Quand Wall Street valorise une Tesla au prix de deux Rolls Royce

"Décidément la bourse américaine a bien du mal à fixer une étiquette de prix sur Tesla, le prodige américain de l’automobile électrique. Si bien que l'on arrive ces derniers jours à des niveaux de valorisation proprement vertigineux."

C’est une des plus belles histoires du secteur automobile de ce début de siècle. Et Wall Street adore. Les investisseurs aiment tellement Tesla et croient tellement à l’avenir de l’auto électrique hautes performances qu’ils lui prêtent des perspectives… pour le moins extraordinaires.

Le titre Tesla signe une hausse de 290% sur 3 ans, et plus de 30% rien que sur 3 mois. Sa capitalisation est maintenant supérieure à 30 milliards de dollars. Un cours qui représente 125 fois les bénéfices escomptés sur les 12 prochains mois, alors que 20 fois seulement commence à devenir un niveau jugé élevé.

2 limousines, 3 sportives ou 18 monospaces !

Rapporté à chaque voiture Tesla produite sur la seule année 2015, on arrive à un prix par voiture de … 620.000 dollars. L’équivalent, au choix, de 2 limousines Rolls Royce Phantom, ou d’un "package" idéal des 3 meilleures auto sportives actuelles, Ferrari 488 - Porsche 911 - Aston Martin DB9. Ou encore 18 Renault Scénic.

Un niveau objectivement déraisonnable, mais qui témoigne aussi des espoirs que suscite Tesla aux yeux de la communauté financière. Ca passe par une gamme maintenant étoffée (Roadster, berline S, crossover X et bientôt petite berline Model 3)

Les investisseurs y croient

Un réseau de plus en plus performants de super-chargeurs qui s’installe dans le monde entier également. Et aussi une fiabilité reconnue. Tesla représente la seule entreprise capable de fournir une vraie solution automobile haut de gamme tout-électrique fiable, avec une autonomie suffisante pour un usage courant.

C’est pourquoi beaucoup d’investisseurs, également séduits par le charisme du patron Elon Musk, estiment qu’il y a une chance extrêmement sérieuse que Tesla ait en main l’avenir de l’industrie automobile.

Le défi de la Model 3

Malgré tout, l’optimisme de Wall Street doit être tempéré, et de nombreux cabinets d’analystes mettent en garde. C’est surtout et avant tout la Model 3 qui doit sceller la future orientation stratégique de Tesla. Après des pré-commandes spectaculaires, on semble s'être orienté vers des chiffres plus réalistes, beaucoup ayant été annulées depuis.

Petite berline a prix contenu pour la catégorie tout-électrique, 30.000$ environ, elle peut devenir potentiellement une concurrente de poids pour la Prius de Toyota, la première voiture hybride à vocation mondiale (3 ou 4 millions d’exemplaires par an).

Scénario très optimiste

Potentiellement seulement parce que l’outil de production de Tesla n’est pas adapté pour l’instant à ce défi. A titre de comparaison, seules 50 000 Tesla ont été vendues mondialement sur l’ensemble de l’année 2015… Même le défi de 500.000 exemplaires à horizon 2020 paraît difficile a relever sur le papier.

Autrement dit le cours de bourse prend en compte l’hypothèse très optimiste que Tesla devienne un constructeur de dimension mondiale en très peu de temps. Ce qui est encore loin d’être le cas.

Promesse de profits

Sans compter qu’au vu de ces valorisations faramineuses, le titre attire beaucoup de spéculateurs de cours terme qui achètent et qui vendent le titre à découvert, occasionnant des mouvements violents au quotidien sur le titre.

Mais les analystes notent qu’Elon Musk, pourtant très ambitieux et souvent critiqué pour ses projets grandioses avec Space X ou son initiative de recherche sur Mars, a désormais un discours bien plus raisonnable et raisonné vis-à-vis de Tesla. Le prochain défi du groupe est de dégager des bénéfices sur un trimestre, promesse faite par Elon Musk et qui doit être réalisée si tout va bien à la fin de cette année.

Antoine Larigaudrie