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Chaque Français aura bientôt un dossier médical partagé

Plus d'un million de DMP ont été créés sous l'égide de la CNAM TS (Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés).

Plus d'un million de DMP ont été créés sous l'égide de la CNAM TS (Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés). - Jean-Sébastien Evrard-AFP

La ministre de la Santé estime que le dossier médical partagé pourrait être totalement déployé par l'Assurance maladie d'ici la fin de l'année 2018. Sa généralisation induirait des économies en évitant la redondance d'actes médicaux. Mais quelques obstacles subsistent encore.

Instauré en 2004, le dossier médical personnel ou partagé (DMP) pour chaque français va-t-il enfin être généralisé après avoir frôlé le fiasco? "Le dossier médical partagé est enfin opérationnel, il y a aujourd'hui plus d'un million de dossiers ouverts dans des régions expérimentales, et il pourrait être totalement déployé d'ici la fin de l'année 2018 par l'assurance maladie", a déclaré Agnès Buzyn, la ministre de la Santé dans l'émission "L'Épreuve de vérité" sur l'antenne de Public Sénat.

Ce dossier unique informatisé, par le partage d’informations médicales sur la patient qu’il instaure, est censé favoriser une moindre redondance des actes, et une meilleure coordination des soins.

Le DMP doit éviter la redondance des actes médicaux

Selon la ministre, la généralisation du système permettra des "économies", en relevant qu'"aujourd'hui, quand on parle de pertinence des actes, beaucoup d'actes sont refaits entre la ville et l'hôpital, tout simplement parce que le médecin de ville ne récupère pas la radio, le scanner...". "Il faut maintenant un outil numérique partagé", a estimé Agnès Buzyn. Interrogée sur les modalités pratiques pour ouvrir son dossier médical, elle a indiqué que soit le médecin, soit le patient pouvait en être à l'initiative, via le site internet de l'Assurance maladie. 

La "reprise" en main du DMP par la CNAM (Caisse nationale d'assurance maladie), effective depuis le 1er janvier 2017, fait partie de la relance énergique du dossier médical partagé décidée en 2016, après qu'il eut été plombé par 12 ans d'absence de stratégie claire de déploiement des pouvoirs publics.

En 2012, un dossier médical partagé sur deux était vide

En 2012, le DMP avait été épinglé par la Cour des comptes pour son coût très élevé (210 millions d'euros). Elle relevait que seuls 158.000 dossiers avaient été créés en juillet 2012 dont plus de la moitié (89 500) était restés... vides. Traînant ce fiasco comme un boulet, la France souffrait aussi de la comparaison avec des pays européens comme le Danemark qui a imposé un dossier digital patient standard dès le début des années 2000...

Désormais, pour éviter qu'une fois créé il ne reste vide, l’historique informatisé des remboursements effectués par l’assurance maladie est versé automatiquement sur le DMP, sauf opposition du patient. Cette alimentation automatique porte également sur les actes et consultations externes effectués au sein des hôpitaux.

La relance du DMP a déjà porté ses fruits dès la première année de sa reprise en main par la CNAM, en 2017. En avril l'an passé, dans les seuls 9 départements dans lesquels le déploiement DMP était restreint, environ 10.000 DMP par semaine étaient créés. Les espoirs de l'actuel ministre de la Santé sur la rapide montée en charge du dispositif se fondent sur cette tendance positive.

L'accord préalable du patient reste obligatoire

Toutefois, l'optimisme gouvernemental sur la généralisation du DMP d'ici la fin 2018 est peut-être exagéré. "Le nouveau dossier médical partagé souffre toujours des mêmes limites que le dossier médical personnel" relevait la Cour des comptes dans son rapport annuel 2018. Dans ce document, elle relève qu'en subordonnant l’ouverture d’un DMP au consentement du patient, la législation de 2016 constitue une limitation à sa généralisation complète.

"Il en va de même pour la possibilité offerte aux patients d’une part de masquer certaines informations de leur dossier aux professionnels de santé -hors médecin traitant- et, d’autre part, d’invoquer un motif légitime -notion dont le contenu n’a été précisé par aucun texte- pour s’opposer au versement d’informations dans leur DMP par les professionnels de santé" ajoute t-elle. Comme le rappelle la Cour des comptes, "à défaut d’une généralisation complète et d’une information intégrale, le risque existe que le dossier médical partagé ne déçoive à son tour, comme avant lui le dossier médical personnel".

Frédéric Bergé