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Transports

Augmentation des salaires: le PDG d'Air France-KLM affirme qu'il ne peut pas faire plus

Le patron d'Air France-KLM ne veut pas "sacrifier l'avenir d'Air France".

Le patron d'Air France-KLM ne veut pas "sacrifier l'avenir d'Air France". - Eric Piermont - AFP

Onze syndicats d'Air France ont appelé à de nouvelles journées de grève pour exiger de nouveau une augmentation générale des salaires de 6%. Jean-Marc Janaillac, patron d'Air France-KLM, leur répond qu'il ne peut pas "aller plus loin" que ce qui a été proposé.

La direction d'Air France ne peut "pas aller plus loin" que ce qui a déjà été proposé aux syndicats en terme de rémunération, affirme dans le JDD le PDG du groupe, en butte à un mouvement de grève. "Nous avons fait des propositions réalistes pour éviter ce mouvement de grève et le dialogue doit se poursuivre pour trouver une issue", déclare dans cet entretien Jean-Marc Janaillac, patron d'Air France-KLM.

"Je comprends le sentiment d'injustice des salariés qui ont fait des efforts alors même que ce qui pèse sur Air France, charges et taxes, n'a pas évolué. Mais je le regrette vis-à-vis de nos passagers et de nos salariés", ajoute le PDG. Selon Jean-Marc Janaillac, la direction de la compagnie a déjà proposé aux personnels "une mesure d'augmentation générale, le doublement de l'intéressement et une compensation de perte de pouvoir d'achat pour les salariés concernés".

"Je ne veux pas sacrifier l'avenir d'Air France"

"Nous ne pouvons pas aller plus loin. Je ne veux pas sacrifier l'avenir d'Air France en mettant en péril nos atouts. Nous avons accumulé trop de retard par rapport à nos concurrents", conclut le dirigeant d'entreprise.

Onze syndicats d'Air France, tous métiers confondus, ont appelé à de nouvelles journées de grève les vendredi 23 et 30 mars, pour exiger de nouveau une augmentation générale des salaires de 6%. Une précédente journée de grève, le 22 février, avait conduit à l'annulation d'un quart des vols.

Assises nationales du transport aérien

Ces grèves ont lieu alors que s'ouvre, mardi 20 mars, les Assises nationales du transport aérien. Ces Assises doivent permettre de faire émerger les idées, initiatives et propositions, en vue de la préparation d'une stratégie nationale du transport aérien. Elles seront lancées par la ministre des Transports Élisabeth Borne, déjà en première ligne dans la tentative de réforme de la SNCF, et s'étaleront sur six mois à travers des colloques, séminaires, ateliers, groupes de travail à Paris et en région avec pour angle "la performance collective". "Le diagnostic du déclin du pavillon français est clairement établi", commente le président de la Fédération nationale de l'aviation marchande (Fnam) Alain Battisti.

Depuis une dizaine d'années, "90% de la croissance du nombre de passagers transportés a été captée par des acteurs étrangers", ajoute-t-il. Et en dépit de la hausse constante du trafic, la part de marché des compagnies françaises "diminue d'un point par an depuis 20 ans", selon le ministère. Les professionnels attendent, explique Alain Battisti, "des mesures concrètes" sur le plan fiscal et budgétaire, mais aussi une simplification dans les superpositions de règles nationales et européennes.

L'érosion de la rentabilité du secteur en France a débuté avec l'arrivée des low cost comme Ryanair ou easyJet qui ont raflé d'importantes parts de marché sur les liaisons point à point, sans passer par une plateforme de connexion ("hub"). Au début des années 2000, c'est au tour des compagnies du Golfe de faire irruption dans le ciel européen. A travers leurs puissants "hubs" sur la route de l'Asie, et avec des prix plus attractifs grâce à des coûts de fonctionnement plus faibles, elles ont mis la main sur les lignes entre le Vieux continent et l'Orient. Et enfin, depuis deux ans, les compagnies classiques sont attaquées par de nouveaux arrivants ayant réussi à adapter le modèle low cost aux contraintes des longues distances, rognant des parts de marché sur les liaisons transatlantiques.

Des conditions bien plus favorables

Mais le danger réside aussi au sein même de l'Union européenne où, selon les acteurs français, leurs concurrents bénéficient de conditions bien plus favorables. Signe de cette inadaptation de l'écosystème français, selon l'Union des aéroports français (UAF): la croissance du trafic des aéroports français a été en 2017 inférieure de 2 points à la moyenne européenne qui s'est établie à 7,7%. "Il y a un aspect fiscal très important", souligne le président de l'organisation, Thomas Juin, citant les écarts de taxes avec les pays voisins comme l'Angleterre, l'Allemagne, l'Espagne ou l'Italie.

Pourtant, paradoxalement, les planètes sont alignées dans le ciel du transport aérien: les touristes étrangers reviennent en France après deux années difficiles -2015 et 2016- marquées par les attentats, le prix du pétrole reste favorable et le marché intérieur s'avère dynamique.

"Nos compagnies aériennes ont tardé à se réformer"

Air France, revenue dans le vert en 2015 après sept années de traversée du désert, a affiché pour 2017 de bons résultats, mais inférieurs à ses concurrents européens. "Le pavillon français est en recul parce que nos compagnies aériennes ont tardé à se réformer et parce que notre environnement fiscal, social et réglementaire est trop pesant", a déclaré le PDG d'Air France-KLM Jean-Marc Janaillac dimanche au JDD.

"Le différentiel annuel de charges d'Air France par rapport à ses concurrents européens est de plusieurs centaines de millions d'euros", affirme Jean-Marc Janaillac, qui dans le passé a évoqué le fort décalage avec l'allemand Lufthansa, l'un de ses principaux rivaux avec IAG, la maison-mère des compagnies espagnoles Iberia et Vueling, britannique British Airways et irlandaise Aer Lingus.Il préconise aussi la mise en place d'un "instrument de défense commerciale en Europe pour préserver les compagnies européennes de la concurrence déloyale de pays, comme ceux du Golfe, qui n'ont pas les mêmes règles que nous".

D. L. avec AFP