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Emploi

Chômage structurel : on y est !

Fin 2017, les effectifs des contrats aidés ont diminué de 35%.

Fin 2017, les effectifs des contrats aidés ont diminué de 35%. - PHILIPPE HUGUEN / AFP

Le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie A, ceux qui ne travaillent pas du tout, a donc augmenté de 0,5 % (+16 300) au troisième trimestre, tandis que le nombre de demandeurs d'emploi en catégories A, B, C (qui inclut ceux qui ont travaillé quelques heures voire quelques dizaines d’heures) est en hausse de 0,4 % (+21 700).

Comment expliquer cette hausse? Pas par l’afflux massif de nouveaux chômeurs. Au contraire, le nombre de nouveaux inscrits a baissé de 0,7% par rapport au deuxième trimestre et de 2,7% sur un an. En revanche, le rythme des sorties de Pôle Emploi s’est nettement ralenti, puisqu'elles ont diminué de 2,5% par rapport au printemps et de 1,2% sur un an.

Une tendance qui peut paraître déconcertante au vu des besoins de main d’œuvre croissant des entreprises et de leur difficulté à les satisfaire. Un nombre croissant d’entreprises est en effet confronté à des difficultés de recrutement. Selon les enquêtes de Bpifrance, 83 % des PME-ETI rencontrent des difficultés de recrutement, 72 % pensent que ces difficultés constituent un frein à leur croissance, et 46 % ont des difficultés de recrutement « sérieuses », c’est-à-dire fréquentes, avec un impact négatif réel sur le développement de leur chiffre d’affaires.

Le paradoxe : les entreprises recrutent de plus en plus 

Et quand elles trouvent l’oiseau rare, les entreprises n’hésitent pas à recruter. La preuve : l’Acoss, l'organisme collecteur des cotisations de Sécurité sociale, vient juste d’annoncer que le nombre de contrats de travail signés au cours de l’été a bondi à 6,59 millions, soit 2,7% de plus qu’au printemps, pour atteindre un niveau record. Ces bons chiffres sur les embauches sont corroborés par le baromètre trimestriel de l'Association pour l'emploi des cadres (Apec) publié aussi ce mercredi. Ainsi, 63% des entreprises de plus de 100 salariés interrogées par l'Apec "ont recruté au moins un cadre" au troisième trimestre, soit trois points de plus que sur la même période un an auparavant et un point de plus que lors du trimestre précédent. On est sur des niveaux records.

Preuve supplémentaire de ces difficultés à recruter : les salaires augmentent. Ceux des cadres comme ceux des non cadres, qui augmentent de presque 2%, du jamais vu depuis 2013.

Inadéquation entre les besoins et le profil des chômeurs

Première explication : l’inadéquation croissante entre les besoins des entreprises et les compétences des chômeurs inscrits à Pôle emploi. Comment les entreprises procèdent pour recruter ? Elles cherchent d’abord à puiser dans le vivier de la concurrence, autrement dit débaucher ailleurs les bons éléments. Ensuite elles se tournent vers les personnes les moins éloignées du marché du travail. Ainsi il est frappant de voir que le nombre de demandeurs d’emplois inscrits depuis plus d’un an à Pôle Emploi augmente de 6,4% sur un an, tandis que celui des inscrits depuis moins d'un an diminue de 4 % sur un an.

Preuve que les entreprises ne trouvent pas chez les chômeurs de plus longue durée les profils dont ils ont besoin. Ces chômeurs de longue durée, c’est le noyau dur du chômage, coincés qu’ils sont par un niveau de qualification trop faible (80% des inscrits à Pole emploi ont au mieux le bac) au regard du salaire minimum trop élevé.

Le phénomène des « permittents »

Autre phénomène: les demandeurs d’emplois restent inscrits de plus en plus longtemps à Pole emploi même s’ils travaillent ! Parce qu’ils ne savent pas combien de temps va durer leur contrat, parce qu’ils ne veulent pas se désinscrire pour avoir à se réinscrire plus tard. Un nombre croissant de Français travaille tout en restant sur les listes de Pôle Emploi. Ce sont les permittents : ils sont aujourd’hui 1,5 million, et parmi eux 830 000 touchent des allocations chômage en plus de leur salaire, celui-ci étant trop faible. Il est ainsi frappant de constater que le nombre d’inscrits à Pole emploi qui travaillent au moins 150 heures par mois est en hausse de presque 10% sur un an, et représente plus de 600 000 personnes.