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Canal Plus prépare des offres triple play

Pour se lancer dans l'ADSL, Canal devra faire affaire avec un fournisseur d'accès existant

Pour se lancer dans l'ADSL, Canal devra faire affaire avec un fournisseur d'accès existant - -

La chaîne cryptée a mené un sondage sur sa propre offre combinant télévision, téléphone et Internet.

Canal Plus pourrait bientôt proposer ses offres triple play. En tous cas, la chaîne cryptée s'y prépare activement. Comme l'ont révélé Univers Freebox et Satellifax, elle a mené avec BVA un sondage sur différentes offres combinant télévision, téléphone et ADSL.

En pratique, les offres testées visent essentiellement à utiliser comme box le décodeur de Canal Plus, baptisé "le Cube". Pour la chaîne cryptée, l'intérêt est évident: elle pourra ainsi mettre dans sa poche le juteux prix de location de cette box (le sondage parle de six euros par mois), comme elle le fait déjà pour ses abonnés via satellite ou hertzien. Rappelons que dans les offres ADSL actuelles, le produit de la location de la box va entièrement dans la poche du fournisseur d'accès, ce qui fait que, vu de Canal, les abonnés ADSL sont bien moins rentables que les abonnés satellite ou hertziens.

Acheter la paix

Offrir ses propres offres triple play permettrait aussi à Canal Plus de recruter lui-même ses clients en ADSL, en ne passant plus par les fournisseurs d'accès, et donc en ne leur versant plus de généreuses commissions pour le recrutement d'abonnés.

Ces commissions finissent par peser lourd: elles sont passées de 28 millions d'euros en 2007 à 95 millions en 2011, et 130 millions en 2012. Free a lui seul avait touché un minimum garanti de 16 millions d'euros pour 2009 et 2010.

Toutefois, ces généreuses commissions ont permis d'acheter la paix: aucun fournisseur d'accès n'entend plus aujourd'hui concurrencer frontalement Canal dans la TV payante. Résultat: même le gendarme des télécoms, l'Arcep, autrefois très critique vis-à-vis de Canal, juge désormais que la valeur est équitablement partagée entre la chaîne cryptée et les télécoms, et donc déconseille de bouleverser cet équilibre (cf. encadré ci-dessous).

Pas de problème concurrentiel

Si les offres triple play de Canal seraient plutôt une bonne affaire pour la chaîne cryptée, elles le seraient nettement moins pour les fournisseurs d'accès.

Toutefois, la filiale de Vivendi ne possédant pas de réseau ADSL, elle devra utiliser celui d'un fournisseur existant. Selon des sources industrielles, elle a donc approché en ce sens ces derniers mois plusieurs opérateurs. On ne connaît pas le résultat des courses, mais les visuels du sondage correspondent aux offres de SFR. Ce qui serait assez logique, les deux sociétés appartenant toutes deux au groupe Vivendi... même si, historiquement, leurs rapports étaient distendus, voire mauvais.

Enfin, de telles offres ne semblent pas poser de problème d'un point de vue concurrentiel. Certes, lors du rachat de Neuf par SFR en 2008, Canal avait dû s'engager à ne pas favoriser SFR par rapport aux autres fournisseurs d'accès (cf. ci-contre). Toutefois, cet engagement ne durait que quatre ans, et a donc expiré en début d'année. Enfin, l'Autorité de la concurrence a imposé d'autres obligations à Canal en juillet, mais aucune ne concerne ce point.

Rappelons qu'en Grande-Bretagne, le bouquet BSkyB avait racheté en 2006 Easynet, et est ainsi devenu un des principaux fournisseurs d'accès du pays.

Interrogé, Canal Plus n'a pas répondu à nos questions.

Le titre de l'encadré ici

|||La nouvelle doctrine de l'Arcep "La diffusion des services de Groupe Canal Plus est source d’importants revenus pour les fournisseurs d'accès. Actuellement, les fournisseurs d'accès parviennent donc à obtenir une partie de la valeur captée par les offres du groupe Canal Plus en étant des prestataires de ce dernier. Plus de la moitié des nouveaux abonnements aux bouquets du groupe Canal Plus s’effectuaient, en 2011, sur les plateformes ADSL. Partant, la marge de négociation des fournisseurs d'accès face au groupe Canal Plus semble non seulement être, à ce jour, raisonnable, mais pourrait aller en s’élargissant, compte-tenu de la tendance à la baisse des souscriptions aux offres Canal Plus par satellite. Le partage de la valeur entre les fournisseurs d'accès et le groupe Canal+ est aujourd'hui globalement équilibré. [Les mesures adoptées par l'Autorité de la concurrence doivent donc] garantir de ne pas bouleverser l’équilibre global du partage de la valeur avec les fournisseurs d'accès. Il convient de garantir l’existence d’un modèle dans lequel les opérateurs télécoms se concentrent sur leur métier et leur expertise, sans devoir nécessairement devenir acteurs du marché de la télévision payante. Des mesures trop intrusives ou trop complexes à mettre en oeuvre pourraient durablement déstabiliser un équilibre probablement perfectible mais aujourd’hui globalement satisfaisant" (extrait de l'avis de l'Arcep rendu à l'Autorité de la concurrence sur le rachat de TPS).

Jamal Henni