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Changer facilement de banque: pourquoi le gouvernement y est hostile

Les utilisateurs bancaires font face à de nombreux obstacles lors de changements d'établissements

Les utilisateurs bancaires font face à de nombreux obstacles lors de changements d'établissements - -

Le député PS Laurent Grandguillaume veut engager le débat sur la création d'un numéro de compte bancaire unique, facilitant le changement d'établissement. Le gouvernement semble hostile à cette réforme pourtant populaire.

Pour bon nombre de particuliers, changer de banque s'apparente à un parcours du combattant. Si l'on en croit une étude de l'UFC Que choisir de février 2012, 40% des personnes ont rencontré des problèmes: décalages dans les transferts des virements et prélèvements, erreurs de la banque d’arrivée, passage d’un chèque sur l’ancien compte.

La démarche est également lourde puisque l'usager bancaire doit prévenir les prestataires avec qui il a établi des prélèvements (électricité, gaz,télécoms ...). 31% des consommateurs abandonnent alors et restent dans leur banque d'origine.Du coup, la mobilité bancaire (personne changeant d'établissement) marque le pas en France, s'établissant à 7,75% contre 8,6% dans l'Union européenne.

Pour y remédier, Laurent Grandguillaume, député PS de la Côte-d'Or, compte déposer un amendement ou un sous-amendement au projet de consommation, qui sera discuté le 25 juin prochain en séance publique à l'Assemblée nationale. Via ce procédé, il va "demander au gouvernement un rapport sur la portabilité bancaire".

Un unique compte bancaire

Derrière ce terme se cache une idée assez simple. "Il s'agit de permettre à l'utilisateur d'avoir toujours le même numéro de compte durant son suivi, comme cela existe pour les téléphones portables", explique le député. Via cette solution, l'utilisateur n'aurait plus à prévenir ses fournisseurs,car les prélèvements continueraient de s'effectuer sur le même compte, malgré le changement d'établissement.

Problème: cette idée, alléchante à première vue, fait débat. En 2008, la Commission européenne, après avoir étudié l'option, y a renoncé pour des raisons de coûts. Pour le Comité consultatif du secteur financier, elle n'a pas démontré son efficacité dans les pays où elle a été implantée (Royaume-Uni, Pays-Bas). De plus, comme le relève un rapport parlementaire, "la CNIL pourrait en outre s’y opposer en raison de l’extrême sensibilité des données bancaires".

Enfin, il y a le principal obstacle qui est d'ordre technique. Dans une réponse à une question écrite de la député PS Marietta Karamanli, en novembre dernier, Pierre Moscovici expliquait qu'"un numéro de compte bancaire représente non seulement un identifiant mais aussi une référence attachée à l'établissement teneur de compte (code banque, code guichet)", ce qui complique la création d'un compte unique. Dans les faits, le gouvernement n'est pour le moment pas favorable à la portabilité.

Les banques feront la démarche à la place du client

Ces difficultés, Laurent Grandguillaume ne les ignore pas. "La portabilité bancaire ne se décrète pas du jour au lendemain, mais l'idée est de faire avancer le débat dans ce pays.Si le gouvernement est prêt à étudier cette possibilité, via un rapport, ce sera déjà une belle victoire". Le député PS assure "être en discussions avec Bercy", à ce sujet. "Nous allons trouver un point d'accord".

Il rappelle que la portabilité n'est pas la seule option pour faire avancer la mobilité bancaire. Le député a déjà déposé un amendement, adopté en commission, proposant la création d'un service de mobilité. "L'idée est que ce service est optionnel.

Si le client l'accepte, le nouvelle banque contacte l'ancienne qui, dans un délai de cinq jours ouvrés, doit lui transmettre les opérations récurrentes des 13 derniers mois. La nouvelle banque se charge ensuite de contacter les prestataires de services", détaille-t-il.

Une mesure qui, cette fois, rejoint la position de la Commission européenne, qui veut aussi que ces démarches soient assurées par les banques.

Julien Marion