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Acteurs trop payés? "Les gros salaires n'ont rien à voir avec les subsides de l'Etat"

Le PDG du studio de production Stone Angel est venu défendre le cinéma français

Le PDG du studio de production Stone Angel est venu défendre le cinéma français - -

Si les producteurs paient très cher certains acteurs, ce n'est pas parce qu'ils font n'importe quoi, mais parce qu'ils ont de bonnes raisons économiques de le faire. C'est l'argument qu'a développé le producteur Pierre-Ange le Pogam, interviewé par BFM Business.

Depuis la diatribe de Vincent Maraval, fondateur de la société de production Wild Bunch, publiée dans Le Monde le 28 décembre, la polémique enfle et les chiffres sortent sur le financement du cinéma et les salaires des acteurs. Ce matin, BFMBUSINESS.COM publiait en exclusivité le palmarès des flops du cinéma français en 2012, posant la question de la rentabilité du modèle français. Dans le même temps, Pierre-Ange le Pogam, producteur, PDG de Stone Angel, répondait aux questions de Stéphane Soumier sur notre plateau radio/TV.

Pierre-Ange le Pogam estime que si Vincent Maraval a eu raison de "lancer un cri", sa tribune mérite certains commentaires et nuances.

Le producteur du futur "Grace Kelly", qui sera incarnée au cinéma par Nicole Kidman, tient d'abord à rappeler que très peu de contrats chaque année, sont de la nature de ceux évoqués par Vincent Maraval. "Des acteurs qui ont des rémunérations de 500 000, 800 000, 1 million d’euros ou plus, c’est extrêmement rare", insiste-t-il. "Et cela appartient l’initiative de producteurs indépendants qui n'ont absolument rien à voir avec les subsides publics, n'y rien à voir avec les chaînes de télévision qui sont financées par l’Etat (France 2, 3 ou 4)".

Pierre-Ange le Pogam précise que le salaire d'un acteur relève d'une décision du producteur, donc de la responsabilité d’entrepreneurs privés. Et si ces derniers offrent de tels contrats à certains acteurs, ce n’est pas parce qu’ils sont "abrutis", s'amuse-t-il, "c’est parce qu’ils ont de bonnes raisons économiques de le faire".

Le cinéma français en bonne santé

Défendant sa profession, le PDG de Stone Angel regrette que l'on montre du doigt la rémunération de Dany Boon sur le film "Un plan parfait", alors que "les mêmes producteurs ont montré à quel point ils sont d’excellents producteurs avec 'Intouchables', film sur lequel ils ont sûrement eu une rentabilité exceptionnelle".

"Dany Boom a su pendant des années remplir les salles spectacles dans la France entière, et a prouvé avec ses deux derniers films qu’il est capable de réunir quasiment 30 millions spectateurs dans les salles... Mais ça on en parle pas", dénonce-t-il en concluant que la rentabilité que Dany Boon apporte sur les projets qu’il imagine ou auxquels il participe est absolument avérée.

Internet, la VOD, les réseaux sociaux créent une plus forte demande de films

Selon Pierre-Ange le Pogam, on peut être fier du cinéma français, qui s'est considérablement professionalisé: "Notre cinéma s’exporte très bien, de manière globale. Le succès d''Intouchables' dans le monde est un exemple de la bonne santé de notre cinéma. Prenez aussi Taken 2, c’est un film français! C’est le résultat du savoir-faire d’une société de production française, Europacorp (dont il est participa à la création, NDLR)".

Et s'il sort 700 films par an aujourd'hui, contre 200 dans les années 80, c'est parce que la donne a changé: "Un film est vu en salle, mais aussi très consommé en DVD, en VOD, et dans le monde entier".

Le cinéma évolue désormais dans un monde beaucoup plus globalisé, où les réseaux de distribution se sont multipliés: "Internet, réseaux socieaux, VOD... ils ont besoin de ces contenus. Et les films vivent pendant des années sur l’ensemble de ces réseaux", justifie le producteur.

"Le CNC n'est pas un pourvoyeur de devise pour des producteurs incompétents !"

Concernant les subventions publiques, le PDG de Stone Angels juge que la dépense publique a l’énorme avantage de donner les moyens à la Culture, en général, en France. Et que cet argent est géré avec beaucoup de soins: "Ne croyez pas que ceux qui dirigent le CNC sont des pourvoyeurs de devises pour des producteurs totalement incompétents et qui font n’importe quoi avec cet argent!", s'exclame-t-il.

Cette économie sert beaucoup plus les petits films qui en ont besoin, films d’auteurs ou en difficulté, selon lui. "Les grands films mis en exergue ces jours-ci sont des films qui ne participent pratiquement pas à l’économie qui est distribuée par ses subsides de l’Etat", assure-t-il.

"Je reviendrai prouver la rentabilité du cinéma français"

Pierre-Ange le Pogam refuse enfin de croire que seuls 15% des films français sortis en 2012 sont rentables. "Ce n’est pas possible car les films français de 2012 n’ont constaté pour l'heure que leurs coûts de production et leurs recettes salles. C'est oublier les exploitations vidéo (la VOD et les DVD), à l’étranger et toute la durée de vie du film", s'insurge-t-il. Pourtant, l'étude de BFM Business prend bien en compte non seulement les entrées en salles, mais aussi toutes les recettes futures: DVD, passages TV...

Pierre-Ange le Pogam promet de revenir dans quelques années prouver que la rentabilité existe bien dans le cinéma français. Rendez-vous est pris!

D. S. et Propos recueillis par Stéphane Soumier