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Assurance Banque

ADP fait condamner la banque JPMorgan

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- - TIMOTHY A. CLARY / AFP

La banque d’affaires américaine a été condamnée pour défaut de conseil. Elle avait accompagné l'exploitant de Roissy et Orly lors du rachat des aéroports turcs TAV en 2012.

C’est assez rare dans le monde des affaires. La banque JPMorgan a été condamnée en début d’année pour défaut de conseil par la Cour d’appel de Paris. Deux ans plus tôt, le Tribunal de commerce de Paris avait pourtant débouté le plaignant: ADP. Le groupe français qui exploite notamment les aéroports de Roissy et Orly accusait la banque d’affaires américaine de ne pas lui avoir transmis des informations essentielles lors du rachat des aéroports turcs TAV. La justice a estimé que JPMorgan avait "commis une faute dans la réalisation de sa mission" et l’a condamné à payer 180.000 dollars au groupe français.

Retour sur les faits. Fin 2011, ADP se porte candidat au rachat de son homologue turc TAV qui exploite onze aéroports dans le pays. Pour l’épauler, il engage JPMorgan en tant que conseil financier. Après une première offre de rachat en novembre et une seconde début mars 2012, ADP remporte la mise aux enchères pour 700 millions d’euros. Il signe un protocole d’accord pour l’acquisition de TAV mi-mars 2012.

Un aéroport toujours pas construit

Sauf qu’un mois plus tard, patatras! Le gouvernement turc annonce la construction d’un troisième aéroport à Istanbul, destiné à remplacer celui d’Atatürk, précisément exploité par TAV, la nouvelle filiale d’Aéroports de Paris. L’aventure turque tourne à la catastrophe pour le groupe français qui a payé cher son acquisition. Il assigne alors sa banque conseil JPMorgan pour "manquement à ses obligations en s’abstenant d’étudier l’impact de la construction d’un nouvel aéroport". Ce projet de troisième aéroport était dans les projets gouvernementaux depuis de longs mois et la presse turque s’en était même fait l’écho. Et la banque devait en mesurer les conséquences financières.

En juillet 2015, ADP voit ses demandes rejetées par le Tribunal de Commerce de Paris. Début 2017, c’est donc la Cour d’appel de Paris qui lui donne finalement raison, considérant que JPMorgan "se devait d’instruire le risque de l’ouverture d’un troisième aéroport" et "qu’elle a commis une faute dans la réalisation de sa mission". La Cour a aussi insisté sur le fait qu'"ADP a payé une somme importante pour une prestation supposée traiter toutes les questions pouvant influer sur la valorisation" de TAV. Le groupe aéroportuaire a versé 6 millions d’euros à JPMorgan pour ses conseils…

La justice a toutefois jugé que ce manque d’informations n’avait pas eu de conséquences sur les résultats de TAV, qui sont très bons. D’autant que le troisième aéroport d’Istanbul n’est toujours pas en service… Elle a également souligné que l’information sur sa construction avait été "évoquée par le conseil d’administration d’ADP" avant qu’il ne formule une offre de rachat. Un bémol de taille qui contrebalance cette condamnation.

Matthieu Pechberty