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Comment l’open data façonne la ville de demain

L’évolution de New York City repose en partie sur l’exploitation des données ouvertes.

L’évolution de New York City repose en partie sur l’exploitation des données ouvertes. - Pixabay

La généralisation des données ouvertes permet aux villes et à leurs habitants d’interagir davantage, de responsabiliser entreprises publiques et privées et d’accroitre l’engagement citoyen. New York City est l’une des ville les plus avancées en la matière et multiplie les projets faisant appel à l’open data.

En 2012, Michel Bloomberg, alors maire de New York City, a signé une loi locale imposant à toutes les institutions publiques de la ville d’ouvrir leurs données et de les mettre à disposition d’ici à fin 2018 sur un portail unique dédié à cet effet. Aujourd'hui plus de 1100 jeux de données sont disponibles regroupés à travers dix catégories: santé, transport, environnement, éducation, entreprise, administration, logement, sécurité publique, services sociaux et loisir.

Si la ville possède son propre service d’analyse des données ouvertes, baptisé Moda (Mayor’s office of data analytics), ces données sont accessibles et utilisables par tous les new yorkais.

Challenger les services publics de la ville

Ainsi, en 2016, en analysant les données sur les contraventions de la police de New York, Ben Wellington, professeur de statistiques et analyste chez Two Sigma, a découvert que des milliers d’automobilistes avaient été verbalisés à tort depuis près de 8 ans. En effet, en 2008, un changement dans la loi autorisait les voitures à stationner devant les bateaux (abaissements de trottoir). Or entre 2008 et 2016, la police de New York a continué à verbaliser ces véhicules, pour un montant de plusieurs millions de dollars chaque année.

Après reconnu son tort, la police a revu la formation de ses agents. Dans la foulée, la ville s’est engagée à rembourser les automobilistes injustement verbalisés. "Certes cette histoire n’a pas fait bonne presse à la police de New York, mais ça a été une victoire en matière d’open data, explique Amen Ra Mashariki, chief analytics officer à la ville de New York. Grâce à aux données ouvertes Ben Wellington a pu collaborer avec la ville pour en améliorer le fonctionnement".

Améliorer la justice sociale et les services aux habitants

New York City est l’une des villes les plus avancées en matière d’open data. Le nombre et la variété de jeux de données disponibles permet de résoudre des problématiques de plus en plus diverses. Ainsi, la commission droits de l’Homme de New York a souhaité être proactive dans la lutte contre les discriminations à la location d’appartement. En particulier, les propriétaires n’ont pas le droit de refuser les locataires qui souhaitent payer une partie du loyer à l’aide de bons gouvernementaux. En recoupant des données mises à disposition sur le portail open data de la ville (historique de plaintes, cadastre, demandes, marché de la location…) le bureau d’analyse de la ville a identifié les zones où les propriétaires sont potentiellement les plus sollicités par les citoyens souhaitant louer un appartement en utilisant ces bons. Depuis, la commission envoie des testeurs, se faisant passer pour d’éventuels locataires, afin d’identifier les propriétaires ne respectant pas la loi.

Plus récemment, le service Moda a cartographié les zones de New York City où les habitants sont les moins connectés à Internet, soit parce qu’ils n’ont pas les moyens, soit parce les foyers sont mal desservis. Cette visualisation va permettre à la ville de cibler ses investissements et sa politique de couverture à Internet à haut débit?

Eplucher les dépenses publiques et prioriser les projets

Pour Beth Noveck, co-fondatrice et directrice de GovLab, une entité chargée d’accompagner les institutions publiques dans leur transformation numérique, il s’agit d’aller plus loin. "Developper des applications qui facilitent les transports des habitants c’est très bien, admet-elle. Mais peut-être que ces ressources pourraient être utilisées pour éplucher les dépenses publiques et les budgets. Et ainsi améliorer notre système éducatif ou réduire l’emprisonnement de masse".

Car les entreprises publiques, comme celles du privé, manquent de ressources, notamment humaines. L’experte conseille donc aux villes de prioriser leurs projets open data, en gardant toujours une question en tête: ce projet permet-il de faire avancer la justice sociale dans nos communautés?

Eddye Dibar