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Carlos Ghosn se dit « accusé à tort »

Carlos Ghosn lors de sa comparution publique à Tokyo

Carlos Ghosn lors de sa comparution publique à Tokyo - JIJI PRESS / AFP

Carlos Ghosn rejette pour la première fois publiquement les accusations qui pèsent contre lui

Carlos Ghosn, a pu pour la première fois se défendre publiquement et dit avoir été « accusé à tort et détenu de manière injuste », lors de sa première comparution devant le Tribunal de District de Tokyo.

Vêtu d'un costume sombre, sans cravate, il est apparu amaigri, menotté, avec une corde autour de la taille, procédure japonaise classique censée éviter tout risque de fuite. Malgré tout, les observateurs présents ont décrit un homme pugnace, à la voix claire et forte.

Mise en cause directe de Nissan

Rappelant avoir consacré « deux décennies de sa vie à relever Nissan et bâtir l'alliance », une entreprise qu'il dit aimer sincèrement, M. Ghosn a dit « avoir agi honorablement, légalement et avec la connaissance et l'approbation des dirigeants de la compagnie», selon une déclaration écrite.

Une dernière phrase particulièrement importante, Nissan étant aussi inculpé, et l'implication de la compagnie dans le scandale la fragilise dans les négociations actuelles au sein de l'Alliance. D'ailleurs, dans le même temps, Nissan déclarait qu’une « enquête interne avait permis de mettre au jour des preuves substantielles et convaincantes de fautes commises par son ancien président » .

Portée symbolique forte

Le juge a justifié de son côté son maintien en détention par un risque de fuite à l'étranger, d'altération de preuve ou de collusion avec des personnes concernées de près ou de loin par l'affaire.

Dès les premières heures de la matinée, une longue queue s'était formée devant le tribunal. Plus d'un millier de personnes ont patienté dans le froid pour tenter de décrocher une des rares places: seulement 14 tickets ont été alloués par tirage au sort à des membres du public, pour assister à la comparution du célèbre accusé.

La procédure est rare, seul 0,6% des détenus ont fait une telle requête l'an dernier. Elle n'a quasiment aucune chance de changer le cours des choses mais la portée symbolique est forte pour M. Ghosn, qui a là une occasion de rompre le silence médiatique dans lequel il est muré depuis plusieurs semaines.

Le maintien en détention contesté

Quelques heures après son audition, ses avocats ont donné une conférence de presse de 2 heures, avec l'intervention très attendue de Motonari Otsuru, ténor du barreau japonais. Chargé de la défense personnelle de Carlos Ghosn, il est un ancien responsable-clé du tribunal chargé actuellement de l'affaire.

L'avocat a estimé que le maintien en détention de Carlos Ghosn « ne se justifiait pas ». Mais sa période de détention actuelle doit durer jusqu'au 11 janvier, date à laquelle le procureur doit statuer sur une 3ème procédure sur des soupçons d'abus de confiance. Si elle est lancée, la détention de Carlos Ghosn sera à nouveau prolongée.

Et selon Motonari Otsuru, cela pourrait encore durer de longues semaines, observant que lorsque les faits sont niés intégralement, quasiment aucune libération sous caution n'est possible avant l'ouverture d'un procès. Dans ce cas précis, l'avocat estime qu'il pourrait se tenir à horizon de 6 mois. Dans l'intervalle, les défenseurs de Carlos Ghosn promettent toutefois de multiplier les demandes de libération.

Décisions approuvées et vérifiées

Mais Motonari Otsuru est formel : du salaire, à l'usage d'instruments boursiers, en passant par les autres aspects financiers du dossier, strictement rien n'a été caché au conseil de Nissan.

L'avocat se veut plus précis : tout a été vérifié et approuvé par les administrateurs du constructeur, ainsi que les services juridiques en interne, et même contre-vérifié par un cabinet juridique externe.

Bientôt 2 mois de détention

Carlos Ghosn a été mis en examen le 10 décembre pour dissimulation aux autorités boursières d'une partie de ses revenus perçus chez Nissan: environ 5 milliards de yens (38 millions d'euros) sur cinq années, de 2010 à 2015.

A l'issue de cette première garde à vue, il a fait l'objet d'un nouveau mandat d'arrêt pour les mêmes faits mais cette fois entre 2015 et 2018, puis d'un troisième, pour abus de confiance. Il est notamment accusé d'avoir effectué des virements d'un compte de Nissan au bénéfice d'un ami saoudien.