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Amazon a 20 ans: 10 choses que vous ignoriez sur le numéro 1 mondial du e-commerce

Une boutique à tout vendre sur internet, le rêve de Jeff Bezos depuis le lancement d'Amazon en 1995

Une boutique à tout vendre sur internet, le rêve de Jeff Bezos depuis le lancement d'Amazon en 1995 - Mark Ralston - AFP

Lancé en juillet 1995, le site créé par Jeff Bezos s’est imposé en deux décennies comme le leader de la vente en ligne partout dans le monde. Retour sur l’histoire du site en 10 anecdotes peu connues.

C’est le 16 juillet 1995 qu’un nouveau site fait son apparition sur le World Wide Web. Un petit site de vente de livres par correspondance qu’a priori rien ne distingue des milliers d’autres qui ont éclos en ce milieu des années 1990. Et pourtant, cet Amazon.com a su s’imposer comme le leader mondial du commerce en ligne. En élargissant son offre à quantité de nouveaux produits, en ouvrant des filiales dans des dizaines de pays, en multipliant les services, en numérisant les livres, en pressurisant ses fournisseurs pour obtenir des prix toujours plus bas, en contournant habilement le fisc… Amazon est devenu la référence mondiale, un site craint par ses concurrents (et fournisseurs) mais dont raffolent de plus en plus de clients dans le monde.

Un site qui paradoxalement et malgré 20 ans de forte croissance (90 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2014) ne semble toujours pas avoir trouvé l’équation économique. En 20 ans, Amazon a en effet bouclé autant d’exercices dans le rouge (-241 millions de dollars en 2014) que dans le vert. Sans perdre pour l’heure la confiance des investisseurs puisque son cours a été multiplié par 3,7 depuis 2010. Reste à savoir si à ce régime-là, la bourse sera aussi clémente durant les 20 prochaines années.

En attendant, voilà 10 anecdotes révélatrices sur l’histoire du géant américain.

1. Au début était le livre…

En 1994, Jeff Bezos débute comme financier dans un fonds d’investissement new-yorkais. Il suit les valeurs technologiques et prend conscience que le nombre de bits d’information sur internet a été multiplié par plus de 2.000 en quelques mois. Il en conclut que la croissance d’une société sur web peut être d’un facteur 2.000. Il veut alors créer un site web. Il fait une liste de produits qui pourrait être vendus sur internet : fournitures de bureau, logiciel, vêtement, musique… Il lui apparaît que c’est le livre le plus approprié. Pourquoi? Parce que c’est un produit standard, chaque livre est le même, les acheteurs savent exactement ce qu’ils vont obtenir. Atout majeur: il y a 3 millions de livres en circulation dans le monde. Soit infiniment plus que ce que peut stocker une chaîne comme le libraire américain Barnes & Nobles.

Ci-dessous la page d'accueil d'Amazon en 1995...

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- © Amazon

2. Le site aurait pu s’appeler Cadabra

La première idée de Bezos était d’appeler son site "Cadabra" pour "Abracadabra". Problème ça sonne comme "cadaver", cadavre en anglais. C’est en feuilletant un dictionnaire qu’il s’arrête sur le mot "Amazon". Une révélation: l’Amazone est le fleuve le plus grand du monde, ça deviendra la librairie la plus grande. En plus le nom commence par un "A ", ce qui plaçait à l’époque le site dans les premiers sur les listes de sites internet très consultées à l’époque.

3. Des portes recyclées en bureaux de travail

Ça fait partie de la légende de Jeff Bezos souvent qualifié de "patron radin". Plutôt que d’investir dans du véritable mobilier, le patron d’Amazon aurait récupéré de vieilles portes pour en faire le mobilier de bureau. Même après sa période "garage", la compagnie continuera d’utiliser d’anciennes portes pour ses grandes tables de réunion. Aujourd’hui, la société n’utilisent plus de vieilles portes mais ces dernières sont accrochées au mur au siège et font office de décoration… La pingrerie de Jeff Bezos est en tout cas proverbiale : ainsi les cadres voyagent en éco en avion, Amazon ne paie ni le parking ni les repas de ses salariés (comme c’est l’usage dans les sociétés de high-tech américaines) et lorsqu’en 2000, le patron de Walmart invite Bezos pour le rencontrer et le loge dans un motel bas de gamme, le patron d’Amazon trouve l’initiative "géniale"…

4. Une sonnerie qui retentit à chaque commande

Au début du site, en 1995, Jeff Bezos avait fait installer un système d’alerte dans la garage qui servait de locaux au site. A chaque commande passée, une sonnerie retentissait et tout le monde se précipitait devant l’écran de l’ordinateur pour vérifier qu’il ne connaissait pas l’acheteur (au début c’était évidemment les proches qui commandaient sur Amazon). Au bout de quelques semaines, la sonnerie retentissait si souvent qu’on la débrancha.

