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Arnaud Lagardère contre-attaque et renforce son emprise à la tête de son groupe

Arnaud Lagardère

Arnaud Lagardère - AFP

Le groupe Lagardère a annoncé lundi soir le renouvellement pour quatre années du mandat de gérant d'Arnaud Lagardère et une réorganisation de sa gouvernance.

Le jeu de poker menteur autour du groupe Lagardère s'est poursuivi lundi soir, avec le renouvellement anticipé du mandat de gérant d'Arnaud Lagardère, moins d'une semaine après l'annonce d'une alliance entre Vivendi et Amber Capital pour tenter de l'affaiblir. "Le conseil de surveillance a approuvé le renouvellement du mandat de gérant de Monsieur Arnaud Lagardère pour une durée de quatre ans à compter du 17 août 2020", écrit le groupe dans son communiqué. Une durée cependant inhabituelle, puisque les renouvellements précédents se faisaient sur une période de six ans.

La décision intervient moins d'une semaine après la formation d'une alliance entre les deux premiers actionnaires du groupe, Vivendi et le fonds d'investissement Amber Capital, afin de demander quatre sièges au conseil d'administration de Lagardère et la convocation d'une assemblée générale à la rentrée. Il s'agissait pour les deux premiers actionnaires de renforcer leur position en vue du renouvellement du mandat de gérant d'Arnaud Lagardère, initialement prévu au premier trimestre 2021. Interrogés par l'AFP, ni Amber Capital ni Vivendi n'ont réagi lundi dans la soirée.

Dans son communiqué, Lagardère justifie son choix par la nécessité de "stabiliser la gouvernance du groupe dans une période inédite". Lagardère a vu ses résultats semestriels fortement dégradés à cause de la crise provoquée par la pandémie de coronavirus, plongeant dans le rouge sur la première moitié de l'année, notamment du fait d'un effondrement de son activité Travel Retail, qui concerne la distribution dans les lieux de transport (gares et aéroports).

Un "conseil de gérance"

Parallèlement au renouvellement du mandat de son gérant, le groupe met en place un "conseil de gérance" composé des cinq membres du conseil exécutif ainsi que des deux dirigeants de Lagardère Publishing et Lagardère Travel Retail. La direction a également présenté une "feuille de route stratégique" afin de faire face à la crise. Elle passe par une "adaptation du modèle concessif pour gagner en agilité et en flexibilité" concernant Travel Retail, et une attitude offensive du côté de l'édition, pour laquelle le groupe compte profiter des "nombreuses opportunités de consolidation à court terme".

Ce renforcement de la gérance apparaît comme une réponse au pacte annoncé le 11 août par Vivendi et Amber Capital, qui détiennent respectivement 23,5% et 20% du capital de Lagardère et souhaitaient entamer des démarches afin d'avoir au conseil de surveillance une représentation minoritaire, de trois membres pour Amber Capital et un membre pour Vivendi. Amber Capital n'a cessé de répéter sa volonté de "solliciter la nomination d'un ou de plusieurs membres au conseil de surveillance", et d'oeuvrer pour la transformation en société anonyme de Lagardère, actuellement sous statut de commandite par action.

Ce statut atypique permet au patron et héritier de l'entreprise, Arnaud Lagardère (associé-commandité), de conserver le contrôle avec seulement quelque 7% du capital. En contrepartie, il est responsable indéfiniment des dettes de l'entreprise sur ses biens propres. Vivendi de son côté, initialement entré au capital du groupe, à hauteur de 10%, pour sauver la mise d'Arnaud Lagardère face à Amber lors de l'assemblée générale de mai dernier, a renforcé sa position au fil de l'été et s'est rapproché peu à peu du fonds.

Influence de Bernard Arnault

L'alliance entre Amber et Vivendi était officiellement motivée par "les très mauvais résultats" financiers du groupe Lagardère. Elle permettait cependant dans le même temps de renforcer mutuellement les deux acteurs face à l'influence de Bernard Arnault, le milliardaire à la tête du groupe de luxe LVMH. Ce dernier avait annoncé fin mai venir éponger une partie des dettes d'Arnaud Lagardère contre 25% des parts de la holding personnelle de l'héritier.

Cette arrivée surprise avait remis en cause l'espoir de plusieurs actionnaires de voir les choses évoluer rapidement au sein de la gouvernance, et permet à Bernard Arnault de devenir incontournable pour toute décision stratégique touchant aux activités de Lagardère SCA, notamment des cessions d'actifs.

J. B. avec AFP