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Areva n'est pas (encore) vouée au démantèlement

L'activité nucléaire d'Areva lui rapporte 40% de son chiffre d'affaires.

L'activité nucléaire d'Areva lui rapporte 40% de son chiffre d'affaires. - PHILIPPE DESMAZES - AFP

Le ministère de l'Economie assure que la vente des activités d'ingénierie d'Areva à EDF n'est pas la seule option à l'étude, et promet qu'en dernier recours, l'Etat assumera son rôle d'actionnaire majoritaire.

Le démantèlement d'Areva n'est pas la seule alternative pour sortir le groupe de l'ornière. Bercy l'a confirmé à BFM Business mardi soir. Les services du ministère de l'Economie étudient encore l'ensemble des scénarios. En parallèle, EDF a avancé ses pions. 

Jean-Bernard Levy, le PDG du groupe, propose de racheter l'ensemble de l'activité réacteur du groupe nucléaire. Une activité d'ingénierie qui représente 40% du chiffre d'affaires d'Areva. Cela reviendrait à démanteler le modèle intégré auquel tenait farouchement l'ex-patronne du groupe français de l'atome, Anne Lauvergeon. Il ne resterait alors que l'ex-Framatome, qui se bornait à gérer l'approvisionnement en combustible et le traitement des déchets. En somme, l'amont et l'aval de l'activité nucléaire à proprement parler.

Bercy a refusé de dévoiler les options à l'étude. Reste qu'une recapitalisation d'Areva permettrait certainement de maintenir l'ensemble. On se borne à répéter que l'objectif est de sauver le groupe, et que la question industrielle est celle à laquelle le ministère veut répondre en priorité. La question financière viendra ensuite. Le ministre a martelé qu'en dernier recours, l'Etat serait là et jouerait à plein son rôle d'actionnaire dans une entreprise dont il détient, directement et indirectement, près de 87% du capital.

Un meneur pour l'équipe de France du nucléaire 

Pour rappel, les enjeux financiers sont colossaux: Areva a déclaré en 2014 une perte de quasiment 5 milliards d'euros. Reste que, si le Japon, dont les centrales sont à l'arrêt depuis le drame de Fukushima, les rallume, l'activité peut repartir très vite. Et dans le monde entier, l'excellence française en matière de nucléaire et en sa capacité à exporter son savoir-faire, reste indiscutable. Mais pour aller chercher de nouveaux marchés, il faut un meneur.

C'est exactement le rôle qu'a endossé EDF mardi. Le groupe a indiqué qu'il déposerait une offre formelle dans les prochains jours. Reste à savoir à quel prix. C'est la question sensible. Les actionnaires d'un EDF déjà très fortement endetté s'irritent à ce sujet. Voilà pourquoi Jean-Bernard Lévy a tenu à ménager les esprits. Dans une interview donnée mardi au Figaro, il a déclaré que "la transaction ne peut se faire qu'à un prix de marché". Et rebelote lors de l'assemblée générale du groupe: si l'opération se fait, ce sera au "juste prix", martèle le PDG. 

Dans les comptes d'Areva, la filière réacteur est valorisée à 2,7 milliards d'euros. Un montant à priori trop élevé pour EDF, même si l'investissement serait quasi-indolore, car financé par des cessions d'actifs.

EDF ne veut pas de l'EPR finlandais

Outre les négociations sur le prix, EDF pose de sérieuses conditions à cette opération, notamment liées au "passif" d'Areva Nuclear Power, c'est-à-dire l'ensemble des dettes accumulées par la filiale, tout particulièrement à cause de l'EPR finlandais, dont la construction a pris un retard considérable, plombant sévèrement les finances du groupe et faisait peser de gros risques juridiques sur lui.

EDF ne veut en aucun cas assumer les risques associés à ce passé. Sur ce dossier, l'Etat pourrait intervenir. En tant qu'actionnaire majoritaire, il pourrait se porter garant sur l'ensemble des dettes du pôle réacteur. C'est sur cette question que l'exécutif va devoir se prononcer dans les prochains jours.

Areva devrait ainsi rester dans l'incertitude jusqu'au début du mois de juin au moins, le 3 juin exactement. Une réunion est programmée à l'Elysée à cette date, d'où sortira sans doute la recomposition du groupe nucléaire. 

Sidonie Watrigant, édité par N.G.