5. La roublardise de Bezos pour obtenir des prix bas

Obsédé par les prix, Bezos découvre rapidement comment obtenir les prix d’achat de livre les plus bas auprès des éditeurs. Il suffisait de commander 10 livres auprès des éditeurs pour avoir une réduction sur chacun des livres, peu importe que les livres soient en stock ou pas. Du coup il commandait le livre désiré plus neuf livres obscurs épuisés (un livre épuisé sur le lichen par exemple sera commandé des milliers de fois) pour bénéficier de la réduc. Des livres qu’ils ne recevaient jamais mais au moins ils avaient bénéficié de la réduc sur le livre désiré…

6. Quand Amazon voulait racheter eBay

Fin 1999, Jeff Bezos rencontre Pierre Omidyar, le fondateur d’eBay, le seul site qui lui faisait peur à l’époque car contrairement à Amazon, eBay est alors très rentable. Bezos leur laisse entendre qu’il pourrait les racheter pour 600 millions de dollars mais aucune offre formelle n’arrivera jamais chez eBay. Au final Amazon lancera un service d’enchères, Amazon Auctions, qui fera un flop.

7. Harry Potter bradé, le premier gros coup médiatique d’Amazon

Eté 2000, gros coup d’Amazon. Il propose de livrer le tome 4 d’Harry Potter le jour de sa sortie avec un rabais de 40%. Il perd de l’argent sur chacun des 225.000 exemplaires vendus ce jour-là mais c’est un succès retentissent. La presse se fait l’écho des milliers de clients qui attendent le livreur sur le pas de la porte et le nom d’Amazon est cité dans 700 articles de presse qui parlent du nouvel Harry Potter.

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8. Kodak, l’anti-modèle de Bezos

Le patron d'Amazon est influencé par un livre: "The innovator’s dilemna" de Clayton Christensen, prof à Harvard. Sa thèse: ce qui coule les entreprises c’est qu’elles refusent d’aborder de nouveaux marchés susceptibles de saper leur business traditionnel. Par exemple: IBM et son refus de produire des ordinateurs portables ou encore Kodak arc-bouté sur la photo argentique. Et cette dernière est le contre-exemple absolu pour le patron d’Amazon. La société américaine, assise sur la rente de la pellicule, qui a pourtant inventé l’appareil photo numérique dans les années 70, n’a pas eu le courage de tuer sa poule aux œufs d’or. Elle a fini par disparaître. Avec le livre numérique Kindle, Amazon a fait l’exact inverse. Ainsi à Steve Kessel, le responsable de la division numérique du groupe, Bezos a donné un cahier des charges très clair: "Ton job consiste à tuer ton propre business. Je veux que tu agisses comme si ton but était de mettre en faillite tous ceux qui vendent des livres physiques. Amazon compris!" [Propos extrait du livre "Amazon la boutique à tout vendre" de Brad Stone]

9. Ne pas payer d'impôt, une obsession depuis le début 

S’il est bien connu qu’Amazon fait de l’optimisation fiscale en Europe (la Commission européenne enquête toujours sur les accords négociés en 2003 pour l’implantation de sa filiale européenne au Luxembourg), ce qui l’est moins en revanche c’est que cela a toujours fait partie de la stratégie du site américain. Ainsi pourquoi ce financier de Wall-Street qu'est Jeff Bezos décide en 1994 de traverser tous les Etats-Unis pour installer son site de e-commerce à Seattle? Parce que la ville offre de nombreux diplômés en informatique mais surtout parce que les taxes sur les sociétés y sont moins élevées qu'ailleurs! Et depuis tout est organisé en interne pour contourner l’imposition. Ainsi les employés doivent obtenir des autorisations pour aller sur des salons, éviter de faire la promotion du site Amazon, éviter de bloguer, de parler à la presse, de se rendre dans certains Etats très taxés (Texas, Californie…), dire qu’ils travaillent pour la société Amazon Services et non Amazon.com. Toutes ces consignes afin d'éviter que le fisc taxe l’activité d’Amazon dans d’autres Etats que celui de Seattle…

10. Jeff Bezos le patron tyrannique

Si le fondateur d’Amazon est connu aux Etats-Unis pour ses violents éclats de rire, en interne ce sont ses coups de colère qu’on entend le plus souvent retentir dans les couloirs. Et lorsqu’il est agacé, Jeff Bezos, qui n’a rien à envier à Steve Jobs, n’hésite pas à humilier ses équipes. Voilà quelques phrases reprises dans le livre de Brad Stone, restées fameuses en interne.

"Je suis désolé mais ai-je pris mes pilules contre la stupidité aujourd’hui ?"
"Est-ce qu’il faut que j’aille chercher le certificat qui spécifie que je suis le Pdg afin que vous cessiez de me contredire ?"
"Etes-vous paresseux ou juste incompétent ?"
"Il est clair que ce document a été écrit par quelqu’un de l’équipe B. Est-ce que quelqu’un pourrait m’obtenir le document de l’équipe A? Je ne veux pas perdre mon temps."
Frédéric Bianchi