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Emploi

Faire baisser le chômage d'ici à 2017? Un pari risqué

François Hollande fait du recul du chômage la condition sine qua non d'une candidature en 2017.

François Hollande fait du recul du chômage la condition sine qua non d'une candidature en 2017. - -

Le Président de la République a laissé entendre qu’il ne serait pas candidat à l’élection présidentielle si le chômage ne baissait pas d’ici 2017. C’est un pari plus risqué que ne le croit sans doute lui-même François Hollande.

Contrairement à ce qu’on a tendance à croire à l’Elysée et à Matignon, la croissance ne reviendra pas toute seule, tirée par nos grands partenaires commerciaux, comme c’était le cas après les récessions "traditionnelles". Nous ne sortons pas d’une récession traditionnelle mais d’une crise financière comme il y en a une par siècle, et en plus la France souffre non pas d’une panne d’essence mais d’une panne de moteur.

Le moteur ne repartira que si les entreprises redressent leur situation financière, puis investissent, retrouvent de la compétitivité, dans l’industrie comme dans les services, et embauchent. Et si pour le coup la politique du gouvernement va dans le bon sens, il faut au moins 3 à 5 ans avant que ce genre de politique ne fasse effet. Donc il n’est pas sûr du tout que la croissance dépasse franchement le seuil fatidique de 1,5% à partir duquel le chômage baisse.

En plus les flux d’entrées et de sorties sur le marché du travail ne seront pas favorables… Si l’on en croit l’Insee, 110.000 personnes entreront en moyenne chaque année sur le marché du travail au moins jusqu’en 2020. Ca veut dire que pour stabiliser le chômage il faut créer 110.000 emplois par an. Et 250.000 de plus pour faire baisser le chômage de 1 point environ.

Et les contrats aidés?

Est-ce qu’on pourra compter sur les contrats aidés ? Les contrats aidés, au total, c’est 450.000 personnes par an pour un coût de 3,3 milliard d’euros. Est-ce qu’il est possible de continuer à ce rythme-là vu l’état des finances publiques ? Pas sûr !

Et si on réduit la voilure, le timing n’est pas bon pour l’Elysée. Exemple des contrats d’avenir: 150000 jeunes sont censés bénéficier des contrats d’avenir cette année. Or les contrats d’avenir durent 26 mois. Ceux qui seront signés en décembre 2014 prendront fin février 2017, pour une élection présidentielle en mai. On aurait pu rêver meilleur timing !

Enfin est ce que les réformes déjà faites, comme la flexisécurité en janvier 2013 et le pacte de responsabilité abaissent le seuil à partir duquel la France créé des emplois : un peu mais est ce que ce sera suffisant ? Pas sûr puisque les 4,5 milliards d’allègements de charges patronales consacrés aux bas salaires créeront au total entre 100.000 et 300.000 emplois au total sous l’hypothèse la plus optimiste.

La dernière fois que l’outil de production français était aussi délabré, c’était à la fin des années 1970. Or à l’époque, le chômage a monté 57 mois de suite entre le printemps 1978 et l’hiver 1982: si ça dure aussi longtemps, ça veut dire pas de baisse avant la fin 2016…

Emmanuel Lechypre