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Orange: Mortal Kombat

Lors de son show Hello, Stéphane Richard présente les dernières innovations d'Orange

Lors de son show Hello, Stéphane Richard présente les dernières innovations d'Orange - ERIC FEFERBERG / AFP

Orange s’est remis au centre du jeu des télécoms en Europe et peut reprendre le combat contre son véritable ennemi, Google.

« Ce n’est pas un ennemi, je ne veux pas le présenter comme ça, plutôt un partenaire, qui parfois peut vouloir abuser de sa position, donc il faut rester vigilant », voilà comment Stéphane Richard résumait ce matin sa position vis-à-vis de Google.

Qu’en termes galants ces choses-là sont dites. En privé, les dirigeants d’Orange sont beaucoup plus violents et se montrent déterminés à lutter contre la puissance du géant : « il y a même un front commun des opérateurs européens sur cette question » nous dit une source dans l’entreprise, « et nous réfléchissons à une action commune auprès de la commission européenne »

Le « show Hello » sur l’innovation n’est finalement qu’un des aspects de cette bataille, envoyer le signal à l’ensemble de l’écosystème qu’Orange peut aussi accueillir les start up, que la Google dépendance n’est pas une fatalité (accessoirement il s’agit aussi de valoriser des armées d’ingénieurs qui peuvent s’interroger sur leur avenir, c’est d’ailleurs, sans doute, en interne, l’enjeu le plus important)

Je ne vais pas m’attarder là sur les avantages (tiers de confiance, lien fort avec le client, image service public) et les inconvénients (lenteur de la prise de décision, faible culture du risque, taille finalement réduite au regard des enjeux) d’Orange dans ce combat, ce qui m’intéresse c’est que l’entreprise puisse à nouveau se concentrer là-dessus.

Replay : il y a deux ans. Une entreprise qui semblait à l’agonie, elle voyait ses marges et les parts de marché s’effondrer, l’offensive de Free sur le mobile lui cisaillait les reins. Bouygues, par une décision réglementaire, prenait une avance décisive sur la 4G. Un choc considérable sous pression politique et sociale. Pas question d’ajuster les coûts de manière brutale, le ministre de tutelle brassait du vent dans tous les sens et Stéphane Richard avouait se débattre « dans l’empire des injonctions contradictoires ».

Deux ans après, Orange est revenue au centre du jeu. On a même l’impression qu’elle le contrôle à nouveau. Et elle y est bel et bien revenue par la force de ses réseaux. D’abord parce qu’en portant ceux de Free (dieu sait qu’on l’a attaquée sur ce choix) elle a limité la casse en matière de revenu, ensuite parce que sa vitesse de réaction sur la 4G a redonné à l’entreprise toute sa légitimité. L’épisode raté de consolidation autour de Bouygues est loin d’être vécu comme un échec, au contraire, Orange a démontré que rien ne se faisait sans elle, mais qu’elle pouvait très bien se passer d’un accord. L’aventure américaine de Free apparait comme une aubaine ultime, l’idée que la destruction de l’opérateur historique n’est pas le but de guerre de Xavier Niel. Evidemment pas.

On en est donc revenu à la case départ, il y a presque 10 ans. Didier Lombard alertait alors l’Europe : « nous construisons des autoroutes sur lesquelles ne roulent que des voitures américaines ». Ça n’a jamais été aussi vrai qu’aujourd’hui, le temps est venu de s’en occuper.

Stéphane Soumier