d’actions

On est donc dans un entre-deux complexe pour les indices américains, proche de plus hauts historiques encore améliorés depuis le début de l’année, avec quelques seuils toujours très regardés, les 2000 sur le S&P500, les 18000 sur le Dow Jones et les 5000 sur le Nasdaq. Beaucoup estiment qu’il va devenir compliqué d’aller bien plus haut dans ces conditions de marché.

Un facteur pourtant aide le marché à tenir. Après les injections de liquidité de la FED, les entreprises ont pris le relais elle-même en rachetant en masse leurs actions, pour soutenir les cours, éviter que le marché ne vende trop vite, et ne se rue sur des actions européennes aux bien meilleures perspectives

900 milliards de dollars investis sur 2014

Selon les statistiques les entreprises cotées au S&P500 auraient même dépensé 900 milliards de dollars l’année dernière en dividendes mais surtout en rachats d’actions. 2 fois plus qu’il y a 5 ans. Et elles ne se sont pas privées de le faire, d’autant plus que racheter ses actions se fait généralement à crédit, financé par des emprunts, d’autant plus faciles quand les taux sont quasi-nuls aux Etats Unis.

Mais justement, un relèvement, même minime, des taux directeurs américains avant la fin de l’année, pourrait considérablement changer la donne, et s’ajouter à l’ensemble des doutes autour d’une Amérique finalement trop puissante pour être une zone d’investissement intéressante.

Dimension expérimentale

On sent les marchés américains sur le fil du rasoir, on sent que la volatilité augmente légèrement, et que certains grands fonds d’investissements, à la recherche de liquidité et de rendement, ont sans doute construit des positions vendeuses.

C’est donc pourquoi la FED a sans doute les meilleures raisons du monde à vouloir se donner du temps, car la décision de relever ses taux et d’enclencher le processus de normalisation est une vraie expérience économique grandeur nature… les résultats risquent d’être totalement imprévisibles dans le contexte actuel, proprement extraordinaire.

Antoine Larigaudrie