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Transports

Brexit: faute d'accord, l'industrie automobile risque un "séisme"

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Pour une industrie fonctionnant le plus souvent à flux tendus, une sortie chaotique de l’UE porterait un coup sévère aux chaînes d’approvisionnement, préviennent plusieurs constructeurs. Sans parler d'éventuels droits de douane.

Avec l’agroalimentaire, le secteur automobile est certainement le plus exposé à un Brexit sans accord, un scénario du pire qui se dessine de plus en plus sérieusement. Et les constructeurs commencent à s'affoler, évoquant un risque de "séisme".

"Le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne sans accord déclencherait un séisme pour les conditions commerciales, avec des milliards d'euros de taxes risquant d'affecter le choix des consommateurs des deux côtés de la Manche", estiment l'Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), celle des sous-traitants (CLEPA) et 21 associations nationales dans un communiqué conjoint.

"Le Brexit n'est pas seulement un problème britannique, nous sommes tous concernés dans l'industrie automobile européenne, et même au-delà," a déclaré Christian Peugeot, président du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA), cité dans le communiqué.

Flambée des coûts de stockage

Un Brexit chaotique porterait un coup "sévère" aux chaînes d'approvisionnement à flux tendus qui s'étendent au-delà des frontières nationales, ont averti les associations.

Les industries automobiles de l'Union et du Royaume-Uni "ont besoin d'un commerce sans heurts et seraient gravement pénalisées par des taxes et charges administratives pesant sur les pièces détachées et les véhicules", a estimé Bernhard Mattes, président de l'association de l'industrie automobile allemande (VDA). 

"Chaque jour, 1.100 camions européens traversent la Manche pour livrer des voitures et des moteurs au Royaume-Uni. Après le Brexit, même de courts délais à la douane entraîneront d'énormes problèmes logistiques, perturbant le processus de production et générant des coûts importants", s'inquiétait déjà l'association il y a près d’un an.

Selon l'Association, les constructeurs sont en pleine chasse aux espaces et entrepôts pour y stocker des pièces détachées, en prévision des perturbations d'approvisionnement.

Mais tout cela a un coût, et l'addition s'annonce d'ores et déjà salée. "L'espace nécessaire pour stocker pendant plus qu'une courte période serait absolument énorme et coûteux", estime l'association, et affecterait durablement les comptes des fabricants de voitures.

Un surcoût lié aux droits de douane de 5,7 milliards d’euros

Par ailleurs, les associations de constructeurs européens évaluent le surcoût lié aux droits de douane supplémentaires en cas de Brexit désordonné à quelque 5,7 milliards d'euros. En effet, si un "No Deal Brexit" intervient, les règles classiques de l'OMC s'appliqueront, et une taxe de 10% supplémentaire sera appliquée à chaque véhicule échangé entre Union Européenne et Royaume Uni. L'ensemble de ces surcoûts va donc devoir être répercuté aux clients... ou absorbé par les constructeurs.

Des géants de l'automobile comme l'allemand BMW, le français PSA et le japonais Nissan possèdent actuellement des usines en Grande-Bretagne, dont l'avenir semble compromis en cas d'un "no deal".

D’ailleurs, le patron de PSA, Carlos Tavares, avait prévenu en juillet que le constructeur était prêt à fermer l’usine britannique de Ellsmere Port et transférer l’activité en Europe continentale si le Brexit tournait mal. Fin juin, PSA avait déjà lancé un sévère avertissement en prévenant qu’il fabriquerait sa nouvelle Astra dans cette usine du nord-ouest de l’Angleterre seulement en cas d’accord sur le Brexit.

De son côté, BMW a indiqué début septembre qu’il allait arrêter deux jours son usine britannique d’Oxford autour de la date prévue pour le Brexit, soit le 31 octobre, illustrant la pagaille prévisible dans le secteur autour de cette échéance. Et Nissan avait fait savoir dès mars qu’il allait cesser de produire ses modèles de luxe Infiniti dans son usine à Sunderland dans le nord-est de l’Angleterre.

Les investissements dans l’industrie automobile britannique ont déjà subi un inquiétant coup d’arrêt au premier semestre en raison des incertitudes du Brexit. Entre janvier et juin, les nouveaux investissements annoncés ont fondu à 90 millions de livres (98,2 millions d’euros), soit une chute de 70 %.

OC avec AFP