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Bien-être au travail: et si votre entreprise recrutait des abeilles?

La récolte du miel devient un moment de teambuidling.

La récolte du miel devient un moment de teambuidling. - Eric Feferberg- AFP

Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à vouloir accueillir des ruches. Pour soutenir la biodiversité? Pas uniquement. Les abeilles ont aussi un rôle à jouer dans le bien-être des salariés et la cohésion des équipes.

Au lieu du panier garni d'un foie gras et d'un vin moelleux traditionnellement offert en fin d'année, certains employeurs font désormais le choix de donner du miel à leurs collaborateurs. Mais pas n'importe lequel: celui qui est tout droit sorti des ruches installées sur les toits de la société. C'est une tendance qui progresse chaque année.

"Les ruches servent de support de sensibilisation, elles ont une visée pédagogique. Il s'agit d'attirer l'attention sur la fragilité du sort des abeilles et la nécessité de sauvegarder la biodiversité", explique Henri Clément, porte-parole de l'Unaf (Union nationale de l'Apiculture française), qui revendique être à l'origine de ce mouvement de conquête des abeilles en ville, grâce à son opération "abeille sentinelle" lancée en 2005. Au départ, ce sont les collectivités territoriales et les entreprises œuvrant autour de l'écologie qui ont été les plus réactives et ont accueilli les premières ruches.

Fédérer les équipes autour d'un projet original

Mais en un peu plus d'une décennie, les ruches ont conquis du terrain. Des apiculteurs proposent la location de ruches aux entreprises, dont les attentes vont au-delà des préoccupations environnementales. "Pour les services des ressources humaines, il s'agit de créer du lien et de fédérer ses équipes autour d'un projet original qui n'a rien à voir avec leur secteur d'activité," met en avant Sylvain Breuvart, fondateur de Beecity, qui a installé plus de deux cents ruches en milieu urbain dans les Hauts-de-France. "La présence des ruches permet de valoriser leur image, de travailler sur leur marque employeur", ajoute-t-il.

Car les apiculteurs ne se contentent pas d'installer des ruches sur le toit des entreprises, ils mettent en scène chacune de leurs visites et incitent les entreprises à communiquer sur leur présence, en interne comme en externe. "L'objectif est de faire entrer la ruche dans la vie de l'entreprise: on installe des caméras à proximité et une balance mesure l'évolution du poids de miel. Un écran est installé à l'accueil des sociétés pour que chaque salarié puisse y jeter un œil lors de ses allées et venues", détaille Ronan de Kervénoaël, qui depuis cinq ans propose ses services de location de ruches au travers d'Apiterra. Il a même pris soin de développer une application qui annonce les visites des apiculteurs et donne des conseils sur l'entretien des ruches. Une communauté a aussi été créée sur Facebook.

Les salariés ont inventé les "pauses abeilles"

Pour sa part, Sylvain Breuvart a constaté l'apparition d'une tradition parmi les salariés: la "pause abeille". Ses entreprises clientes ayant de l'espace, le PDG de Beecity n'utilise pas les toits des bâtiments, mais leurs abords pour installer ses ruches. Les salariés y ont donc facilement accès et rendent régulièrement visite aux abeilles quand ils ont envie de se détendre. Les abeilles sont donc aussi des facteurs de bien-être.

Certaines entreprises jouent à fond la carte du teambuilding et organisent des ateliers autour des ruches pour permettre aux salariés de se connaître davantage afin de mieux travailler ensemble. La récolte du miel, en juin, en est le point d'orgue. "On peut facilement établir des parallèles entre l'organisation de la ruche et celle du monde du travail, mettre en avant leur système de communication très abouti, leur réactivité", fait valoir Sylvain Breuvart. D'autres font le choix d'ouvrir les ateliers aux familles des salariés, là encore pour créer ou renforcer le lien.

Des vocations sont nées chez les salariés

Les ruches fournissent entre 15 et 20 kilos par an. L'apiculteur se charge d'analyser le miel pour qu'il corresponde aux normes sanitaires avant de le mettre en pot avec le logo de la société.

Dans les faits, toutes les entreprises peuvent avoir leurs ruches, à la condition de les déclarer auprès de la DDPP (direction départementale de la protection des populations). Il faut aussi que le toit soit sécurisé et facilement accessible pour transporter le matériel et effectuer des visites.

Pas de souci à se faire pour les abeilles, elles trouvent tout ce dont elles ont besoin en ville grâce à la diversité des fleurs plantées dans les jardins, parcs et balcons. Quand cela est possible, les entreprises peuvent aussi aménager leurs parterres pour satisfaire l'appétit de leurs hôtes. Les entreprises doivent disposer d'un budget d'environ 1500 à 2000 euros par an pour accueillir 2 ruches.

Si les professionnels sont unanimes pour dire que l'implantation des ruches en ville ne va pas sauver l'apiculture, cette démarche a en tout cas permis d'ouvrir les yeux du grand public à la nécessité de préserver les abeilles et leur environnement. "Cela génère des vocations. Alors que le nombre d'apiculteurs était en recul depuis des années, 2005 a marqué un point de rupture. Les gens sont revenus vers les ruchers écoles. À tel point qu'il y a souvent des listes d'attente maintenant", s'enthousiasme le porte-parole de l'Unaf.

Coralie Cathelinais