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Emploi

L'enseignement en anglais à la fac, un facteur de compétitivité

Les cours en anglais pourraient se multiplier dans les universités françaises, pour gagner en compétitivité.

Les cours en anglais pourraient se multiplier dans les universités françaises, pour gagner en compétitivité. - -

Le projet de loi pour l’université comprend une soixantaine de mesures, mais le débat s’est cristallisé sur les cursus en anglais. Entre mort de la langue française et la compétitivité des facultés, ce projet sera débattu mercredi 22 mai à l'Assemblée.

"Si nous n’autorisons par les cours en anglais (...) nous nous retrouverons à cinq à discuter de Proust autour d’une table". Avec cette déclaration sur la future réforme universitaire, Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, a provoqué l’ire des défenseurs de la langue française. Explications sur ce nouveau débat parlementaire.

> Que prévoit la réforme Fioraso?

La réforme sur de possibles cours donnés en anglais à l’université, qui sera débattue mercredi 22 mai à l’Assemblée Nationale, fait partie d’un ensemble de 60 mesures présentées dans le projet de loi d’orientation pour l’enseignement supérieur et la recherche. Sur RMC, la ministre a regretté "une polarisation" du débat sur ce point particulier.

Le texte a déjà été légèrement modifié la semaine dernière par les députés, en commission. Ces retouches prévoient que l’enseignement ne pourra être fait que "partiellement" dans une langue étrangère, et devra être accompagné d’un apprentissage du français pour les étudiants étrangers.

> Certains cours ne sont-ils pas déjà en anglais?

Il faut différencier les cours à l’université publique et ceux dans les écoles privées, qui sont libres d’enseigner en anglais. De nombreuses écoles de commerce et d’ingénieurs proposent des cursus entiers dans la langue de Shakespeare. A la fac, certains cours sont dispensés en anglais, dans les filières scientifiques et économiques.

La loi actuelle, dite "loi Toubon", explique que l’enseignement public doit se faire en français, mais prévoit des exceptions pour les universités ayant des partenariats avec l'étranger. Les sciences dures et les laboratoires de recherche privilégient l’anglais pour faciliter les équivalences internationales. Il y a 795 formations en langue anglaise disponibles en France, public et privé confondus. La loi permettrait ainsi de régulariser une situation déjà existante.

> Pourquoi le gouvernement veut des cours en anglais à la fac?

L’objectif est double: améliorer les compétences et l'insertion des étudiants français, qui ont la réputation d’être mauvais en langues étrangères, et rendre les universités hexagonales "plus attractives" pour les étudiants étrangers, selon la formule de François Hollande. La communication serait facilitée avec les universités partenaires, de même que l’accueil de professeurs non-francophones.

Geneviève Fioraso a ainsi avancé l’objectif de 12 à 15% d’étudiants étrangers à l’horizon 2020. Selon Campus-France, en 2011, la France comptait 278.000 étudiants étrangers, qui représentaient environ 12% de l’effectif total.

> Pourquoi la réforme pose problème?

Selon ces détracteurs, ce projet enverrait un très mauvais signal aux étudiants étrangers qui apprennent le français. L’Académie française et plusieurs personnalités, comme Bernard Pivot et Jacques Attali, s’y opposent par crainte d' "une marginalisation de la langue française". Une quarantaine de députés socialistes conteste également cette mesure.

Des syndicats de l’enseignement ont appelé à la grève et à des manifestations ce mercredi, pour réclamer le retrait du projet de loi. Pour Claudine Kahane, co-secrétaire générale du syndicat SNESup-FSU, "c’est la richesse culturelle qui est en jeu".

> Qu'en disent les étudiants?

Dans l’ensemble, les syndicats étudiants se détachent du débat. Pour Emmanuel Zemmour, président de l’Unef, "ce qui intéresse les étudiants, c’est plutôt de savoir s’ils vont pouvoir aller à l’université, réussir leur diplôme et trouver un travail". Même son de cloche pour Antoine Diers, à la tête du syndicat étudiant Uni-Met: "le problème de l’université, ce n’est pas la langue, mais l’attractivité de nos diplômes".

Audrey Dufour