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Agacé par les contrefaçons, Nike claque la porte au nez d'Amazon

La marque américaine faisait face à une forte concurrence de la contrefaçon sur le marketplace, faisant mécaniquement baisser les prix. Elle a donc mis un terme à leur collaboration.

Pour les marques, la stratégie à opter face à Amazon peut être un véritable casse-tête. Actuellement, la marketplace américaine, numéro mondial du commerce en ligne, vend absolument de tout. D'abord parce que le groupe de Jeff Bezos fonctionne comme un détaillant classique qui se fournit directement auprès des grossistes, mais aussi parce que plus de la moitié des produits vendus émanent de marchands indépendants qui utilisent la structure Amazon. De cette façon, même les enseignes qui refusent de fournir Amazon verront leurs produits disponibles en ligne.

Et c'est bien évidemment le cas de Nike, une des marques les plus vendues au monde. En 2017, l'équipementier sportif avait tenté l'aventure Amazon, non sans traîner des pieds. "Ce sera une expérience pilote" promettait le PDG de l'époque Mark Parker. L'idée était d'enrayer les ventes tierces et surtout de lutter contre les contrefaçons. Mais aussi de séduire les "millennials", cette génération née entre 1980 et 2000 et qui déserte les centres commerciaux.

Virage stratégique

Lasse, la marque a finalement annoncé mettre un terme à "l'expérience", dans un communiqué. "Dans le cadre des efforts de Nike visant à améliorer l'expérience des consommateurs grâce à des relations plus directes et personnelles, nous avons pris la décision de mettre fin à notre projet pilote actuel avec Amazon Retail" a expliqué le groupe de Beaverton (Oregon). Difficile de ne pas y voir la patte de John Donahoe (ex-eBay) qui prendra les rênes du groupe en janvier prochain après la démission de son prédécesseur, PDG de Nike pendant 14 ans.

Au-delà des difficultés pour Amazon d'endiguer les contrefaçons, c'est aussi un virage stratégique pour Nike qui faisait partie des précurseurs du e-commerce. Sur Amazon, les produits officiels étaient plus chers, moins achetés et donc remontaient peu dans les résultats affichés par le site.

Et si Nike se permet de claquer la porte, c'est parce que la marque américaine est une des rares à avoir les épaules suffisamment larges pour se passer d'Amazon. La marque se vend partout où elle est proposée et la stratégie va désormais viser la plateforme directe Nike.com où les ventes ont augmenté de 35% en un an.

Coup de gueule du secteur

D'autres grands noms des vêtements et du sport pourraient-ils suivre? Le coup de force de Nike montre bien le malaise des gros détaillants face à l'importance prise par Amazon. Son principal rival, Adidas, est aussi associé à Amazon et n'a pour l'instant pas changé sa stratégie.

En octobre dernier, l’AAFA (American Apparel & Footwear Association) qui réunit un millier de marques du secteur de la mode, avait néanmoins demandé le placement d'Amazon sur la liste des "notorious markets". Cette liste recense les plateformes qui "facilitent la contrefaçon" et l’AAFA cite nommément Amazon. "Malgré son rôle de leader dans le secteur de la vente au détail dans le monde et son rôle de partenaire de vente important pour bon nombre de ses marques membres, Amazon continue de présenter d'importants problèmes de contrefaçon" expliquait l'association. Pour le moment, seul Nike a joint la parole aux actes.

Thomas Leroy