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Pourquoi Sanofi veut pouvoir suivre à la trace certains de ses salariés

Le système de géolocalisation supervise les allées et venues des salariés du campus de Gentilly, site inauguré en juin 2015 par Sanofi.

Le système de géolocalisation supervise les allées et venues des salariés du campus de Gentilly, site inauguré en juin 2015 par Sanofi. - Bouygues Immobilier

"Le géant français de la pharmacie a doté d'une puce les porte-badges de 3.000 salariés. Sanofi peut ainsi suivre leurs déplacements sur un campus géant et optimiser ainsi leur espace de travail. Inquiet, un syndicat a obtenu que la collecte des données soit anonymisée."

Peut-on équiper ses salariés d'une puce électronique qui suit leurs déplacements, même si c'est pour optimiser l'espace de travail? Sanofi a distribué il y a quelques jours des porte-badges équipés de puces électroniques aux 3.000 salariés travaillant sur son campus de Gentilly (Val-de-Marne).

Inauguré en juin 2015, ce campus a bouleversé les habitudes des salariés du laboratoire pharmaceutique en instaurant un vaste espace de travail en immense open space. Personne n'y a de bureau attitré. Raison officielle: faciliter la collaboration et les échanges entre les salariés.

En centralisant les informations envoyées en temps réel par ces puces qui géolocalisent leurs porteurs, Sanofi peut "mesurer l'utilisation des espaces" pour savoir par exemple s'il faut plus de salles de réunion ou adapter les flux dans les espaces de restauration aux heures de pointe.

FO a demandé les preuves de l'autorisation par la CNIL du système

Au départ, les puces radio RFID (Radio Frequency IDentification) devaient être directement installées sur les badges des salariés, ce qui aurait permis de recouper les données de géolocalisation avec celles liées à l'identification du salarié. Après intervention des représentants du personnel, elles ont finalement été insérées sur les porte-badge. De cette façon, les puces sont anonymisées.

Pascal Lopez, délégué Force Ouvrière, affirme "attendre toujours les preuves d'autorisation de la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des liberté) que Sanofi refuse selon lui de transmettre aux représentants du personnel. Un dispositif de ce type existerait également sur le site du Carteret à Lyon, selon le groupe, qui affirme n'être pas le seul à l'utiliser.

La mise en place de ce système de géolocalisation et les tensions sociales qu'il provoque a pour contexte l'annonce en février 2016, d'un programme de suppression de 600 emplois en France.

Géolocalisation des salariés : la Cnil veille au grain

Les plaintes reçues en 2015 permettent à la Cnil d’identifier de nouvelles tendances. La géolocalisation des salariés non plus via leur véhicule mais via des bracelets connectés ou leur smartphone en fait partie de même que de nouvelles techniques de vidéosurveillance des salariés via une application sur smartphones ou une webcam.

En matière de géolocalisation des salariés, la commission a, jusqu'à présent, surtout été confrontée à l'utilisation de dispositifs embarqués dans les véhicules professionnels. Elle a notamment été conduite à rappeler qu'un tel système ne peut pas être utilisé :

- Dans le véhicule d’un employé disposant d’une liberté dans l’organisation de ses déplacements (par exemple : VRP).

- Pour suivre les déplacements des représentants du personnel dans le cadre de leur mandat.

- Pour collecter la localisation en dehors du temps de travail (trajet domicile travail, temps de pause,etc.), y compris pour lutter contre le vol ou vérifier le respect des conditions d’utilisation du véhicule.

- Pour calculer le temps de travail des employés alors qu’un autre dispositif existe déjà (cas des routiers disposant déjà d'un chronotachygraphe à bord de leurs camions).

Frédéric Bergé