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Avion de combat européen: quelles conséquences pour Dassault et Airbus?

Le Rafale de Dassault, ici en photo, est actuellement en concurrence avec l'Eurofighter d'Airbus

Le Rafale de Dassault, ici en photo, est actuellement en concurrence avec l'Eurofighter d'Airbus - Éric Piermont - AFP

Paris et Berlin ont annoncé ce jeudi le développement futur d'un avion de combat commun. Un projet encore embryonnaire qui ne devrait toutefois pas remettre en cause la rivalité entre l'Eurofighter d'Airbus et le Rafale de Dassault.

En lançant jeudi le projet d'un avion de combat commun, Paris et Berlin impriment leur marque politique sur les perspectives de défense européenne, mais ne remettent pas en cause la rivalité actuelle entre le Rafale français de Dassault et l'Eurofighter transnational d'Airbus.

L'Élysée a annoncé jeudi que la France et l'Allemagne avaient décidé de développer un avion de combat "européen", destiner à remplacer leurs flottes actuelles respectives.

L'annonce, faite à l'issue d'un Conseil des ministres franco-allemand, marque une rupture avec la situation actuelle, dans laquelle Paris et Berlin ont chacune suivi leur voie en la matière, même si les deux capitales collaborent déjà dans d'autres domaines de défense comme les drones de renseignement.

La rivalité Rafale - Eurofighter

"La France et l'Allemagne ont très peu coopéré dans l'aéronautique: la France était partie sur le Rafale en solo et l'Allemagne sur l'Eurofighter", rappelle Massi Begous, spécialiste de l'aéronautique au cabinet Roland Berger.

De fait, le paysage européen est dominé par deux modèles concurrents d'avions de combat, mis en service dans les années 2000: le Rafale de Dassault Aviation, un projet exclusivement français, et l'Eurofighter d'Airbus, développé en commun entre l'Allemagne, l'Espagne, le Royaume-Uni et l'Italie.

Contactés par l'AFP, Airbus comme Dassault s'abstenaient de commenter dans l'immédiat ce qui n'est pour l'heure qu'au stade de la déclaration d'intention par Paris et Berlin.

Une échéance lointaine

Mais, au sein du secteur, certains acteurs ne cachent pas leur satisfaction, jugeant logique que l'échelon transnational devienne la règle pour les futurs avions de combats européens.

Reste que "ce dont on parle, ce n'est pas clair: est-ce que l'on parle de remplacer les Eurofighter et les Rafale ?", ce qui représenterait une échéance très lointaine, s'est interrogé Massi Begous.

L'Allemagne est confrontée à des considérations plus pressantes puisqu'elle cherche à remplacer sa flotte vieillissante de Tornado, un avion en service depuis les années 1980.

En mars, Airbus avait dit travailler sur le sujet et prévenait déjà que le projet ne pourrait aboutir que "dans le cadre d'une étroite collaboration européenne", sous la férule de la France et de l'Allemagne.

"Révolution profonde"

Mais il n'est pas avéré que ce soit ce qu'aient en tête la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Emmanuel Macron. Le chef d'Etat a évoqué jeudi une "révolution profonde" en ne faisant que tracer de grandes lignes, l'Élysée précisant qu'une feuille de route serait établie d'ici la mi-2018.

Pour Stéphane Albernhe, président du cabinet spécialisé Archery Strategy Consulting, les enjeux sont clairs: "ils ne touchent pas aux projets actuels".

Autrement dit, cette coopération annoncée ne va guère changer la donne dans l'immédiat, le calendrier s'écrivant plutôt en décennies.

"L'Eurofighter, c'est une mise en service en 2004, la durée de vie c'est 40 ou 50 ans... On est sûr de la stratégie à cycle très long", souligne Stéphane Albernhe. "Ce sera très certainement un avion de combat sans pilote".

L'Europe de la Défense qui progresse

En attendant d'en démêler les conséquences pour le secteur aéronautique, c'est avant tout sur le plan politique que s'inscrit cette annonce, par laquelle Paris et Berlin se placent en première ligne dans le concept souvent flou de défense européenne.

"Des accords bilatéraux entre deux, trois, quatre pays, ça marche, ça a déjà existé... Mais, là, c'est pour dire 'la France et l'Allemagne, on va être la locomotive'", juge Stéphane Albernhe.

"Ce qui est sous-entendu entre les lignes, c'est 'L'Europe de la défense progressera si le binôme franco-allemand est fort", a-t-il conclu, jugeant illusoire d'envisager des projets de ce type impliquant l'ensemble des pays de l'Union européenne.

J.M. avec AFP