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Vive l’euro fort !

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Les incertitudes sur la politique économique américaine font repartir l’euro à la hausse. Le cours est désormais à 1,38 $ et le seuil psychologique des 1,40 n’est pas loin. Cela favorise les importateurs et explique pourquoi notre taux d’inflation est bas.

Mais si les importations devraient être favorisées, les exportateurs sont à la peine. Le problème de la France est d’avoir retardé sans cesse les réformes de structure que nécessite le fait d’avoir une monnaie forte. Il y a un discours récurrent parmi nos dirigeants politiques mais aussi chefs d’entreprise pour dire que l’euro est trop fort et qu’il faudrait que la BCE intervienne pour le faire baisser. Dans le rapport Gallois par exemple, il est écrit qu’il faudrait que le taux de change de l’euro soit de 1,15 $. Mais cela n’est pas nouveau. Depuis la disparition de Pierre Beregovoy, personne ne semble prêt à assumer une politique de change dite de monnaie forte.
Le résultat de l’appréciation du taux de change est triple : il baisse notre facture énergétique et dans une période comme la nôtre où le prix du pétrole se maintient au-dessus des 100 $ le baril, ce n’est pas négligeable ; il baisse notre inflation et transfère du pouvoir d’achat vers les ménages, ce qui est utile mais déjà moins significatif que l’élément précédent dans la mesure où les tensions inflationnistes sont faibles ; il pénalise les exportateurs car ils reçoivent des recettes en dollars qui, converties en euros, sont de moins en moins élevées, dans une période où les entreprises ont de faibles marges et auraient besoin de les accroître. C’est ce dernier aspect que l’on met surtout en avant et il n’est pas à écarter. La baisse de la facture pétrolière favorise la croissance mais les marges réduites des entreprises limitent leur investissement et donc la croissance à venir.

Pourquoi ne faisons-nous rien pour éventuellement corriger cette situation ?

D’abord parce que l’euro n’est pas que notre devise et nos partenaires ne sont pas favorables à une dévaluation significative de l’euro. Les Allemands qui ont des excédents extérieurs n’y sont pas favorables et ils disent aux Français qu’ils doivent faire les efforts d’adaptation pour rester compétitifs comme l’ont fait d’autres pays d’Europe, notamment l’Espagne. Et les Espagnols justement, qui de fait ont fait des efforts ne voient pas pourquoi on entrerait dans une spirale dévaluation/inflation alors qu’ils ont tout fait pour l’éviter en acceptant la déflation et les restructurations d’entreprises.
Ensuite parce qu’en France même, si certains militent pour un euro faible, les entreprises les plus performantes qui exportent sans difficulté conseillent aux entreprises en difficulté d’accroître leur productivité et d’accélérer leur mutation.

Cela pose le problème de notre maintien dans la zone euro ; est-ce que la sortie prônée par certains partis ne serait pas la solution ?

Indépendamment des aspects politiques de cette option, sur le plan économique, cela reviendrait à choisir un enchaînement inflation/dévaluation. Outre que ce genre de politique peut dégénérer en des inflations difficilement contrôlables, même si l’inflation encadrée a l’avantage notamment d’effacer les dettes, elle alimente des transferts de revenu et de pouvoir d’achat, elle est une forme d’impôt dont les principales victimes sont les plus pauvres.

Jean-Marc Daniel