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Après les taxis, l’ubérisation des services vise la livraison de repas

Ces services ne se limitent pas aux pizzas, aux nems, aux sandwichs ou aux burgers. Munchery, une startup américaine, a levé 85 millions de dollars pour livrer à domicile les menus de grands restaurants.

Ces services ne se limitent pas aux pizzas, aux nems, aux sandwichs ou aux burgers. Munchery, une startup américaine, a levé 85 millions de dollars pour livrer à domicile les menus de grands restaurants. - Munchery

Les applis révolutionnent le monde des taxis, mais elles vont aussi le faire pour la livraison des repas. Un secteur où des  Titans comme Uber, Google, Amazon ou Alibaba prennent pied.

Alors que les taxis se désespèrent de voir une part de leur activité passer aux mains des chauffeurs d'Uber, un autre secteur lié au transport est en passe de vivre la même révolution. Enfin, presque puisque cette fois, il n’y a pas de lutte entre anciens et nouveaux. Il s’agit de la livraison de repas [Food Delivery, en anglais] soit le midi au bureau, soit le soir à la maison. Dans le monde entier, ce business du O2O (Online to Offline) qui est le trait d'union entre les économies numériques et physiques, attire les start-up autant que les groupes les plus puissants de la planète. 

Uber a lancé cette activité à New York, Los Angeles et Chicago sous le nom d’Uber Eats. En Espagne, il a même transformé le service UberPop, interdit par la justice, pour en faire Uber Fresh. Le principe est de livrer en 10 minutes un repas préparé par un restaurant. Pour bénéficier de ce service, le restaurateur verse un pourcentage de l’addition. Et pour porter les repas, tous ceux qui disposent des moyens de se déplacer sur de courtes distances (des rollers à la voiture en passant par la trottinette ou le vélo) peuvent arrondir leur fin de mois en devenant des livreurs occasionnels. 

"Uber a créé une plateforme technique et des algorithmes qui ne servent pas seulement à transporter des personnes. Ils peuvent attaquer tous les marchés de la mobilité", précise Charles-Antoine Schwerer, économistes pour le cabinet Asterès. "On oublie parfois que cette entreprise n’est pas spécialisée dans les VTC. Sa spécialité, c’est la mobilité."

Si Uber se lance en force sur le Food Delivery, il n’est ni le seul, ni le premier. Ces services existent depuis longtemps mais de manière artisanale ou presque. Désormais, le potentiel économique de l’activité attire les entreprises de toutes tailles. Aux Etats-Unis, Google et Amazon testent aussi la livraison de repas. En Asie, cette activité donne lieu également à un combat de titan. Elle oppose Alibaba et Tencent qui s’affrontent à coup de centaines de millions d’euros pour s’imposer dans ce marché promis à un bel avenir. 

"Tous ces groupes ont une approche trans-sectorielle de l’économie, ajoute Charles-Antoine Schwerer. Google est partie d’un moteur de recherche et aujourd’hui, avec les données dont il dispose, il se lance dans l’automobile, la robotique ou la recherche sur le génome."

L'Europe est prête à concurrencer les géants américains

Et l’Europe n’est pas en reste. Discrètement mais surement, ces services se développent avec des investissements qui n’ont rien de timide. Début juin 2015, l’allemand Delivery Hero a réalisé une nouvelle levée de fonds de 110 millions d’euros auprès d’investisseurs américain. Cette entreprise est désormais valorisée à 2,8 milliards d’euros. Elle couvre déjà 34 pays et traite déjà 10 millions de commandes chaque mois. 

En France aussi, cette tendance s’affirme avec déjà plusieurs spécialistes de la livraison de repas comme FoodChéri, AlloResto, ChronoResto, Livraison Resto ou Resto-In. Le leader est AlloResto, une enseigne fondée par Sébastien Forest qui s'est lancée en… 1998. Sa carte se compose de celles de plus de 3.500 restaurateurs français qui en plus du service en salle et au bar développent les services à domicile. Certains ont même décidé d’ouvrir les soirs de fermeture, mais seulement via l’appli. C’est dire si le jeu en vaut la chandelle. Selon le cabinet Xerfi, avec les plateaux repas, le secteur de la restauration pourrait faire progresser son chiffre d’affaires de 6%. 

Ces services s’arrêteront-ils aux pizzas, aux nems, aux sandwichs ou aux burgers? Rien n’est moins sûr. Munchery, une start-up américaine, a levé 85 millions de dollars auprès de SherpaVentures et Menlo Ventures pour livrer à domicile les menus de grands restaurants. Elle a démarré en 2014 aux Etats-Unis, mais se prépare à se lancer en Europe. Les chefs étoilés français cèderont-ils un jour à ce nouveau marché ?

Pascal Samama